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Gregg Popovich, un génie du jeu et un maître des mots

NBA – Devenu le coach le plus victorieux de la NBA, Gregg Popovich a d’abord bâti sa renommée sur ses qualités de technicien avec cinq titres de champion NBA, mais aussi son art de la punchline.

NBA: Cleveland Cavaliers at San Antonio SpursDepuis plus deux décennies, Gregg Popovich dirige les Spurs d’une main de fer. L’entraîneur américano-serbe ne s’est jamais encombré d’un gant de velours : personnage à part, austère mais en haut en couleurs, il pratique l’humour noir et fait rire jaune comme aucun autre coach en NBA. Pour fêter sa 1 336e victoire en carrière, Basket USA a ressorti les 20 meilleurs punchlines de ce génie du jeu – et de la répartie.

En 1979, Gregg Popovich, 30 ans, débarque à l’université de Pomona dont l’équipe de basket évolue en troisième division NCAA. Veste écossaise sur les épaules, cheveux déjà grisonnants, l’ancien de l’US Air Force y pose les jalons de sa future carrière de coach NBA. Apprécié par tous ses joueurs, qu’il balade dans son van et invite à sa table, le jeune trentenaire est aussi craint pour ses gueulantes monumentales. Il frappe sur les murs des vestiaires, balance des craies sur ses hommes. Un jour, Pomona s’incline contre Caltech, qui venait de perdre 99 matches de suite. Popovich s’emporte : « Ces types-là sont des intellos, ils ont eu des notes incroyables aux derniers exams, ils ont dans leur poche un mouchoir en tissu pour nettoyer leurs lunettes, et pourtant, ils vous mettent une fessée. »

Sept ans plus tard, il fait des traînards de Pomona des champions universitaires. « Poppo » – tel qu’il est alors surnommé – est repéré par Larry Brown, coach des Jayhawks (division I), qui l’invite dans le Kansas pour un match amical. L’effectif de la petite université californienne est humilié de plus de 50 points et le public chante « aiiiir-baaaaall » pour narguer son modeste adversaire, mais Popovich reste calme. Il dit même à ses joueurs en souriant : « On va se faire botter le cul. Je m’en fous, et vous devriez en faire de même. Profitez-en à fond. »

En 1988, Larry Brown le nomme assistant-coach sur le banc de San Antonio. Sa carrière est lancée.

« J’aurais adoré rester (à Pomona) pour toujours. J’y serais devenu gros, stupide, mais heureux. »

Promu head coach en 1996, il file à Saint Croix, l’une des terres composant les îles Vierges où vit un certain Tim Duncan, que les Spurs espèrent drafter l’été suivant. Des années plus tard, il racontera son voyage : « En arrivant à Saint Croix, j’ai récupéré ma voiture de location, mais personne ne m’avait prévenu qu’on roulait à gauche. J’ai gesticulé comme un demeuré auprès d’une bonne dizaine de véhicules avant de me rendre compte que le con, c’était moi. »

– Un an plus tard, la franchise texane sélectionne Tim Duncan avec son premier choix de Draft, afin de l’associer à David Robinson. Un journaliste demande à Popovich s’il envisage de transférer l’intérieur pour renforcer ses lignes arrières. « Tim Duncan a moins de chance d’être transféré que R.C Buford (scout des Spurs, depuis devenu General Manager) d’être intégré à notre cinq de départ. »

En 1999, les Spurs remportent le premier titre NBA de leur histoire. La « méthode Popovich » détonne. Les médias tentent de cerner la personnalité de ce coach pas comme les autres, qui n’hésite pas à déclarer : « Je vais au lit tous les soirs sans me soucier le moins du monde de mon équipe et de mes joueurs. Je ne vais pas au boulot le matin en me disant ‘je vais devoir régler tel ou tel problème’. Jamais (…) Ma vie n’est pas consacrée au sport. J’aime le basket. J’aime mes joueurs. J’aime aller à l’entraînement. J’aime la compétition. Mais quand c’est fini, c’est fini. Je n’ai pas envie de devenir fou (…) Je passe beaucoup de temps à parler de politique, de vin, d’actualité internationale avec mes joueurs. Ne serait-ce que pour leur montrer que leur bien-être ne peut dépendre exclusivement de nos résultats sportifs. »

