Kawhi Leonard, le silence de l’agneau

« Certains gars sont affectés par les lumières, d’autres pas. On a rien fait de particulier avec lui pour le rendre comme il est maintenant ; il était comme ça quand il est arrivé chez nous. Pour tout vous dire, je ne l’ai jamais entendu parler. Je ne sais jamais ce qu’il pense. Il vient, il joue, il repart. »

Popovich l’affirme sans détour : Kawhi Leonard n’est pas un mec comme les autres. Il faut dire que celui qui fut sélectionné en 15e choix de la draft il y a maintenant deux ans (échangé contre George Hill aux Pacers) n’a pas eu un parcours des plus aisés… Orphelin à 17 ans après l’assassinat de son père, l’ancien ailier de San Diego State a été contraint de grandir plus vite que les jeunes de son âge.

 Humble, bosseur… et ce supplément d’âme !

Tranquillement sapé d’un jean et d’un sweat marqué de la virgule, avec pour seul apparat de luxe une ceinture Louis Vuitton, Kawhi Leonard est un jeune homme (21 ans seulement) posé en train de répondre patiemment aux questions nombreuses des journalistes du monde entier après ce match 3 dans lequel il a réussi à éteindre par sa défense le meilleur joueur du monde tout en cumulant 14 points, 12 rebonds et 4 interceptions.

Dans la plus pure tradition Spurs, Leonard conjugue humilité et travail à la perfection. Et coach Pop ne peut qu’apprécier…

« Il parle peu, il est humble, il veut devenir un grand joueur et il travaille beaucoup avant et après les entraînements. Donc ce qu’on voit dans les médias, c’est une partie de sa personnalité. Il est là pour jouer et c’est tout ! »

Le jour où son destin a basculé

Le destin de Kawhi Leonard a basculé le 19 janvier 2008 alors qu’il n’était encore qu’au lycée Martin Luther King de Riverside, en Californie. Son père, Mark Leonard, est tué par balles dans son entreprise de lavage de voitures, à Compton alors que le jeune Kawhi avait précisément un match contre Compton Dominguez (l’ancien lycée de Tyson Chandler, Brandon Jennings ou encore Tayshaun Prince et Cedric Ceballos) le lendemain. Sa mère, Kim Robertson, raconte :

« Il m’a dit : « Maman, je veux y aller et je veux jouer. » Donc on y est allé, il a joué et il a bien joué. Mais son équipe a perdu et là il a craqué. Je pense que le souvenir de ce moment-là est une force qui le motive à devenir meilleur et plus fort chaque jour. »

Bien placée pour le savoir puisqu’elle est sa colocatrice à San Antonio, la maman de Kawhi Leonard sait bien que son fiston est tombé au bon endroit pour gravir les échelons un à un au sein des Spurs. Et de fait, pour sa seconde saison dans la ligue, et après une cruelle désillusion l’an passé face au Thunder en finale de conférence, Leonard est désormais en finale NBA, à deux matches d’une première bague.

Au nom du père

Et même s’il aimerait que son paternel soit là pour l’encourager du bord du terrain, Kawhi a grandi d’autant plus vite qu’il est arrivé à surpasser cette tragédie.

« Je pense qu’il est enfin arrivé à surmonter ce qui lui est arrivé. C’est la réalité : « Mon père est mort, mais sa mémoire sera toujours avec moi. » Il va toujours penser à lui. Et quand il va accomplir quelque chose, il regardera vers le ciel et fera un geste pour son papa. Il a réussi à accepter cette réalité et il peut continuer à avancer, même s’ils étaient tous les deux très proches. Je sais qu’il adorerait que son père soit là pour le voir jouer » poursuit Kim Robertson.

Et quand on lui répète la phrase de Popovich selon laquelle il sera bientôt « le visage de la franchise », Kawhi balbutie dans un premier temps… mais garde la tête froide. Son histoire ne fait que commencer !

« C’est pour ça que je joue. Je veux devenir un grand joueur un jour. Je travaille très dur pour m’améliorer. Et si tout se passe bien, je pourrais peut-être devenir le visage… Non, je ne pense pas encore à ça. Je veux juste devenir meilleur en tant que joueur. Je fais confiance à l’équipe. Tout ce que les coachs me demandent de faire, je le ferai pour jouer comme il faut pour gagner. »