David Stern et Billy Hunter peuvent être rassurés : l’action des grévistes ne se déprécie pas sur le marché de l’affect populaire.
Long Beach, théâtre d’une ferveur plébéienne rassurante, enthousiasmante et disons-le, plaisante : la pièce en six actes s’est jouée à guichets fermés dimanche à South LA.
Basket USA était sur place.
Acte I. 16h30, la file à l’extérieur de la Walter Pyramid revêt des apparats de gala. Une heure de queue, sécurité renforcé sur le pas de l’escalier menant au sésame, hôtesses à gogo. Cal State Long Beach déroule tapis rouge pour ses étoiles du soir. Même Clipper Darrel, institution du Staples Center, fait le pitre et enchaîne les « high five » avec ses potes, Matt Barnes et DeMar Derozan au premier chef. Sur des torses adipeux, les maillots pullulent dans les tribunes, où la gent féminine honore la pyramide de sa douceur. La salle se remplit doucement, dehors le thermomètre flirte avec les 30°.
Acte II. 18h05. Dans les coursives de l’écrin, les stars jouent le jeu et s’offrent en pâture à la longue brochette de journalistes présents pour le « Big Pay Back ». L’ambiance est Club Med, open bar pour les médias et sourire à gogo sur les faciès des stars, alors qu’au même moment à New-York le syndicat négocie sec avec la NBA et les proprios.
Le message est unanime, pas une voix discordante : on veut jouer. « Etre ici avec tous ces fans et les médias, ça donne un goût de NBA et ça fait du bien », assure Nick Young, coupe afro et rire franc. « Ah bon Kobe propose de donner de l’argent aux joueurs en difficulté ? Je ne savais pas. Mais moi ça va, je n’en ai pas besoin », rigole le rookie des Wolves Derrick Williams. « C’est bon d’être là, ça nous manque », confie Derozan.
Le match préalable des célébrités, où a gambadé l’ancien champion olympique du 100m Maurice Greene, est terminé depuis une bonne demi-heure. La salle bouillonne, les stars haranguent pendus aux barrières, les joueurs répondent. Disponibles : l’épithète nous claque au visage. L’opération séduction ne fait que commencer.
Acte III. 19h10, présentation des escouades. L’arrivée de Kevin Durant 10 minutes plus tôt a provoqué une standing ovation improvisée. Le meilleur scoreur NBA a la cote dans les Cité des anges, sevrée de basket et prête à exploser pour le moindre placebo. A son habitude, l’idole du Thunder est affable et interrompt son shoot around pour signer des autographes sur le parquet.
Mascotte de la Drew League, Baron Davis se régale sur le banc, en civil, lunettes « Où est Charlie » toujours vissées sur le pif. Mais l’ancien Bruin et Clipper ne gagne pas l’applaudimètre. La palme est pour Matt Barnes, Trevor Ariza, John Wall et bien évidemment Kevin Durant, comme chez lui alors qu’il est dans le camp adverse.
55 points pour John Wall, 50 points pour Kevin Durant, 48 points James Harden
Acte IV. 20h05, mi-temps. Kevin Durant a mis douze minutes pour assumer son rang. En premier quart-temps, la star a pataugé, sans réussite et plombée par les pertes de balle. Ariza, James Harden et Wall sont, eux, en jambe d’emblée et la rencontré est enjouée, à défaut de sérieux. La joute est brouillonne, les « Nbaers » sont là pour servir show, en mode All Star Game. La foule est contentée, au moindre alley-oop ça exulte, sur les dunks ça crie.
« Jouez, on s’en fout du score », lance même un spectateur, quand le match est interrompu par l’arbitre, en pleine conversation avec la table de marque.
Un Tomar de Durant fait lever les quelque 5 600 spectateurs, Jennings lui répond en poursuivant ses arabesques. Les gestes « high lightesques » sont légion, ça joue comme dirait l’autre, à l’image d’Ariza se fendant d’un dunk énorme sur un alley oop avec la planche de Jennings. Le trop plein de déchets reflète les prises de risque. Pathétique et risible, Michael Beasley reçoit les sifflets. Harden, Wall et Durant virent en tête au scoring, l’arrière d’OKC étant impeccable de concentration et d’efficacité. Ah oui, au fait, à la pause la Drew League mène 79-71.
Acte V. 21h00. Le gong retentit. La fête est terminée. Pendant dix minutes, la Drew League a pris le Mur de D.C. en pleine tronche. Saoulée par les exploits du Magicien de la soirée, John Wall, l’équipe « made in LA » a pu compter sur Harden et Barnes pour conserver la main mise sur une rencontre dominée quasi du bout en bout. Wall, auteur en première période d’un 360° dantesque sur un lay-up conclut son récital avec 55 points, Durant en compile 45. Le duo était trop esseulé. Les Angelinos emportent la mise 151-144 avec 48 points d’Harden.
Acte VI. 21h25. Sortie de vestiaire, Baron Davis joue les RP de luxe pour la Drew League. « Les fans se sont régalés, c’est l’essentiel. Certains gars sont venus de l’autre bout du pays pour ce match, ils en avaient envie. On a vu du bon basket », assure le meneur des Cavs, contraint quelques minutes plus tôt de jouer les videurs devant la barrière séparant le parquet et les entraves réservées à la presse et la famille. Là, dans ce petit espace de nantis, Ariza parle des négociations en cours à Big Apple et Nick Young confie sa satisfaction d’avoir gagné.
Matt Barnes prêche la solidarité des joueurs, « on doit trouver un accord juste » estime en écho JaVale McGee. A mille lieux de la communication très cadrée de la NBA, l’atmosphère bon enfant s’accorde avec le ton de l’événement. « Je suis fatigué, je prends quelques jours off. Dommage pour la défaite », affirme Kevin Durant sur Twitter.
Le revers de la Goodman League sera vite oublié, demain lundi le lock-out vit un jour important. Car l’essentiel reste là. « On aimerait être à notre place, dans notre club à jouer la pré saison », confirme Nick Young. Conclusion. Baisser de rideau.