Aussi spectaculaire sur les terrains que rare en dehors, surtout depuis sa retraite, Shawn Kemp s’est récemment confié au blog Sonics Forever. Une interview fleuve de quasiment deux heures, durant laquelle le « Reignman » évoque de nombreux sujets, de sa jeunesse dans l’Indiana jusqu’à la fin de son aventure avec les Sonics en 1998 en passant par le Kentucky et la fameuse affaire des chaînes en or volées.
Il révèle notamment qu’il était tout proche d’atterrir chez les Lakers à la Draft 1989, comment il a vécu son raté à Kentucky ou encore ses regrets après les échecs répétés des Sonics en playoffs au début des années 1990. Il donne aussi sa version des faits sur la fin de son histoire à Seattle, juste après le sommet des Finales NBA 1996.
Le jeune prodige de l’Indiana
Comme LeBron James, Kobe Bryant ou Tracy McGrady après lui, Shawn Kemp est un de ces talents précoces qui a captivé l’imaginaire collectif. Gamin star dans l’Indiana, il a dû grandir plus vite que ses camarades de classe. Sans figure paternelle à la maison après le divorce de ses parents alors qu’il est à la maternelle, le jeune Shawn est un garçon réservé et presque maladivement timide.
À la maison, il est entouré de deux femmes : sa maman, Barbara, et sa grande soeur, Lisa. À vrai dire, Lisa est même le modèle du petit Shawn qui grandit dans son ombre à Elkhart, dans l’Indiana. À l’instar d’un Reggie Miller, éclipsé par sa soeur Cheryl qui récolte tous les lauriers, Shawn Kemp est d’abord le martyr de sa grande soeur.
« Ma soeur était très forte en sport. Elle jouait à tous les sports au lycée : basketball, volleyball, softball et athlétisme. » Avant le déclic… « Une fois que j’ai réussi à battre ma soeur en un-contre-un au basket, je n’avais plus peur de personne sur un terrain. La première fois que j’ai pu la battre, j’étais en troisième. Le mois suivant, mon école avait reçu un joueur des Pacers et les élèves l’ont mis au défi de me battre en un-contre-un. Je ne vais pas donner son nom pour lui éviter l’humiliation mais je l’ai battu 8 à 1. Comme quoi, la confiance y est pour beaucoup. J’étais un gamin qui ne manquait pas de confiance. »
Constamment renforcé dans son amour du jeu très tôt grâce à cette compétition avec sa grande soeur, le jeune Shawn passe ainsi un premier cap dans sa vie de basketteur, une fois conquis le titre de la famille Kemp. Mais pendant qu’il s’échine à battre sa soeur, il fréquente aussi assidûment le circuit AAU où il commence aussi à se construire une sérieuse réputation, ayant « plus ou moins joué aux quatre coins des Etats-Unis ». Il développe alors une relation avec Nike et Sonny Vaccaro : « Il m’a toujours donné de bons conseils et m’a offert sa supervision et son soutien. (…) C’est bien simple, pour me conseiller, il y avait Sonny Vaccaro et ma mère. Ma mère était ma plus grosse influence mais Sonny était là aussi et il a toujours eu de l’importance dans ma carrière. Il me connait depuis la cinquième. »
Connu aujourd’hui pour son partenariat fécond avec Reebok, Shawn Kemp rappelle toutefois que c’est bel et bien la marque au swoosh qui a accompagné son enfance. Plus encore, « sans Nike, il n’y aurait pas de Shawn Kemp ! J’ai grandi avec les tournois organisés par Nike. C’est Nike qui m’a permis de m’entraîner et de faire la bascule entre la côte Est et la côte Ouest. J’ai signé avec eux au début de ma carrière mais Michael [Jordan] et Charles [Barkley] avaient une clause dans leur contrat comme quoi il ne pouvait y avoir personne qui était payé plus qu’eux, donc je suis parti chez Reebok [rires]. »
Avant de devenir l’égérie de la marque britannique, avec Shaquille O’Neal et Allen Iverson un peu plus tard, Shawn Kemp était un fervent disciple de Nike, dont la Air Flight 89 avec le velcro, sa préférée. Comme tant de prodiges repérés très jeunes, il ne pouvait manquer de croiser la route de Sonny Vaccaro, le fameux découvreur de talents (inventeur du ABCD Camp) qui fera les beaux jours de Nike (en signant notamment Michael Jordan au terme d’une saga rocambolesque), puis Adidas et enfin Reebok.
Phénomène des catégories jeunes, Shawn Kemp ne passe pas inaperçu, surtout pas pour Scott Skiles, un autre local de l’étape. « Je viens de la même région en Indiana que Scott Skiles. J’ai joué beaucoup de basket en été avec Scottie, même s’il était cinq ans plus âgé que moi. Il venait me chercher et on allait jouer les ligues d’été », narre le Reignman. « Un moment important pour moi, c’était en quatrième je crois, avec Scott, quand j’ai joué avec Magic Johnson et des joueurs universitaires. Ces gars-là m’ont botté les fesses, j’avais la honte [rires]. Mais une fois passée la honte, il n’y a qu’une seule solution, et c’est de progresser. Scott Skiles et Magic Johnson se connaissent de Michigan State. Et par la suite, Magic et moi avons développé une amitié. »
La vision de Magic qui remonte la balle avec un jeune Shawn Kemp plus véloce que jamais va même devenir un thème récurrent dans son début de carrière. Mais on en reparlera…
Le paria du Kentucky
Entre temps, Shawn Kemp poursuit et termine, non sans heurts, sa scolarité au lycée d’Elkhart. Aux vicieux cris des fans adverses : « SAT, SAT ! » en référence à l’examen final du lycée qu’avait raté Shawn Kemp, les fans des Minutemen rétorquaient : « NBA, NBA ! ».
Publiquement moqué, Shawn Kemp est pourtant tout aussi convoité. Il est même tiraillé de toutes parts avec une horde de scouts et d’envoyés spéciaux de grandes universités qui viennent lui promettre monts et merveilles. Évidemment attendu à l’université locale d’Indiana, il prendra tout le monde à contrepied en finissant par choisir Kentucky. Ça lui a valu une bonne soufflante de Bobby Knight !