– En cela, l’atypique personnage s’est toujours opposé à un allongement de la saison régulière, parfois envisagée pour atténuer l’enchaînement des rencontres et supprimer les back to back : « La saison est suffisamment longue comme ça. Je ne viendrai pas au boulot en juillet. S’il y a un match en juillet, ne comptez pas sur moi. » Même si c’est un match pour le titre? « Ne comptez pas sur moi. La vie est trop courte. »

« Si l’un de mes joueurs n’est pas impliqué dans une bagarre, il paiera une amende »

– Dans un superbe portrait du Texas Monthly, en 2001, Michael King cherchait à comprendre « pourquoi tant de détracteurs continuent de penser que (Popovich) n’est qu’un coach médiocre ». Le journaliste ne manque pas de préciser qu’il a eu un mal fou à obtenir une longue entrevue avec le sujet de son article, lequel se justifie : « Je ne veux pas donner l’impression d’être un modèle d’humilité, mais je n’arrive pas à me faire à toute cette merde. Ceux qui comptent, ce sont les joueurs. Je le pense vraiment. (…) J’essaye d’être un facilitateur, de créer un environnement dans lequel mes joueurs peuvent s’exprimer et être performants. Mais je crois qu’une centaine d’autres coaches auraient pu arriver au même résultat avec ces joueurs. Même Lady Bird Johnson (l’ex-Première dame des Etats-Unis) aurait pu mener cette équipe jusqu’au titre. »

Après Duncan, Pop’ dénichera en 2001 un autre joueur-cadre, plus inattendu celui-ci, sur lequel il fera reposer le jeu des Spurs pendant les quinze saisons à venir. Il est Français, a 19 ans, et ne cessera jamais de le bluffer par sa maturité : « Quelques jours après la Draft, je découvre que Tony Parker s’est trouvé un agent immobilier et a visité quelques maisons à San Antonio, qu’il a acheté et meublé certaines d’entre elles, qu’il a obtenu un prêt hypothécaire, la totale. Moi, quand j’avais 19 ans, je ne savais même pas me repérer en ville. »

« Tous les deux mois, les quatre meilleurs scoreurs de l’équipe devront obligatoirement faire une apparition sur MTV »

– Une nouvelle fois sacrés en 2003, les Spurs mettent fin au règne des Lakers mais ne font pas pour autant l’unanimité auprès du grand public. Peu convaincus par ce collectif lisse dont ne se détache aucune personnalité exubérante, certains pointent du doigt un jeu « convenu », voire « ennuyeux ». Popovich leur répond : « Pour changer cela, j’ai mis en place quelques règles. Si l’un de mes joueurs n’est pas impliqué dans une bagarre, sur ou en dehors du terrain, une fois par mois, il payera une amende. De plus, tous les deux mois, les quatre meilleurs scoreurs de l’équipe devront obligatoirement faire une apparition sur MTV. Enfin, pour sanctionner mes mauvais shooteurs de lancers-francs, j’ai décidé que ceux-ci devront, lors des rencontres télévisées, regarder la caméra et se frapper le torse en hurlant après chaque bonne action. »

– Lors du premier match des Finales 2005, contre Detroit, Popovich prend deux temps-morts dès le début du premier quart-temps. Interrogé en conférence de presse à ce sujet, il explique calmement, d’un air grave : « Je me suis assuré d’une chose auprès de mes joueurs : je voulais être sûr que je ne leur causais pas trop de gêne. Je voulais savoir si c’est ma présence qui les empêchait d’appliquer mes consignes. Et si je ne les embêtais pas trop, je voulais savoir s’ils voulaient bien défendre un peu, par la même occasion. » 

« Mon principal objectif pendant la pré-saison, c’est d’arriver à l’heure au resto »

Il n’y a qu’une chose que Popovich déteste plus que les conférence de presse : les interviews de bord de terrain en plein match, obligatoires lorsque les rencontres sont diffusées sur le réseau national. Quand une journaliste lui demande ses impressions du premier quart-temps : « Aucune »

Quand un autre lui demande quel est le problème des Spurs, alors menés au score : « La balle n’est pas rentrée dans le cercle »

