Devenu un personnage incontournable du microcosme NBA, Chris Andersen alias le Birdman, va connaître pour la première fois de sa carrière les frissons des finales NBA.
Un accomplissement en soi, mais certainement pas la fin de la route pour un joueur hors du commun. Basket USA a mené l’enquête et vous propose un portrait fouillé de ce mystérieux volatile.
Le conte d’Andersen tourne au drame familial
L’histoire de Birdman commence sur la côte Ouest, à Port Hueneme au nord de Malibu, dans la Californie des années 70, aux lendemains de la guerre du Vietnam. Linda Ogle travaille à la cantine de la base militaire où son paternel avait été muté en provenance du Tennessee avant de partir en mission au pays d’Ho Chi Minh.
Un jour, un grand blond du nom de Claus Andersen, un Danois de naissance, passe dans sa file et commence à lui raconter ses aventures à travers le monde. Trois mois plus tard, Linda et Claus se marient. Chris naît le 7 juillet 1978. Il aura deux sœurs après que Tamie a rejoint April et Chris dans le cocon.
Mais le conte de fées des Andersen tourne au drame familial quand Claus emmène toute sa famille dans le Texas en 1982. Pour services rendus dans l’armée, Andersen a obtenu un petit lopin de terre (plus de 40 000 m² quand même) au Texas, à 160 bornes au nord de Houston, sur lequel il projette d’installer sa petite famille… mais pour mieux la quitter !
Dans un superbe article de Chris Palmer d’ESPN, la mère de Chris rapporte effectivement que l’officier Andersen (devenu artiste peintre) avait d’une certaine manière prémédité de quitter femme et enfants. Au beau milieu de nulle part, sur les plaines texanes, avec une maison pas encore terminée, Linda et ses 3 mioches sont abandonnés et sans pension alimentaire loin des lois californiennes strictes en la matière…
« Comment on peut faire ça à ses propres enfants ? Tout ce qu’ils ont fait, c’est t’apporter de l’amour, et toi tu t’en vas sans te retourner… »
Le premier appelé de la D-League
Chris grandit donc dans cet environnement désertique et est bientôt contraint d’entrer dans un orphelinat car Linda ne peut plus gérer à elle seule malgré ses 3 jobs ! S’essayant à tous les sports, Andersen va finalement s’arrêter sur le basket car son coach au lycée lui trouve des prédispositions physiques évidentes. Malheureusement, le carnet scolaire de Chris ne lui permet pas d’entrer dans des facs prestigieuses telles Houston où un certain Clyde Drexler voulait le faire venir…
Au lieu de ça, et grâce au père de son entraîneur du lycée, Andersen s’inscrit finalement au Blinn Junior College à mi-chemin entre Austin et Houston. Il n’y jouera qu’une petite saison. Suffisante pour placer des stats intéressantes (11 points, 8 rebonds et 5 contre en 21 petites minutes de moyenne) et pour se laisser étourdir par les possibilités d’entrer en NBA, en tant que meilleur contreur du pays ! Mais, Chris Andersen n’est encore qu’un gars de la campagne qui ne sait pas encore vraiment s’y prendre dans la vie…
« Ma tête a commencé à grossir et je pensais que je pouvais faire n’importe quoi. Quand je suis parti de Blinn, je n’avais aucune idée de ce que j’étais en train de faire. Je n’avais pas du tout de plan. »
Et pour cause, Andersen ne s’était même pas inscrit à la draft… Du coup, il ne sera évidemment jamais appelé par Stern lors de la cérémonie du mois de juin 1999. A l’inverse, il sera sélectionné tout en haut de la première draft de l’histoire de la NBDL (qui sera rebaptisé D-League) en 2001 après avoir ramassé ses premiers cachets en tant que professionnel en Chine où Yao Ming l’avait déjà remarqué (« C’était le gars le plus énergique que j’avais jamais vu ! »).
Après seulement deux matches chez les Patriotes de Fayetteville, Andersen est appelé par les Denver Nuggets et devient donc le premier joueur de l’histoire NBA à arriver par la « petite porte » de la ligue de développement. Commence alors le feuilleton classique de la « success story » à l’américaine. Andersen gravit les échelons un à un et devient un solide joueur de rotations après 3 années dans le Colorado.
Bud Light, sa boisson énergisante
Jeune chien fou qui débarque dans la Grande Ligue sans aucun repère, Andersen se retrouve ainsi à essayer de faire passer un pitbull dans ses bagages à l’aéroport alors que les Nuggets ont encore deux matchs à jouer lors d’un road trip. Ses frasques capillaires (qui n’en sont qu’à leurs prémisses balbutiantes) lui mettent à dos son coach (l’imprononçable Jeff Bzdelik). Mais qu’importe, Chris est enfin en NBA !