« J’avais signé avec Kentucky. Et le soir-même, j’ai reçu un coup de fil de Bobby Knight. Il m’a réservé une très longue discussion. Personnelle [rires]. Mais aussi pour me prévenir que ça allait être une route difficile. J’ai fait toutes les catégories de jeunes et j’étais devenu assez connu dans l’Etat d’Indiana et tout le monde voulait me voir jouer pour l’Université d’Indiana. Mais j’ai choisi Kentucky, tout simplement parce qu’ils ont fait plus d’efforts pour me recruter. Dwane Casey est venu habiter à côté quand j’étais en première année de lycée, donc on a développé une relation très proche avec les années [rires]. »
Mais l’option UNLV était elle aussi tout proche d’aboutir, ainsi que le scout NBA, Mark Warkentien, nous l’avait confié. Alors assistant du légendaire Jerry Tarkanian à Vegas, il faisait justement partie des scouts qui battaient régulièrement la campagne de l’Indiana pour suivre les exploits du jeune Kemp. Mais il n’était pas le seul…
« On pensait être en très bonne position pour recruter Shawn, et je peux vous dire que quand on a vu Dwane [Casey] débarquer ce jour-là dans la salle, on s’est dit : « Oh non, Kentucky est dans la place, Kentucky est au courant aussi », nous racontait Mark Warkentien avant d’ajouter, encore marqué. « Ça m’a vraiment anéanti de ne pas pouvoir le recruter car il aurait joué avec Larry Johnson, Stacey Augmon à UNLV. Une équipe qui a disputé la finale NCAA ! Shawn aurait pu jouer avec cette équipe-là, ça aurait été carrément dingue ! »
Ayant non seulement raté la possibilité de jouer le titre avec les Runnin’ Rebels, Shawn Kemp n’aura pas non plus l’occasion de porter la tunique de Kentucky, en tout cas, officiellement. Le talent précoce d’Elkhart en a décidé autrement : il ne veut pas attendre une année freshman à peu, voire ne pas, jouer. Il va passer pro sans passer par la case NCAA…
La fameuse affaire du collier mis en gage viendra ensuite, une fois sa décision annoncée à Eddie Sutton, le coach de Kentucky… « Quand cette histoire est sortie, j’étais un jeune homme, j’avais 18 ans et j’étais censé être la meilleure chose qui arrive au Kentucky depuis le pain en tranches. Il y a eu une accumulation de choses. Coach Casey a déménagé à Elkhart quand j’étais freshman pour me recruter. Pendant quatre ans, il était là à temps partiel pour me suivre. Quand tu vas visiter une université, ils font beaucoup d’efforts. Et je leur ai dit que je pensais à passer pro, et ce n’était pas bon ! Pas bon du tout… »
Suivi de près par Dwane Casey, Shawn Kemp donne sa préférence à Kentucky, mais sans jamais vraiment se rendre compte dans quoi il s’engage. « L’université comptait vraiment sur moi, ils avaient tout préparé pendant des années. Mon lycée avait joué plusieurs matchs là-bas, j’avais fait plusieurs camps là-bas, j’avais souvent été sur leur campus. J’étais inscrit chez eux mais avant même de jouer le premier match, je leur ai dit que je voulais passer pro. A posteriori, je me dis que j’aurais probablement pu faire autrement mais c’est comme ça que je l’ai fait. »
C’est là son erreur. Une erreur de jeunesse, compréhensible quand on repense qu’il n’est alors qu’un gamin sollicité à l’extrême. Avec la possibilité bien réelle de pouvoir passer pro au lieu de faire le jeu de la NCAA.
« L’université était énervée. Quand quelqu’un a ses sentiments froissés, ça peut rapidement partir en vrille. L’histoire du collier n’est qu’une histoire parmi d’autres, il y en a eu d’autres qui sont sorties à ce moment-là. L’université essayait simplement de me faire rester. En l’occurrence, je n’ai jamais été contacté par la police ou quoi que ce soit dans cette histoire. C’est bien moi qui ai mis la chaîne en gage mais je peux vous dire que j’ai payé moi-même pour aller à l’Université de Kentucky. J’étais dans une bonne situation, j’avais une nouvelle voiture et ma famille se portait bien financièrement, je n’avais besoin de rien. Kentucky ne m’a pas donné d’argent. Je n’avais pas de bourse, j’ai payé moi-même mon année freshman. De plus, à l’époque, les freshmen ne jouaient pas ou très peu, ils se préparaient pour jouer en deuxième année en étant plus fort, plus avancé. Mon année freshman à Kentucky a été mise en probation donc j’avais peur d’aller sur le terrain. Quand ils ont annoncé ces sanctions, j’ai pris ma décision de partir. »
Sean Sutton, le fils du coach de l’époque, et propriétaire des chaînes en or volées, a depuis exprimé ses regrets d’avoir porté plainte. Cette plainte ayant entraîné les sanctions évoquées par Sahwn Kemp. Mais il s’agit alors de trouver un plan B car l’étudiant Kemp a encore du pain sur la planche avant de pouvoir satisfaire aux exigences de la Draft NBA.
Malgré sa décision plus que contrariante pour Kentucky, Coach Casey n’a pas laissé tomber son protégé. « Coach Casey a toujours été super avec moi durant toutes ces années. Il m’a tout de même aidé par la suite à aller à Trinity Valley. C’est lui qui a appelé le coach de Trinity Valley car il me manquait encore un semestre de crédits avant de pouvoir être autorisé à aller en NBA. Et même après ma décision de devenir pro, ils m’ont dit que je pouvais revenir à l’université pour finir mon diplôme si c’est ça que je voulais. »
« La raison pour laquelle j’ai été si silencieux à l’époque, c’est que je ne voulais pas qu’un de mes collègues ou l’université elle-même soit encore plus embêtés par un commentaire mal placé. Je ne crois pas que l’université ait dit que c’était moi qui avait volé la chaîne, je pense que ce sont quelques personnes qui l’ont laissé entendre afin de faire pression sur moi pour que je reste. Quand j’étais dans le bureau d’Eddie Sutton et que je lui ai dit que je voulais passer pro, c’était un cauchemar pour lui. Mais j’étais catégorique et sérieux quand j’ai dit ça. Quand tu es jeune et que tu t’imagines devenir pro, tu y vas direct et tu y vas à fond. Tu veux y arriver. Les gens te disent d’être patient, d’attendre une année, mais en tant que jeune joueur, tu ne penses pas comme ça, tu veux simplement atteindre les plus grands objectifs que tu te fixes dans la vie. »
Blanchi aux yeux du public trente ans plus tard seulement, en avril 2020 avec l’article de The Athletic, Shawn Kemp l’était déjà sur le circuit NBA. Les franchises qui le suivaient de près s’étaient elle aussi renseignées en amont. « De ce que je sais, les équipes NBA qui me voulaient m’ont dit qu’ils avaient fait leur propre enquête et leur conclusion, c’est que je n’avais rien fait de mal. Tout était bon pour elles et c’est ça qui comptait le plus pour moi. Je n’ai rien dit à l’époque, surtout parce que j’avais encore des amis qui jouaient à l’université et je ne voulais pas qu’ils aient à traverser des difficultés à cause de moi. »
L’apprenti chez les Lakers
Envoyé dans le Texas à Trinity Valley, un Community College de seconde (voire troisième) zone, Shawn Kemp y fera simplement un semestre sans disputer le moindre match. Un joli pied de nez à la NCAA mais surtout un choix personnel quand le « paria du Kentucky » avait en fait accepté la cordiale invitation d’une franchise NBA. Qui plus est, qui s’appellent les Lakers.
