Deux jours après la défaite de la France en quart de finale des Jeux olympiques contre l’Espagne, Tony Parker est revenu, lors d’une conférence de presse organisée au Club France, sur le parcours de son équipe et a donné son sentiment sur l’avenir des Bleus.
Le meneur français est plus que jamais motivé pour revenir plus fort en 2013 et enfin battre l’Espagne.
Quel regard portez-vous sur votre parcours ?
Il y a deux façons de voir les choses. Tu es déçu parce que tu perds en quart de finale alors que tu as l’impression d’avoir dominé le match. On avait vraiment le match en main mais on n’a pas su mettre les tirs qu’il fallait à la fin. Donc ça c’est décevant. Mais après, quand tu réfléchis bien, on n’a pas eu une préparation facile. On n’a eu qu’un entraînement collectif avec toute l’équipe, je me suis entraîné que pendant dix jours. La préparation nous a tous rattrapé dans ce quatrième quart-temps parce qu’on était tous fatigué et qu’on a dépensé beaucoup d’énergie sur notre défense. On avait un schéma défensif pour les arrêter et c’est ce qu’on a fait puisqu’on les a tenus à 66 points. Mais voilà, à cause de notre mauvaise préparation, on n’a pas eu assez de jambes pour être performant en attaque. Donc oui, on est déçu de perdre en quart de finale, mais en même temps, si on regarde la préparation qu’on a eue, je pense qu’on a fait un bon tournoi.
Est-ce que c’est la défaite la plus frustrante de ta carrière ?
Non, je ne crois pas. C’est clair que c’est frustrant car on était tellement près. Mais en même temps, on se rapproche, on n’a jamais été aussi près de l’Espagne. Ils dominent le basket européen depuis cinq-six ans et il y a quand même pas mal de choses positives qu’on peut prendre de ce match-là. Surtout, on n’a encore une marge de progression. Ce n’est pas un problème d’expérience ou quoi que ce soit. C’est juste que ce n’est pas allé dans notre sens cette fois-ci. C’est ce qui fait la beauté du sport. Des fois c’est beau comme pour les filles et des fois c’est cruel comme pour nous. Je pense que notre heure viendra. Il ne faut pas oublier non plus qu’on avait pas mal d’absents. Je suis persuadé que sur les trois-quatre prochaines années, il y a de belles choses à faire. Et puis l’état d’esprit est trop bien dans cette équipe. Dès le lendemain de notre défaite, on parlait déjà tous de l’année prochaine. On est tous movité pour revenir et moi j’aurai encore cette flamme en moi pour jouer en équipe de France pour gagner un titre avant la fin de ma carrière.
« Noah peut nous aider, mais Beaubois et Mahinmi aussi »
Tu viens de mentionner les absents. À quel point le forfait de Joakim Noah a-t-il pesé dans le match contre l’Espagne ?
Il n’y a pas que Noah. Il y a aussi Rodrigue Beaubois, Ian Mahinmi, tout ça ce sont des joueurs qui peuvent nous aider, surtout dans une compétition comme celle-là. Quand tu arrives en quart de finale, c’est important d’avoir des grands. Tu ne peux pas gagner de titre sans avoir des grands. C’est vrai que Ronny (Turiaf), Kevin (Séraphin), Ali (Traoré) ont été extraordinaires sur ce tournoi. La façon dont ils ont joué contre les Argentins, contre la Lituanie. Je suis fier de toute l’équipe. Mais après c’est vrai que si un jour on veut aller jusqu’au bout, on aura besoin de tout le monde.
Comment tu te sentais physiquement contre l’Espagne ?
J’étais fatigué. Je n’ai jamais autant défendu. D’ailleurs coach Popovich m’a engueulé en me disant que j’avais intérêt à défendre comme ça à San Antonio. Il m’a dit en rigolant que je défendais plus pour mon pays que pour San Antonio. (rires) C’est vrai que j’ai dépensé beaucoup d’énergie en défense, c’était notre stratégie. Et ça a marché puisqu’on tient les Espagnols à 66 points. Mais le fait que je ne sois pas à 100 %, que j’ai eu une préparation un peu gâchée, c’est aussi une explication de ma fatigue dans le quatrième quart-temps. Mais je n’ai pas envie de me trouver des excuses, je n’ai pas mis les tirs, c’est tout. Je suis le leader de cette équipe, mes coéquipiers comptent sur moi pour mettre ces tirs-là et je ne les ai pas mis. J’assume. Je vais continuer à travailler dur et je peux vous promettre que je ne sortirai pas en boîte de nuit avant le championnat d’Europe. (rires)
Est-ce que tu te dis que certaines stars espagnoles ne seront pas là en 2013 et qu’il y aura donc plus de chances pour vous de devenir champions d’Europe ?
Non. De toute façon, je ne pense même pas à l’Espagne. Après le quart de finale, je suis convaincu qu’on peut les battre, même s’ils sont au complet. On peut les battre. Avec un entraînement collectif et moi seulement dix jours d’entraînement, on a mené tout le match. Donc je suis convaincu qu’on peut les battre. Je préfère qu’on se concentre sur nous car on peut encore progresser. C’est le plus important. Si on a tous la même motivation, qu’on met toutes les chances de notre côté en faisant une vraie préparation comme l’année dernière, je pense qu’on peut faire quelque chose.
« Vincent Collet est l’homme de la situation »
Quand tu vois l’Argentine et Manu Ginobili à ce niveau, est-ce que tu te dis que c’est possible pour toi d’être à Rio à 34 ans ?
Oui, oui, bien sûr. Moi je suis motivé pour repartir sur un cycle de quatre ans. J’ai toujours dit que Rio serait ma dernière compétition avec l’équipe de France. Ce sera la dernière fois que vous me verrez avec le maillot bleu. J’espère terminer en beauté à Rio et pour ça, il faut justement qu’on utilise cette expérience qu’on a eue à Londres. Parce qu’il y a ma génération, mais il y a aussi la génération de Nico (Batum) et il va encore y avoir d’autres joueurs qui vont arriver en équipe de France. Le mélange de tout ça pourra nous permettre, je l’espère, de ramener de Rio une médaille au basket français.
Pour ce nouveau cycle de quatre ans, c’est important de continuer avec Vincent Collet selon toi ?
Oui, c’est clair. On en a parlé avec l’équipe, on veut tous que Vincent continue car on pense que c’est l’homme de la situation. Moi j’ai vraiment envie de continuer avec un coach qui a vécu justement la défaite en finale (du championnat d’Europe 2011) et cette défaite-là car il a la même douleur que nous et aura aussi faim que nous pour aller chercher la victoire.
Propos recueillis à Londres par Romain Brunet