Quand un dernier lui demande s’il est content des choix de tirs de ses joueurs : « Content? Je ne cherche jamais à savoir si je suis ‘content’ pendant un match. Trouve un autre mot. Je ne peux pas te dire si je suis ‘content’ ou pas. On est en plein milieu d’un match, là. Personne n’est ‘content’. »

– Alors forcément, quand un sideline reporter l’embête en direct même pendant un match de pré-saison, il craque : « C’est la pré-saison là, on est obligé de faire ça en pré-saison? Tu te fous de moi? Il faut faire ça même pendant la pré-saison? La pré-saison?! Mon principal objectif pendant la pré-saison, c’est d’arriver à l’heure au resto. » 

Le tortionnaire n’hésite pas à jouer de sa capacité à tailler en pièces ceux qui l’interrogent. Lors du camp d’entraînement des Spurs, en septembre 2015, un reporter de NBA TV s’essaye à l’exercice mais se retrouve face à un véritable mur : Popovich, le regard noir, l’envoie paître à chacune de ses questions. Il fait des réponses à un mot ou deux, lâche des inepties. L’autre insiste, et le jeu dure plus d’une minute avant que le coach n’éclate de rire : « Je déconne. Je me prépare juste pour la saison. Vous pouvez couper, on va recommencer du début et faire une vraie interview. » Puis en pointant du doigt les autres journalistes, massés derrière eux : « Je me prépare à répondre à tous ces autres blaireaux, là-bas. »

– Mais les premières victimes de ses colères – réelles, celles-ci – sont ses joueurs. Et pas forcément ceux auxquels on s’attend : « A l’entraînement, j’engueule davantage, volontairement, les cadres de l’équipe. Duncan, Parker et Ginobili vont connaître plus l’enfer que n’importe quel autre joueur. L’effet d’un tel comportement est évident. Si les cadres répondent au défi sans broncher, tous leurs équipiers vont suivre leur exemple. »

Tous ne sont pas prêts à supporter pareil traitement : « Il y a beaucoup de joueurs dans cette ligue que je ne pourrais pas coacher, que je ne pourrais même pas croiser à l’entraînement. Je serais trop direct avec eux. Mais c’est ainsi que je fonctionne : si tu es bon, je te le dis, si tu es mauvais, je te le fais savoir. Si Tim (Duncan) se montre nonchalant au rebond, par exemple, je vais le sermonner comme je le ferais avec le 11e ou le 12e homme. Beaucoup de stars sont incapables de le supporter. D’autres comme Tim savent faire la part des choses : je l’engueule mais en fin de compte, je l’apprécie quand même, et cela ne nous empêchera d’aller manger ensemble pour parler de nos familles. »

« Le prochain d’entre vous qui rate un lancer-franc me paye une nouvelle voiture »

Le soir de la « lottery » 2008, Popovich invite Tony Parker dans la salle où les dirigeants des Spurs se réunissent, téléphone vissé à l’oreille, afin de négocier avec les autres franchises. Après avoir drafté George Hill (26e choix), le coach raconte, sourire en coin : « Tony s’était bien habillé, j’étais enchanté d’être assis à côté de lui. Il était très intéressé par Michael Beasley (2e choix). Il ne comprenait pas pourquoi on ne pouvait pas le sélectionner avec notre 26e choix. Je lui ai dit : ‘Tony, je n’ai vraiment pas le temps de t’expliquer toutes ces choses, va donc reprendre une portion de poulet’. »

– Durant les temps-morts, Popovich n’hésite pas à se mettre en retrait pour donner la parole à ses joueurs. Quand les choses ne vont pas dans son sens, il entre en action. Un jour, il lâche : « Le prochain d’entre vous qui rate un lancer-franc me paye une nouvelle voiture. »

Mais la plupart du temps, Pop’ ne dit… pas grand-chose : « Il m’arrive de leur dire : ‘Que voulez-vous que je fasse? Je n’ai rien pour vous. Vous venez de perdre la balle six fois de suite : que voulez-vous que je fasse? Démerdez-vous.’ Puis je vais me rasseoir. »