« Toute les équipes me suivaient. Je suis tombé à la 17e place [à la Draft] parce que je n’avais fait aucun essai. Pour montrer quelles franchises NBA tu vises, tu dois te rendre disponible avant la Draft. Quand tu n’es pas accessible avant la Draft, tu vas logiquement descendre dans les choix. La plupart des fans à Seattle ne s’en rendent pas compte mais à l’époque, j’allais devenir un Laker. Je vivais déjà à Los Angeles et je me préparais à jouer avec les Lakers. Je m’entraînais avec Magic Johnson à UCLA, et puis un jour, un gars vient me voir et me demande si je connais Seattle, Washington. Et je lui ai demandé, quel quartier de D.C. est-ce que c’est ? Non, pas ce Washington, l’autre. »
« C’était le fils de Barry Ackerley [le propriétaire des Sonics], il avait réussi à rentrer dans le gymnase et il avait regardé certains de nos matchs d’entraînement. Il me dit que son père serait intéressé pour avoir une entrevue avec moi. On est à une dizaine de jours de la Draft, et avant ça, les Lakers m’avaient caché pendant un mois à peu près. Quand il m’a demandé, je n’étais pas vraiment sûr de vouloir y aller. Mais dans le même temps, les Lakers disputaient les Finales NBA face aux Pistons, série qu’ils vont remporter. Je commençais à me dire que les Lakers ne vont peut-être pas vouloir d’un gars qui sort tout juste du lycée [rires]. Donc, j’ai accepté son offre et je suis parti pour le Nord-Ouest à Seattle. »
Après les tribulations endurées entre l’Indiana et le Texas, en passant par le Kentucky, Shawn Kemp se refaisait donc gentiment la cerise sur le camps d’UCLA, à attraper les passes de Magic et affronter certaines pointures des Lakers. « Je ne travaillais pas avec [Pat Riley et Jerry West], mais avec l’agent de Magic. J’étais en bons termes avec eux et même avec le père de Magic. Pour moi, c’était une période assez incroyable. De pouvoir entrer dans les coulisses et voir toute l’organisation… À l’époque, je venais de passer par l’Université de Kentucky, et Trinity Valley et tout à coup, je me retrouvais à voir comment les Lakers fonctionnent alors qu’ils sont en route vers le titre NBA. »
« Je voyais un peu comment ils fonctionnaient en interne, quelles étaient les procédures à suivre, les jours de match, les jours sans match, ce genre de choses. J’ai discuté avec eux de la possibilité d’aller à Seattle et ils ont essayé de m’en dissuader mais je n’ai rien voulu entendre. »
Shawn Kemp prendra bien l’avion avec le fiston Ackerley pour une nouvelle visite en bonne et due forme. Après les campus universitaires, le prospect star de 19 ans change cette fois de catégorie. « Je suis arrivé à Seattle en début d’après-midi pour rencontrer coach Bickerstaff, le GM Bob Whitsitt. On a fait un tour de la ville, et on s’est rendu au gymnase. J’ai joué dans un match de Pro Am sur le campus de l’Université de Seattle. Ils avaient déjà eu des échos sur moi et ils voulaient me voir jouer. Je leur ai demandé combien de temps ils voulaient que je joue et ils m’ont simplement dit : montre-nous ce que tu sais faire. J’ai joué une mi-temps et je crois que j’ai fini avec 47 points ou quelque chose comme ça. A ce moment-là, c’était gravé dans le marbre pour moi. Je me sentais bien avec Bob, j’étais à l’aise avec Coach Bickerstaff. Je me suis si bien intégré avec les gars de l’équipe ici que je ne suis pas rentré à LA pour récupérer mes affaires. Je suis resté quelques jours à Seattle et j’ai pris un vol pour LA juste avant la Draft. Pour moi, c’était pour ainsi dire acquis que j’allais finir à Seattle. »
La star en herbe des Sonics
Et pour cause, choisi à la 17e place, juste derrière Dana Barros, Shawn Kemp débarque donc dans la Grande Ligue sans avoir joué le moindre match universitaire. Directement du lycée en termes basket… Un grand écart pas facile à digérer, mais que l’ambitieux Kemp s’était mis au défi de relever.
« Personne ne te surveille. Tu es un jeune gars et tu affrontes ces adultes tous les jours à l’entraînement, et personne ne va te faire de fleurs. Personne va venir te réveiller le matin, ou s’assurer que tu vas faire des séances supplémentaires de shooting, tout ça est pour toi, ça doit venir de toi. J’ai été chanceux de pouvoir être drafté par Seattle qui avait une équipe très talentueuse. Le plus beau jour de ta vie, c’est quand tu es drafté. Mais quand tu es drafté, tu regardes la liste de joueurs et il y a douze joueurs dans l’effectif, et merde, je suis le treizième [rires] ! Donc c’est là que tu te rends compte que tu as du pain sur la planche, et pas qu’un peu ! Mais venant du Midwest, j’ai fait ce qu’on fait, j’ai bossé comme un forcené. J’ai bossé jusqu’à ce que j’obtienne ce que je cherchais. »
Rookie utilisé avec parcimonie, Kemp doit se contenter de minutes dans les fins de match sans intérêt. Le « Man Child » trouve alors sa motivation dans les petites choses. Laissé pour compte au bout du banc, Kemp se fait remarquer des fans par son jeu survitaminé et spectaculaire.
« Absolument, tout ça avait démarré durant ma saison rookie. J’étais souvent sur le banc et il y avait des soirées à 10 ou 15 dollars. Tu avais ton ticket et une bière Rainier [une des bières locales] pour 15 dollars, mais bon, c’était les sièges qui étaient tout en haut. Quand je rentrais sur le terrain en fin de match, je pointais toujours vers ces fans tout en haut dans les tribunes, comme pour dire, merci d’être resté, je vais vous donner quelque chose à voir. Pour moi, ces fans du vieux Coliseum qui étaient assis tout en haut dans les sièges à bon marché étaient une véritable inspiration. Sans rire. Ces fans me soutenaient vraiment. Durant ma première année en 1989, je ne jouais pas beaucoup et quand j’entrais en jeu, généralement en quatrième quart, je voulais leur donner quelques bons dunks. Je tiens à les remercier car ce n’est jamais facile d’entrer en jeu en fin de match, souvent quand le match est plié. C’est difficile de trouver son rythme mais ces fans me donnaient la motivation de proposer un truc différent. Quand tu as 19 ans, c’est ce genre de petites choses qui font une grande différence. »
Débutant à 6 points et 4 rebonds de moyenne, Shawn Kemp donne cependant suffisamment de grain à moudre au « braintrust » des Sonics qui vont construire autour de lui, et de ce meneur d’Oregon State, Gary Payton drafté un an plus tard, en 1990. Les Sonics sont sur le point de devenir Super, une vague de fraîcheur vert et jaune va déferler sur le Nord-Ouest.
