Le 2 mars 2022, Willie Cauley-Stein ne le sait pas encore, mais il dispute son dernier match NBA. C’était avec les Sixers, au terme d’un contrat de 10 jours. Sixième choix de la Draft 2015, l’ancien intérieur des Kings et des Warriors n’a plus jamais posé un pied sur un parquet NBA, et la saison dernière, il était en Italie où il s’est éclaté dans le jeu européen, et il s’est même emparé du record de rebonds en Eurocup !
Cet été, il a participé au Basketball Tournament avec ses anciens « alumni » de Kentucky, et il a vécu, peut-être, les plus beaux moments de sa vie de basketteur. Au départ, il voulait jouer en summer league pour retenter sa chance en NBA, mais l’appel des amis et des anciens coéquipiers était plus fort, et il ne le regrette pas.
23 août 2019, sa vie bascule
« Ces deux semaines, c’était comme dans un film », confie Cauley-Stein à The Athletic. « C’était la meilleure décision possible… J’aurais aimé enregistrer littéralement tout, chaque jour, pour pouvoir revenir en arrière et le regarder encore et encore. C’était si spécial. »
Si « WCS » est si enthousiaste, c’est parce qu’il sort d’une période très compliquée, et le mot est faible. Tout a commencé le 23 août 2019. L’intérieur vient de signer sa meilleure saison en carrière avec les Kings, mais la franchise refuse de le prolonger. Il passe un été à bosser, à la recherche d’un contrat. Ce jour-là, il n’est donc pas chez lui à Sacramento lorsque des hommes font irruption et tirent sur ses amis qui dorment chez lui : un mort et deux blessés ! Toujours sans contrat, il accepte de rejoindre les Warriors pour le salaire minimum.
« C’est ainsi que s’est enclenchée une spirale sur le plan de ma santé mentale », raconte-t-il. « En essayant de gérer cela et de jouer au basket en même temps – pour une nouvelle équipe, avec un mauvais contrat, et puis ma femme est tombée enceinte – il y avait trop de choses bizarres et de grands changements, et j’ai commencé à prendre des analgésiques pour essayer de fuir la réalité. »
Face à la maladie de sa grand-mère adoptive, il s’enfonce dans les opioïdes
Puis la grand-mère qui l’a élevé, Norma Jean Stein, s’est vue diagnostiquer un cancer des os. Cauley-Stein ne supporte pas de la voir souffrir et dépérir, et il s’enfonce un peu plus dans la dépression et les médicaments.
« Je prenais tellement de pilules que je dormais tout le temps… Ou quand j’étais réveillé, je n’étais pas vraiment là. Je n’ai pas géré ça comme il fallait » reconnaît-il. « Je n’ai pas pu dire au revoir à ma grand-mère. J’aurais pu être plus souvent près d’elle, la contacter par FaceTime, faire tant de choses pour être avec elle à la fin, mais j’ai fait exactement le contraire. J’ai été un lâche. Chaque fois que je lui parlais, elle avait l’air différente, pire, et je ne voulais pas la voir comme ça ».
Sa grand-mère décède en décembre 2021. A l’époque, il est aux Mavericks, qui venait de le prolonger, et la franchise annonce qu’il est absent pour « raisons personnelles ». Une semaine plus tard, Cauley-Stein est interné à sa demande, et les Mavericks s’en séparent un mois plus tard. « J’aurais pu mourir… », lâche Cauley-Stein. « La joie que vous avez ressentie lors du Basketball Tournament est différente parce que je sais que j’ai évité une balle. J’ai demandé de l’aide avant qu’il ne soit trop tard et je me suis amélioré, mais le basket-ball a été beaucoup plus difficile à retrouver. »
Accro à une substance interdite
Si « WCS » a frôlé la mort, c’est parce qu’il était dans l’automédication, et alors qu’il pense acheter du Percocet, il se retrouve avec des cachets coupés avec du fentanyl. Interdite en France depuis cet été, cette substance est 100 fois plus puissante que la morphine et 50 fois plus puissante que l’héroïne. Le slogan de la DEA est simple : « une pilule peut tuer », et l’agence américaine estime qu’environ 70 % des 80 millions de fausses pilules contenant du fentanyl qu’elle a saisies en 2023 contenaient une dose potentiellement mortelle.
« Je ne le savais pas avant de demander qu’on m’interne. J’ai regardé ma femme et je lui ai dit « ‘J’entends tout le temps des histoires de jeunes qui vont à une fête, qui n’ont jamais pris de drogue auparavant, qui décident de prendre un Percocet, et qui finissent par prendre du fentanyl, et qui meurent. Avec une seule pilule… Moi, j’en prenais des centaines, pendant des mois et des années. Ça aurait pu être moi. »
Mais Cauley-Stein a eu le bon geste, au bon moment, et aujourd’hui débarrassé de ses démons et ses troubles, il ne souhaite qu’une chose : retrouver le plaisir de jouer. En attendant de décrocher un contrat, il a repris ses études et espère obtenir son diplôme dans l’année. A 31 ans, il a encore toute la vie devant lui.