Son transfert chez les Hornets en 2004 le propulse encore dans une nouvelle dimension avec un contrat rondelet de 14 millions sur 4 ans ! Double participant au concours de dunks, il assoie pour de bon son image de gentil fou dans la lignée des Walton, Dawkins ou Rodman. Mais le rythme de vie de pacha « made in NBA » couplé à ses habitudes de fêtard « made in Texas » commence à prendre beaucoup d’ampleur. Sa mère Linda prévient alors son fils.
« J’ai fait la fête comme toi en mon temps. Mais je n’ai jamais laissé ça affecter mon travail. Et je pouvais voir ce qu’il faisait de son temps libre quand je le voyais courir sur le terrain. Ses lèvres étaient toutes blanches et il était toujours à la recherche d’oxygène. Si je pouvais voir ça des tribunes, je sais que ses entraineurs le voyaient aussi. »
Mais Andersen fait vendre ! Son image placardée sur les murs de la Nouvelle Orléans lui permet de maintenir son train de vie. Il y a les locations de limousine pour ses potes de lycée d’Iola, les fringues Gucci pour une institutrice de Dallas, et puis les inévitables soirées endiablées dans le centre ville de Denver. Et puis, il y a la folie douce qui s’empare du fiston qui paye un sac à main à 5 000 dollars pour une première petite amie… et ensuite, offre une Jaguar à une autre… ou met encore la main au portefeuille quand ses potes doivent payer leur caution au poste de police…
Deux ans de suspension pour dopage
Birdman garde le masque mais l’été 2005 va tout faire éclater… Sa fiancée Brandy Newman, décide de le quitter et, quasiment coup sur coup, c’est l’ouragan Katrina qui va frapper toute la ville de la Nouvelle Orléans, détruisant au passage la maison d’Andersen. Chris est dévasté. Andersen plonge encore plus profond dans les abysses des paradis artificiels. Tout y passe : cocaïne, LSD, Methamphetamine…
Le couperet tombe le 27 janvier 2006 : Chris Andersen est banni de la ligue pour n’avoir pas respecté la politique anti-drogue de la NBA ! Deux ans de suspension sont la sanction lourde que doit purger Andersen. Mais le Texan sans racines, et désormais sans personne à ses côtés, si ce ne sont les membres de son entourage qui ont accéléré sa descente aux enfers, prend alors la décision qui va changer sa vie.
« J’étais complètement déchiré émotionnellement, mais je me suis rendu compte qu’il fallait un changement drastique dans ma vie. J’aurais très bien pu finir par me tuer. Donc quand je pense à tout ce qui m’est arrivé, je ne regrette pas du tout cette suspension. » affirmera-t-il calmement le jour de son retour au sein des Hornets, le 5 mars 2008.
« Toute cette histoire m’a sauvé la vie. J’avais besoin que tout ça arrive. Je ne sais pas où je serai aujourd’hui si je n’avais pas changé mes habitudes. Je sais qu’une carrière NBA ne dure pas pour toujours. Je ne vais pas détruire la chance que j’ai pour quelque chose d’aussi stupide. Mais je n’ai pas changé d’un iota. Je suis toujours la même personne que j’ai toujours été. Je ne fait plus les mêmes choses qu’avant, je suis plus intelligent désormais. »
Par l’intermédiaire de son mentor et agent Mark Bryant, Andersen revient au bercail à Denver et le Birdman prend alors un nouvel envol. Il poste plus de 2 contres par match en 20 minutes de jeu, ce qui en fait le meilleur contreur rapporté sur 48 minutes. Chris Andersen est bel et bien de retour.
Un record statistique en playoffs NBA
Mais las de 7 saisons (en cumulé) sans titre chez les Nuggets (le meilleur résultat sera cette finale de conférence perdue contre les Lakers en 2009), et surtout amnistié à contrecœur par Masai Ujiri (qui l’avait toujours soutenu), Birdman est alors expulsé de son nid. Malheureusement, au printemps 2012, il fait encore parler de lui dans une sombre affaire de pédophilie et d’extorsion de fonds. Cette fois-ci, c’est lui la victime, mais on craint que sa réputation ne le rattrape une nouvelle fois.
Mais alors qu’il tente de gagner sa place dans une franchise NBA comme un simple journey man, c’est finalement à South Beach à la fin du mois de janvier, qu’Andersen trouve un nouveau nid. Aussi efficace qu’extravagant, il a rapidement pris une place de choix dans l’effectif champion en titre. Seul véritable intérieur capable de protéger le panier et d’apporter des points en attaque (par son activité autour du panier), il a même établi un nouveau record de playoffs en termes d’adresse avec un insensé 83% de réussite aux tirs (dont une série de 18 tirs consécutifs).
« Vous savez quoi, il est vraiment incroyable [mon parcours] ! » confirme Andersen avant de participer à ses premières finales. « Mais en même temps, j’essaye vraiment de rester concentré sur l’instant présent, de garder toute mon énergie sur ce que je dois faire et ce sur quoi je dois devenir meilleur. Car je sais que je suis destiné à encore mieux. »