« Les choses ont changé rapidement après l’arrivée de Gary. Avant ça, Dale Ellis et Xavier McDaniel étaient deux joueurs très importants de l’équipe mais il y avait un mouvement de jeunesse. Dale a connu quelques soucis et c’était devenu plus facile pour l’équipe de s’en débarrasser. Et pour X-Man, c’est ma progression qui a fait qu’à un moment donné, ils ont dû décider entre X-Man et Derrick McKey. Ils ont fini par se séparer de X-Man, ce qui a fait mal. Car les gens doivent savoir que X-Man était le gars le plus cool de la planète. C’était le pire gars du monde si tu veux jouer face à lui mais le meilleur s’il est de ton côté. »
Très proche de Xavier McDaniel, Kemp va cependant pousser son copain vers la sortie à Seattle. Sa progression rend le X-Man surnuméraire sur les poste d’ailier fort. Le jeune intérieur apprend alors une première fois que la NBA est avant tout un business. « Je dois bien avouer qu’au début, ce n’était pas facile car il voyait mon développement et il s’est senti menacé. Il ne m’a pas facilité la tâche et on s’est battu pendant des jours et des jours. C’était de la pure baston chaque jour à l’entraînement, on ne s’entendait pas bien. Mais au fur et à mesure, ça s’est arrangé et si on me demande le nom du joueur qui m’a le plus aidé dans toute ma carrière, ce sera X-Man. Et de loin ! »
« Pour ce qui est de l’aspect physique du jeu, les appuis et la connaissance de ton adversaire direct. C’était incroyable pour moi de voir comment il connaissait si bien ses adversaires. Il était très intelligent et voyait les choses se développer avant qu’elles se réalisent. Je le suivais partout parce que j’apprenais tellement à ses côtés. Je ne suis pas sûr qu’il le sache encore aujourd’hui mais j’étais derrière lui quand il faisait des interviews pour voir comment il réagissait et quelles étaient ses réponses. J’essayais de relever le plus de petits détails possibles. Sur le terrain par exemple, je suivais son regard pour voir ce qu’il observait et ses lectures de jeu. Je regardais aussi ses cahiers de notes dans les vestiaires. C’est juste malheureux que l’un d’entre nous ait dû partir. »
Ainsi va la vie en NBA… McDaniel échangé à Phoenix contre Eddie Johnson, Kemp devient le titulaire indiscutable au poste 4 avec Derrick McKey qui se décale en 3 pour former une « frontcourt » de très grande taille à Seattle. Le poste de meneur ne revient pas encore à Gary Payton, mais le rookie à la grande gueule devient rapidement le nouveau complice de Kemp chez les Sonics. « C’était naturel [avec Payton], mais la vérité, c’est qu’on se trouvait si facilement sur le terrain parce qu’on était amis hors des terrains. On traînait tout le temps ensemble, jour et nuit. Je peux vous le dire maintenant, juste avant ce podcast, on discutait encore par textos. On est proches comme ça, encore aujourd’hui [rires] ! »
Kemp et Payton, et dans une moindre mesure Dana Barros, sont alors la section avenir de l’équipe des Sonics. Dans une équipe de vétérans, ce jeune trio doit apporter son énergie. Pour Kemp et Payton, l’accent est mis sur la défense, avec un système qui peut parfois faire monter la pression sur ses adversaires en tout terrain.
« La raison pour laquelle on a excellé sur le terrain, c’est par notre défense. Le grand public ne s’en rend pas bien compte : ce n’était pas les lobs ou quoi que ce soit, c’était d’abord la défense. On était les deux plus jeunes gars de l’équipe et on devait apporter cet effort en défense. J’étais le gars qu’on plaçait sur le porteur de ballon, je devais mettre la pression sur le meneur adverse et Gary était derrière moi à me hurler des instructions pour qu’il puisse faire l’interception. C’était vraiment un partenariat dans le sens où on voulait tous les deux la même chose. On se poussait mutuellement jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien à pousser. Il y avait des jours où on se gueulait l’un sur l’autre et il y a eu des articles qui racontent qu’on se gueulait dessus, mais on cherchait simplement à se pousser l’un l’autre. On essayait de trouver ce qui pouvait marcher et, une fois sur le terrain, tout revenait à la normale. Il ne s’agissait nullement d’un manque de respect mais plutôt de savoir comment bien communiquer. C’était super de jouer avec lui. Honnêtement, le basket ne me manque plus trop maintenant, mais jouer avec Gary Payton me manque. »
Se rendant de plus en plus indissociables sur les planches, Payton et Kemp sont tout aussi inséparables en dehors. Comme le dit le « Reignman », ce n’est pas ailleurs qu’il faut trouver la raison de leur succès. « On sortait le soir, on allait jouer au billard et on discutait pendant des heures à raconter des conneries. Et une fois, je lui ai dit en rigolant : écoute, Gary, quand on est sur le terrain, envoie la balle dans la zone entre la planche et le cercle et j’irai la chercher. Je ne pensais pas qu’il allait vraiment ramener ça sur le terrain et le mettre en pratique. Mais si, il a commencé à envoyer des passes de la main gauche, en déséquilibre, des passes super hautes au plafond, c’était fou. Je peux encore le sentir dans mon dos à ce jour… »
Le culte du dunk
Si Kemp ressent encore des douleurs dans le dos aujourd’hui après avoir dû tant se contorsionner pour récupérer les passes de son acolyte, on peut tout aussi assurément affirmer qu’il a offert cette sensation à plus d’un fan de NBA durant les années 90. Machine à highlights avant l’apparition des réseaux sociaux, Kemp vit actuellement une sorte de « revival » avec plusieurs comptes Twitter qui dépoussièrent avec joie des images d’archives de ses nombreux dunks et alley oops.
Décomplexé par l’arrivée de Payton qui va déployer son potentiel aérien avec de nombreuses passes que lui seul osera lancer, Kemp se souvient également d’un autre moment important dans sa jeune carrière. Hasard du destin (ou est-ce vraiment une coïncidence), c’était au Garden de New York, pour sa première, histoire de bien marquer le coup.
« Quand je suis arrivé en NBA, le dunk n’était pas quelque chose que je cherchais à faire en particulier. Mais il y a eu cette baston à New York. X-Man et Charles Oakley se sont battus et c’est parti jusqu’au vingtième rang dans les tribunes. J’étais comme un gamin dans un magasin de bonbons, j’adorais ça. J’avais 19 ans et je regardais ça avec des grands yeux. Ces gars-là s’envoyaient des coups de poing et ils se sont tous les deux fait expulser. Avant de se faire reconduire, on est regroupé devant notre banc et X-Man nous gueule dessus : hey, fais quelque chose toi ! On se regarde tous et on se demande à qui il parle. Et il me regarde droit dans les yeux : tu es le seul dans l’équipe qui sois suffisamment dur pour punir ces gars de New York. »
« Le coach me fait entrer en jeu, c’était ma première au Garden. Dana Barros me dit : cours le plus vite possible, je vais te filer le ballon, retourne-toi et dunke. Comme tu fais à l’entraînement. Et je réponds, je ne suis pas sûr que ce soit le moment pour ça. Il me répond que si, et pour cause, ça a marché [rires] ! Ce premier dunk, c’était mon premier dunk important en NBA, c’était à New York. »
Rapidement repéré par les instances de la Ligue, Kemp est convié au concours de dunks dès sa première saison. Il y participera à quatre reprises durant ces cinq premières campagnes pros… sans aucun trophée à ranger dans l’armoire ! Une aberration dont Kemp préfère encore rigoler, trente ans après les (mé)faits.