– En 2015, Becky Hammon est nommée assistante-coach des Spurs, devenant ainsi la première femme à accéder à ce poste en NBA. Un choix que Popovich avait justifié avec ces mots : « En Amérique, on aime faire l’autruche, plonger nos têtes dans le sable et se tenir en retrait des avancées sociétales ailleurs dans le monde. On imagine que notre pays est une grande place où la démocratie et la justice sont reines. Mais la réalité est que beaucoup de choses – liées au genre, à la race ou à la religion – vont mal (…) Regardez le droit de vote des femmes : combien de temps a-t-on mis avant de l’accepter? C’est ridicule de penser à toutes ces décennies d’attente, ces siècles parfois. Depuis le début des années 2000, le changement est mieux accepté. Les gens en ont assez des injustices. Le succès de Becky est un pas de plus dans la bonne direction. »

– Deux ans plus tôt, il avait pris position quand Sebastian De La Cruz, un jeune garçon de 11 ans, avait subi les moqueries de Twitter après avoir chanté l’hymne national à l’AT&T Center durant les Finales. Nombreux furent ceux qui, se référant à son nom et à son apparence, ont mis en doute sa nationalité voire la légalité de sa présence sur le sol américain. En conférence de presse, Popovich avait alors déclaré : « J’aimerais pouvoir dire que je suis choqué ou surpris par tous ces commentaires. Mais comme il y a encore une part significative d’intolérance et de racisme dans notre pays, ils ne m’étonnent pas. Ce qui m’a surpris, c’est la fierté de ces idiots, heureux d’être ignorants. »

« Une bonne équipe est une équipe où il n’y pas de frontière, pas de tabou »

– Le General Manager des Warriors, Bob Myers, estime que la franchise des Spurs est « un modèle que tout le monde essaye d’imiter ». Ce n’est donc pas un hasard s’il a appris par coeur la définition d’une « bonne équipe » selon Gregg Popovich : « Une bonne équipe est une équipe où il n’y pas de frontière, pas de tabou. Où tout les sujets sont débattus. Où aucune tâche n’est exclusivement réservée au président, au GM ou au coach. Une bonne équipe est une équipe où la critique est la bienvenue, où les dirigeants se font confiance et se partagent les informations et les responsabilités. ». Et d’ajouter : « Sans tout cela, une franchise ne peut avoir de culture, d’identité. Pour nous, en tout cas, cela a fonctionné. »

– De tous les reporters ayant subi le joug de Popovich, Craig Sager était celui dont l’égo a été le plus taquiné. Le technicien des Spurs n’a jamais pu s’empêcher de lancer des piques à l’homme aux costumes bariolés, dont les questions ont toujours été plus longues que les réponses qu’il recevait en retour. Au printemps 2014, lorsque Craig Sager avait annoncé qu’il se battait contre la leucémie, son fils l’avait remplacé le temps d’un match. L’occasion pour Pop’ de rendre hommage à sa victime préférée: « Tu fais du bon boulot, tes questions sont géniales, mais je préférerais répondre à ton père. Craig, tu nous manques. Ramène tes fesses, je promets d’être sympa avec toi. »

https://www.youtube.com/watch?v=Z_xMvztr-Wo

– Et lorsque Craig Sager s’en est allé, en décembre 2016, c’est ce même Popovich qui lui avait rendu le plus vibrant des hommages.

« Que vous connaissiez bien Craig ou pas, vous savez que c’était une personne unique à tous les niveaux et aujourd’hui, j’ai une pensée pour sa famille. Dire que c’était un professionnel et qu’il était bon dans ce qu’il faisait est un sacré euphémisme. Ceux d’entre nous qui le connaissaient savent qu’il donnait tout pour son travail, et bien qu’il fut exceptionnel dans son travail, il était encore plus une bien meilleure personne. Il aimait les gens. Il aimait les avant-matchs et les après-matchs. Il aimait les gens qui l’entouraient et tout le monde le ressentait. Le plus impressionnant chez lui est son courage. Ce qu’il a enduré, la bataille qu’il a menée, le courage dont il a fait preuve pendant cette période va au-delà de l’entendement. Si nous pouvions avoir la moitié du courage qu’il a eu pour rester sur cette planète, pour vivre chaque instant comme si c’était le dernier, on serait tranquille. Il va énormément me manquer. »

Article paru le 16 janvier 2016, mis à jour le 12 mars 2022

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