Deuxièmes de la conférence Est derrière les impressionnants Bucks, les Raptors étaient parfaitement en embuscade. Malgré le départ de leur meilleur joueur (Kawhi Leonard), mais aussi de Danny Green, et une litanie de blessures durant la saison, Toronto ne s’est pas cherché d’excuse et a continué à enchaîner les victoires.
La raison est à trouver sur le banc, en la personne de Nick Nurse. Le « head coach » des Raptors était effectivement un candidat très sérieux à la succession de Mike Budenholzer pour le titre d’entraîneur de l’année, tant il a réussi à maintenir le cap malgré de nombreuses avaries.
« Il y a toujours des ajustements à faire et c’est ma priorité : pas 100 mais 2 ou 3 »
En l’occurrence, le technicien de Toronto, et de l’équipe nationale canadienne, est revenu dans une séance de questions/réponses sur sa méthode et son approche du coaching. Tout d’abord, il faut bien se rendre compte que Nick Nurse a longtemps galéré.
Coach en Europe, et surtout en Angleterre, pendant 11 ans, il a mangé son pain noir longtemps, passant ensuite de longues années en D-League (de 2007 à 2013) avant d’intégrer le staff de Dwane Casey à Toronto. À son arrivée dans l’antichambre de la NBA, il a même carrément penser à jeter l’éponge. « Bien sûr. Après avoir été coach en Angleterre, on a commencé nos 16 premiers matchs avec 8 victoires et 8 défaites et je me demandais si j’étais vraiment bon pour ce job. Je suis rentré chez moi et j’ai écrit quatre autres trucs que je pensais que je pourrais faire. Et tout me semblait plutôt merdique, donc j’ai pensé qu’il valait mieux que j’apprenne à coacher ! »
Pour le coup, Nick Nurse a semble-t-il appris très vite ! Première saison en tant que « head coach » NBA et premier titre ! Après cinq ans à jouer les assistants, Nick Nurse a réussi le coup parfait avec Toronto, profitant de l’implosion imprévisible de Golden State.
« Gagner un titre NBA est évidemment le meilleur moment de ma carrière. C’était vraiment un sentiment à part de le faire pour la première fois au Canada avec Toronto. Mais c’était notre objectif depuis le premier jour et c’était bien de pouvoir l’accomplir. On était concentré sur notre jeu et notre préparation afin de produire le meilleur basket possible. On savait qu’il y aurait bien assez de temps pour célébrer une fois le travail terminé. Quand tout le monde a explosé, j’ai fait se rasseoir Nate [Bjorkgren], comme on le faisait avec l’Iowa Energy. On s’est assis et on a profité du moment ! Et j’imagine même ce que ça ferait d’en gagner un autre maintenant… »
Parmi les coachs qui sont le plus ouverts à opérer des changements tactiques en cours de match, Nick Nurse a encore progressé cette saison, avec l’expérience du titre derrière lui. Très souple dans son approche, avec beaucoup d’ajustements durant les matchs, il est attentif à ces détails qui peuvent tout changer.
« Il y a toujours des ajustements à faire et c’est ma priorité. Il n’y en a pas cent, mais deux ou trois. Quelles couvertures défensives pourrait-on changer ? Est-ce qu’il y a un duel sur lequel on veut ajuster un détail ? On montre des clips en attaque et en défense. Ça va vite. Mais c’est une question que j’entends souvent : est-ce difficile de gérer ces gars-là, avec leur ego ? Mais ils veulent juste être coachés. Ils veulent un bon plan, et ils veulent qu’on les mette en position de réussir. »
« Perturber le rythme de l’adversaire est une des clés de notre stratégie défensive »
En l’occurrence, Nick Nurse a rapidement compris que Fred VanVleet serait un élément fondamental si Toronto voulait réaliser l’upset lors des dernières Finals. Mais, il le reconnaît lui-même, cet ajustement tombait sous le sens : « Sa progression durant les playoffs a été extraordinaire parce qu’il n’avait pas de réussite au début et on avait vraiment besoin de son tir à 3-points. Il était le candidat idéal pour s’occuper de défendre sur Curry en boîte sur tout terrain. Il a rentré des tirs énormes dans le dernier quart du Game 6. »
Dans la même veine, Kyle Lowry a surgi au meilleur moment, avec son début de match au lance-flammes lors de ce dernier Game 6. « Cette série de 11 points pour commencer le match était incroyable. Mais je pouvais déjà sentir qu’il était prêt à tout donner dans les vestiaires avant le match. Il était calme mais très confiant. Je ne m’attendais pas à 11 points mais je m’attendais à ce qu’il attaque fort dès le début. »
Dans le même temps, Nick Nurse reconnaît que la préparation avant le Game 6 à Golden State était très pointilleuse et même autoritaire : « On avait une séance d’avant-match plutôt approfondie, et je dirai même intense le matin même. On avait aussi fait une grosse session vidéo parce qu’il y avait un paquet de trucs à corriger. J’ai un peu haussé le ton honnêtement mais une fois qu’on était à la salle, c’était bon. »
Pour l’instant dans l’incapacité de défendre leur titre cette saison, les Raptors auraient été très intéressants à suivre avec une équipe certes moins talentueuse mais plus cohérente et soudée que jamais. Défensivement, autour de leur totem catalan, Marc Gasol, la raquette canadienne n’aurait pas été conquise si facilement.
« En fin de compte, il faut essayer de perturber leur rythme. Les gars intelligents sont bons pour jouer en rythme et quand tu les prives d’un truc, ils trouvent en général un autre rythme rapidement. Il faut les forcer à faire ces changements rapidement. Perturber le rythme de l’adversaire est une des clés de notre stratégie défensive. »
Une autre clé que Nick Nurse maîtrise, surtout après une décennie outre-Manche, c’est la clé de sol. Musicien à ses heures perdues, l’entraîneur des Raptors peut pour le coup s’adonner à sa passion durant cet intermède forcé : « La chanson que je joue le plus au piano est Purple Rain, clairement. À la guitare, c’est Folsom Prison Blues de Johnny Cash et puis Signed, Sealed, Delivered [de Peter Frampton]. En ce moment, j’apprends Riders on the Storm des Doors au piano et cette intro est plutôt compliquée. Sinon, Malcolm Miller s’arrête parfois dans mon bureau pour jouer du piano, il est plutôt bon. »