« Je me suis fait voler. Je peux le dire maintenant : on m’a volé deux trophées. J’ai perdu deux concours face à des gars qui avaient les yeux bandés mais qui voyaient quand même à travers [rires] ! Je savais que Dee Brown pouvait voir à travers son bandeau parce qu’avant un de ses dunks, quelqu’un l’a appelé et lui a lancé le ballon et il l’a récupéré en l’air. Si tu as les yeux bandés et qu’on t’envoie un ballon, comment peux-tu le récupérer ? De manière évidente, il pouvait voir à travers ! Mais c’était un bon accessoire et ça a marché. Et rebelote pour Cedric Ceballos [en 1992]. Il a fait la même chose à Phoenix, il s’est bandé les yeux et a fait deux petits dunks et il a reçu un cinquante pour ça. Et lui non plus n’aurait pas dû gagner. Il faut de nouveau compter les votes pour celui-là aussi [rires]. Mais bon, c’était amusant. »
« Pour moi, le truc était d’arracher le cercle, c’était mon seul et unique plan »
A part pour une blessure qui l’a empêché de participer en 1993, Kemp revenait effectivement à la charge chaque année pour le concours de dunks. Malgré ses revers répétés et son étoile en pleine ascension dans le ciel NBA, Kemp ne refusait pas les invitations. Une autre époque quand on voit désormais les plateaux sans relief des concours de dunks récents…
« J’ai bien aimé participer à ces concours de dunks car à l’époque, les gros joueurs n’avaient pas peur de faire ces concours. Par la suite, les joueurs les plus populaires ont arrêté de le faire. En tant que jeune joueur, c’est pourtant une occasion idéale de se faire connaître dans le monde entier, en faisant ce que peu d’athlètes ont la chance de faire. Pour moi, c’était un truc dont il fallait que je tire avantage. Je voulais utiliser ce concours à mon avantage. Ce n’était pas vraiment un truc auquel j’avais pensé, ce n’était clairement pas un de mes rêves mais c’était une excellente manière pour moi de me faire connaître à l’internationale. Je m’y suis inscrit [en 1990], je crois, deux semaines avant. Et je l’ai fait, simplement parce que ma mère m’a convaincu de le faire. Pour moi, le dunk n’était pas ce pour quoi je voulais être connu ; je voulais être reconnu comme un joueur capable d’être bon dans tous les aspects du jeu. »
Dunkeur puissant et félin, Kemp aurait sans aucun doute mérité mieux après quatre participations au concours de dunks. Mais dans le même temps, le « power » de Seattle a manqué d’inspiration. De son propre aveu, il ne préparait pas vraiment ces concours. Il y allait avec un seul mot d’ordre : tout arracher !
« Je n’ai jamais répété mes dunks à l’avance, c’était complètement improvisé. J’étais très confiant en moi et je pensais toujours que je pouvais réaliser un truc que personne d’autre ne pouvait faire. Mes dunks sont assez simples au final, vous les avez vus ! Pour moi, le truc était d’arracher le cercle, c’était mon seul et unique plan [rires]. Je me fichais même de gagner en quelque sorte, je voulais montrer à tout le monde qui était le dunkeur le plus puissant en NBA. C’était mon objectif et Bob [Whitsitt] avait raison en somme, j’étais bien un mélange de Charles Barkley et Dominique Wilkins. Je voulais arracher le cercle et tout le reste est parti de là. Ma mentalité, c’était d’arracher le cercle. De donner à tout le monde une raison de discuter après le match à la maison. »
C’est avec cette idée fixe que Kemp a terrorisé plus d’un de ses adversaires durant les années 1990. Que ce soit au vieux Coliseum, puis au Tacoma Dome et enfin à la Key Arena, il ne faisait pas bon trainer dans le couloir aérien quand le « Reignman » prenait ses appuis…
Après le dunk initial à Gotham, Kemp a ensuite ajouté à sa légende de dunkeur fou face aux Warriors durant le premier tour des playoffs 1992. Il y a d’abord eu un énorme dunk sur la tête de Chris Gatling (qui venait de contrer Nate McMillan) dans une féroce bataille dans la peinture : « Vous savez quoi… Vous pouvez regarder beaucoup de basket mais rarement vous allez trouver un gars qui se fait dunker dessus qui se retourne pour saluer le dunkeur. J’ai apprécié ça, merci Chris Gatling ! »
Il y aura également le alley oop de la victoire au match 3, avec un petit coup de pouce de Gary Payton, un poil inconscient au moment de lancer cette passe longue à haut risque. « La longue passe lobée de la mi-terrain, je ne sais pas quelle mouche l’a piqué mais c’était une superbe passe. Cette passe a bien failli faire sauter le plafond du Coliseum ce soir-là. Cette action a donné lieu à la réaction du public la plus bruyante que j’ai jamais connue dans ma carrière.
Kemp mettra définitivement le feu aux poudres au match 4. Le coup de grâce intervient face à Alton Lister, avec lequel Kemp avait déjà des antécédents, pour le fameux « Lister Blister ». « Alton jouait très physique avec moi et disons qu’il y avait pas mal d’intimidation dans la série, notamment à Oakland avec le public. Je me disais : attendez un peu qu’on revienne à Seattle. C’était une de ces actions où on faisait basculer le ballon d’une aile à l’autre et je l’ai attrapé pile au bon moment sous le cercle. C’était parfait, vraiment parfait. On n’aurait pas pu faire mieux si on l’avait dessiné. »
« Je voulais tellement le punir pour certains trucs qu’il m’avait fait subir. Un truc dont on ne parle pas assez, ce sont les gars qui peuvent réussir à garder leur sang-froid sur le terrain. Souvent, on veut que les joueurs soient virils mais il faut également être capable de gérer ses émotions. Ce moment-là en fait partie pour moi car j’ai laissé le jeu venir à moi et j’ai choisi le bon moment pour punir quelqu’un comme ça. Une action vaut mille mots. [Je l’ai pointé des doigts] car j’avais beaucoup de frustration emmagasinée [rires]. J’avais un dicton pour les intérieurs adverses : si tu commets des fautes trop physiques sur moi, je vais te mettre sur un poster [rires] ! »
Les occasions manquées
Equipe en plein essor au début des années 1990, Seattle connaît un véritable « Sonic Boom« . 41 victoires en 1990-91, 47 la saison suivante, 55 ensuite et même 63 en 1993-94, les Sonics deviennent une place forte de la conférence Ouest. Mieux, Seattle devient synonyme de défaite pour ses adversaires en déplacement.
Le bilan de victoires à domicile est effectivement assez hallucinant sur la période. Si l’on se tient aux cinq saisons de 1992 à 1997, ça fait 34 victoires de moyenne (sur 41 possibles). Même déplacé au Tacoma Dome en 94-95, les Sonics récoltent 32 succès pour 9 défaites. Le summum est même atteint au retour à la Key Arena l’année suivante, en 95-96, avec 3 défaites seulement en 41 matchs à la maison !
Dans le même temps, de 15 points et 8 rebonds de moyenne, Kemp progresse en miroir de son équipe avec plus de 18 points et 11 rebonds de moyenne en 94. De quoi viser le titre, d’autant plus que Michael Jordan est alors à la poursuite de son rêve de baseball.
« En 1993-94, quand Michael a pris sa première retraite, je pense qu’on avait la meilleure équipe. Mais on avait aussi l’équipe la plus populaire de la ligue. On revient souvent sur la saison 1996 mais avant ça, il y a eu deux saisons remportées par les Rockets et les gens ont tendance à oublier que durant ces saisons-là, on n’a dû perdre un match ou deux face à Houston. On devait être 11-1 face à eux ou quelque chose comme ça. On les battait régulièrement et je pense qu’on peut le dire a posteriori : on a été trop confiant. On était trop confiant du fait que Michael avait pris sa retraite et du fait que les Rockets étaient la meilleure équipe de la conférence et qu’on savait comment les battre. Et c’est comme ça que ce genre de choses arrivent… »
Finalistes de conférence en 1993, battus sur le fil par les Suns de Charles Barkley au match 7, les Sonics se retrouvent face aux Nuggets au premier tour en 1994. Un craquage en règles pour Seattle qui s’écrase sur le mur Mutombo après avoir pourtant mené 2-0 avec l’avantage du terrain…
« Je n’en fais pas de cauchemars, mais j’ai encore beaucoup de rage en moi par rapport à ça. Quand je vois Mutombo qui remue son doigt, ça me tue. Ça me tue parce que ça me ramène à cette énorme opportunité qu’on avait devant nous et qu’on a laissé filer. Il y a avait des dysfonctionnement à l’intérieur de l’équipe, on était l’équipe la plus populaire à l’époque, clairement à Seattle mais même aussi dans la Ligue et certains gars à l’époque ne se sentaient plus pisser. On avait grandi en partageant le ballon, les meilleures équipes sont celles qui partagent le cuir. Pour rencontrer le succès, il faut continuer à passer le ballon, le fameux dicton « il n’y a pas de je dans l’équipe ». Cette année-là, on a commencé à avoir des difficultés avec certains gars qui pensaient plus à eux qu’à l’équipe. Ça a fait effet boule de neige : quand un gars commence à jouer perso, les autres ont tendance à faire de même. Tout revient à l’esprit d’équipe et d’avoir des bons gars dans l’effectif. A ce compte-là d’ailleurs, le premier joueur est tout aussi important que le douzième car ce dernier peut ruiner l’esprit d’équipe s’il est individualiste. »
A la suite de cet échec retentissant, les Sonics sont évidemment secoués. En coulisses, ils préparent même un coup fumant : un transfert de Kemp à Chicago, contre Scottie Pippen. « J’étais à Chicago à ce moment-là, pour les entraînements de la Dream Team 2. On était stationné à Chicago pendant trois semaines, avec trois entraînements par jour. Un matin, je me réveille et je vois que j’ai été échangé chez les Bulls. Quelques secondes plus tard, mon téléphone sonne et on me dit que je viens d’être échangé. Je réponds que ce n’est pas possible, ça ne peut pas être vrai. Donc j’appelle les Ackerley et [rires] il me répond qu’effectivement, ils sont en train d’essayer de m’échanger mais il ne sait pas si ça va être possible car il y a des fans qui sont déjà au Coliseum et qui essayent de le brûler ! Je pense qu’on va devoir annuler et je lui ai confirmé : oui, je ne veux pas jouer pour Chicago. Et ça s’est fait aussi rapidement que ça. Les fans étaient prêts à se révolter, ils avaient déjà contacté la station de radio et ils ont fait capoter l’échange. »
Epargné grâce au massif soutien populaire des fans de Seattle, Kemp sauve sa tête chez les Sonics, et rentre à la maison avec une médaille d’or mondiale autour du cou. Mais une nouvelle part importante de sa naïveté s’en est allée… « En tant que jeune joueur, ça peut être difficile à accepter mais j’avais une bonne compréhension de la situation. Je ne m’y attendais pas à ce moment-là, mais ça m’a clairement réveillé et attiré mon attention. A vrai dire, j’étais prêt à être échangé, mais pas chez les Bulls. Je voulais jouer contre Jordan, pas avec lui ! J’ai toujours voulu affronter les meilleurs, pas jouer avec eux. »
« [Jordan] me l’a rappelé à plusieurs reprises [rires], combien de bagues j’aurais pu avoir. J’y ai pensé, c’est clair, car j’aurais pu avoir deux bagues pour sûr. J’aurais pu jouer avec Michael. Mon jeu était adapté à n’importe qui dans le monde. Je le dis avec assurance car je suis un joueur altruiste. »
De retour à l’action en 1994-95, Kemp continue sa progression entamée depuis son arrivée en NBA. Pour la sixième année consécutive, l’intérieur des Sonics augmente sa production statistique et son équipe joue de nouveau les premiers rôles. Mais il y a un hic !
Le Coliseum en travaux, les Sonics doivent s’exiler au Tacoma Dome dans la banlieue sud de Seattle. Ils perdent pour ainsi dire leur avantage du terrain dans cette salle loin d’être aménagée pour le basket. « C’était difficile. Honnêtement, c’est la pire salle dans laquelle j’ai joué durant toute ma carrière. Jouer dans la salle de Tacoma, c’était comme jouer dans une usine désaffectée, il faisait froid. Les fans étaient bons mais la salle ne l’était pas du tout ! »
En plus de ce souci de taille « à domicile », les Sonics continuaient de jouer un peu trop aux apprentis chimistes avec leur effectif, la marque de fabrique de « Trader Bob« . « A l’époque, on progressait chaque saison. Chaque saison, on montrait qu’on était une bonne équipe mais on faisait beaucoup de changements dans l’effectif. Cette année-là, quand on jouait à Tacoma, on a récupéré Kendall Gill, un bon joueur et un bon ami. Il y avait toujours du changement, et on en faisait trop honnêtement. Il nous a fallu la moitié de la saison pour enfin nous sentir à l’aise collectivement cette saison et je pense que ça nous a vraiment fait du mal. C’est l’année où les Lakers nous ont battus en playoffs [au premier tour]. »
Après les Nuggets en 94, les Sonics échouent de fait au premier tour face aux Lakers. Ce second camouflet de suite en playoffs écorne définitivement l’image de la franchise en pleine expansion. En interne, les Sonics traversent effectivement plusieurs tempêtes, avec Kendall Gill notamment. Après deux crashs en playoffs, Seattle a la gueule de bois…
« C’est ce qui arrive parfois avec les bonnes équipes, on veut les améliorer en touchant au cinq majeur et au banc. En l’occurrence, ils ont modifié notre cinq majeur en faisant venir Kendall, qui est un bon gars et un bon joueur, encore une fois, mais qui n’était pas le bon choix pour notre équipe. Ce n’était pas la bonne association avec Gary car ils avaient deux styles de jeu qui n’étaient pas compatibles. Ce n’était pas le bon tandem sur la ligne arrière et ça nous a coûté ! C’est un gars qui jouait dans la ligue depuis plusieurs années mais qui est arrivé chez nous et a galéré. Il a lutté physiquement sur le terrain et évidemment il y a eu des difficultés aussi mentalement hors du terrain. Il a eu des problèmes pour s’adapter et chaque joueur est différent. Il faut savoir s’adapter à chaque personne et je pense que George n’a pas forcément eu la patience nécessaire avec lui. A vrai dire, George n’avait pas tellement de patience pour aucun d’entre nous [rires] ! Kendall l’irritait un peu. Je l’adore mais George n’est pas un coach pour tout le monde non plus. Avec moi et Gary, ça allait car on a la même passion. On a le même sang de compétiteur. »
Les Finals 1996
Rudement mis à l’épreuve par ces deux désillusions, les Sonics sont logiquement crucifiés en place publique par les médias. Mais, avec un logo modernisé et de nouveaux maillots, Kemp et ses sbires reviennent encore à la charge en 1995.
L’échange de Kendall Gill pour Hersey Hawkins amène la touche finale, apaisante, qui complète parfaitement l’effectif des Sonics. Aux côtés du Big Three local avec Kemp, Payton et Schrempf, Hawkins amène son jeu sobre et efficace des deux côtés du terrain. Seattle repart sur les chapeaux de roue avec 22 victoires sur ses 30 premiers matchs.
« Je dis que c’est la meilleure saison des Sonics dans le sens où il y a eu une accumulation de choses. On avait une bonne équipe avec des joueurs plutôt populaires mais pas beaucoup de résultats en fin de compte. On était censé réussir les années précédentes mais on s’est fait sortir plusieurs fois au premier tour, ou au deuxième tour. Donc, quand on a enfin réussi à passer le cap, c’était vraiment super plaisant de pouvoir donner quelque chose à célébrer à nos fans. Il y avait tous ces espoirs, ces discussions, il faut pouvoir diriger cette énergie quelque part, c’était bien de voir ça. »
Surtout, Seattle ne craque plus sous la pression. Kemp et Payton sont plus mûrs et les tours de playoffs s’enchaînent. Le premier tour face aux Kings est rapidement avalé (en cinq manches) alors que les Rockets sont carrément balayés en quatre matchs secs.
De nouveau en finale de conférence, trois ans plus tard, les Sonics font face au Jazz de Malone et Stockton. Le duel des duos, un véritable duel de générations, tourne en faveur des « jeunots ». Kemp ne tremble pas sur la ligne des lancers pour envoyer le Jazz en vacances au bout d’une série âprement disputée, en sept rounds. « Je ne pense pas qu’on ait vraiment réussi à briser le signe indien, il s’agissait davantage de nous-mêmes et du fait qu’on savait qu’on pouvait mieux jouer que ça, être plus performants car on n’avait manqué plusieurs occasions les années précédentes. »
En finale face aux Bulls historiques à 72 victoires, les Sonics ne sont clairement pas donnés favoris. Chicago confirme cet état de faits en prenant les trois premiers matchs de la série, avant un retour furibard de Seattle qui emporte les deux suivants.
Pour Kemp, bien que perdue, cette Finale NBA est importante à plus d’un titre. Il a non seulement rivalisé avec Michael Jordan, le meilleur joueur de la planète, mais il l’a également fait devant ses proches.
« Ce qui est énorme ! Les gens ne se rendent pas compte que je viens d’un petit village, Elkhart dans l’Indiana, pas très loin de Chicago. Probablement 1h15 de route pour y aller. Je ressentais pas mal de pression pour jouer à mon meilleur niveau. Je voulais jouer à mon meilleur niveau quand j’étais devant mes proches. »
A 23 points de moyenne à 55% aux tirs, plus 10 rebonds, 2 passes et 2 contres de moyenne en 40 minutes, Kemp n’a pas volé ses 3 votes dans la course au MVP des Finales. Malheureusement pour lui, c’était face au GOAT.
« Ce match 6 était définitivement un match sous haute tension. Mais c’est le genre de match pour lequel tu bosses dur toute ta carrière. Pour être bon dans ces matchs importants. En tant que joueur, tu veux être à ton meilleur niveau dans les matchs les plus importants. La dernière chose que tu veux, c’est de dire que tu as fait les Finales, mais que tu as produit ton pire basket. Ça demande beaucoup de concentration mais c’est un projet faisable. Affronter Michael Jordan et les Bulls est légendaire par rapport à leur histoire et leur succès. Et puis, avoir le meilleur joueur de l’histoire dans l’équipe, ça ne gâche rien… »
La fin d’une ère
L’immense succès de la saison 1996 ne sera cependant pas suivi d’effets. Au contraire, la franchise du Washington va vendanger une opportunité en or de construire sur cette première apparition en Finales en 17 ans.
Mécontent des transactions effectuées durant l’intersaison, avec le départ des vétérans Franck Brikowski, Ervin Johnson et Vincent Askew et les arrivées de Jim McIlvaine, Craig Elho ou Larry Stewart, Kemp fait du boudin. La superstar des Sonics assiste non seulement à la signature d’un gros contrat pour Payton, mais aussi celle de McIlvaine comme une insulte à sa carrière à Seattle.
Pas de mésentente là-dessus néanmoins : Kemp n’en veut ni à Payton, ni à McIlvaine de décrocher le gros lot. Non, Kemp en veut à la direction des Sonics qui a brisé la dynamique d’un groupe qui avait enfin trouvé son rythme de croisière. S’en suivront plusieurs mois bien chaotiques entre Kemp et sa franchise de toujours, avec des retards à l’entrainement et autres contre-performances inhabituelles…
« Je ne dirais pas que j’ai déconnecté de l’équipe durant cette saison mais une fois que tu te rends compte que tu ne vas pas revenir la saison suivante, il est vrai que tu ne seras pas forcément aussi en harmonie avec l’équipe. C’est naturel. Quand tu t’es battu si fort pour rallier les Finales, après tant d’années d’entraînement, à trouver la bonne communication et alchimie, ce n’est pas quelque chose que tu jettes à la poubelle. Ce qui m’a le plus vexé dans cette histoire, c’est qu’on avait une équipe qui a enfin réussi à aller en Finales et on ne lui a même pas donné une seconde chance. Pourquoi on se décarcasse à devenir une des meilleures équipes si c’est pour ne même pas avoir une deuxième chance ? Laissez nous perdre au lieu de nous faire perdre. La franchise a pris de mauvaises décisions en faisant venir de nouveaux gars quand on avait déjà une bonne équipe en place. Ça ne faisait aucun sens, on vient d’aller en Finales. C’est ça qui m’a le plus dérangé au final, c’est que la franchise n’était plus aussi déterminée. »
Désenchanté, Kemp commence alors à divaguer hors-terrain. Le ressort est brisé. Définitivement.
« Gary a pu avoir un gros contrat parce que j’étais là pour leur dire de le signer avec un gros contrat. Quand je suis parti de Seattle, tous les joueurs avec qui j’ai joué ont pu signer un gros contrat. Je savais en fin de compte qu’il n’y allait pas avoir assez d’argent pour moi. Je le savais deux ou trois ans à l’avance déjà, et donc, pour moi, le départ de Seattle était plus ou moins prévisible. Sachant ça, je m’y étais préparé. Je m’étais préparé à partir car je savais qu’il serait difficile financièrement de conserver Gary et moi en même temps. »
Cela dit, Kemp fait bien comprendre qu’il n’avait rien contre Jim McIlvaine, ce pivot blanc-bec signé à prix d’or par les Sonics. Ce n’est pas de sa faute à lui si Seattle a complètement craqué sur le montant du chèque… « Beaucoup de gens pensaient que j’étais fou après le contrat de Jim McIlvaine mais ils ne savent pas que c’est moi qui avais trouvé Jim McIlvaine. On jouait les Bullets de Washington et j’en avais parlé au coaching staff. Je leur avais dit que c’est ce type de gars dont on a besoin dans la peinture. Il sortirait du banc et nous aiderait défensivement. Mais c’est un gars qui tourne à 6 points et 3 rebonds, donc il ne faut pas le payer 30 millions de dollars, il faut le payer le salaire d’un gars qui tourne à 6 points et 3 rebonds ! »
« C’est là qu’il y a eu une erreur. Mais je n’avais rien contre lui. J’ai joué avec lui et je m’entraînais avec lui tous les jours sans problème. On est encore amis aujourd’hui. Je pense que les médias voulaient trouver un problème parce qu’on faisait partie des équipes populaires, on sortait des Finales NBA. Je n’étais pas si énervé que ça. J’avais de bons revenus aussi, surtout par la vente de mes chaussures. Je n’ai pas gagné beaucoup d’argent par mes contrats avec Seattle mais je me rattrapais grâce aux ventes de chaussures. Evidemment, en tant que joueur, tu veux être rémunéré à la hauteur de ton talent basket, pas seulement pour ton image. Pour moi, ce n’était pas un truc négatif et je ne pense pas que ça l’était pour mes coéquipiers non plus. Mais les médias l’ont décrit comme quelque chose de négatif. »
Shawn Kemp, un concentré des nineties
Envoyé chez les Cavaliers à l’été 1997, Shawn Kemp en profitera pour enfin obtenir son jour de paye, avec un contrat de 107 millions de dollars sur 7 ans. Mais la magie est passée. Le « Reignman » terminera son règne sur la NBA dès l’année suivante en 1999, en surpoids.
Après six sélections de suite au All Star Game, Kemp manque la grand-messe annuelle et il n’y sera plus jamais convié. Pire, il va se perdre dans une franchise des Cavs en désarroi, et plus encore dans ses démons. Alcool, drogue et mauvaises inspirations vont pourrir sa fin de carrière entre Cleveland, Portland et Orlando.
A bien des égards, les excès y compris, Shawn Kemp est la quintessence de la NBA des années 90. Du brut de décoffrage… « A chaque fois qu’on me mettait sur un pivot, je savais que c’était une bonne soirée pour moi car ils étaient trop lents. Shawn Bradley, avec lui, c’était soirée posters, yeah ! On dessinait des alley oops sur le tableau dans les vestiaires et George nous disaient d’arrêter nos conneries [rires]. On savait qu’on pouvait l’attraper sur des actions en lob. »
Promu superstar avec une vidéo qui retrace son parcours (voir plus bas), produite par la NBA, et largement présenté à son avantage dans d’autres programmes comme le volume 3 de la VHS Superstars, Kemp est un concentré des nineties avec son innocence et sa fraîcheur. Ecoutez-ça : « Mon rituel d’avant-match était de ne pas shooter », s’amuse ainsi Kemp. « J’aime jouer au basket bien sûr, mais quand tu arrives à la salle pour le match, tu as déjà fait un entraînement le matin et tu sais donc déjà ce qui t’attend. Je n’avais pas besoin de faire beaucoup de shoot à l’échauffement. On avait un dicton dans le vestiaire : quand tu sens l’odeur du popcorn, tu sais que c’est le moment de tout donner sur le terrain. »
Arrivé en NBA avant même de pouvoir être autorisé dans les bars (l’âge légal aux Etats-Unis étant fixé à 21 ans), Kemp a d’abord été un jeune joueur sérieux et discipliné. « Quand je suis arrivé à Seattle, j’habitais dans le quartier de Queen Anne car je savais que je devrais être à la salle tôt le matin pour mon éducation basket, et partir le dernier le soir. La meilleure façon de faire pour moi, c’était de pouvoir marcher ou jogger à la salle. Et c’est ce que j’ai fait, j’habitais juste derrière le Coliseum. »
Avec le temps, et le succès aidant, Kemp va devoir revoir sa situation résidentielle. « J’ai finalement déménagé à Magnolia [un quartier huppé de Seattle, au bord du détroit de Puget] parce que je recevais trop de plaintes par rapport au bruit dans mon immeuble. Ce n’était pas un problème mais un des résidents est venu me voir pour me dire qu’avec le nombre de personnes qui vont et viennent dans mon appartement, je ferais mieux de me trouver une maison. Et c’est là que j’ai habité pendant la grande partie de mon temps à Seattle. »
Pas le dernier pour s’amuser, Kemp a trouvé en Payton un partenaire idéal pour des soirées endiablées. Des fiestas si réputées que les joueurs de Portland n’hésitaient pas à faire le déplacement… « Les meilleures fêtes auxquelles j’ai participé sont celles que j’organisais moi-même. J’ai compris qu’elles avaient tendance à être un peu trop importantes parce que les joueurs des Blazers commençaient à revenir tous les soirs alors qu’ils habitent à plus de deux heures de route [rires] ! »
« On avait généralement un DJ, les fûts de bières, le jacuzzi, la piscine, tout ce que de jeunes hommes peuvent vouloir pour s’amuser. Et c’est ça qui était bien à Seattle, c’est qu’on gagnait beaucoup de matchs et qu’on a donc pu célébrer plutôt que se morfondre et être mécontents. Ce n’est que quand les playoffs arrivaient et qu’on avait perdu qu’on ne célébrait plus… »
Récompensé par un gros contrat sur le tard, Kemp a dû se montrer patient, mais il s’est bel et bien offert le train de vie de stars, auquel aspirent tous ces jeunes athlètes pétris de talent. Désormais plus sage, il regarde ça avec un oeil amusé : « La plus grosse dépense / erreur que j’ai commise, c’est de lâcher 500 000 dollars pour une Ferrari GTA. Je me suis fait avoir. Je suis allé à la concession et ils m’ont sorti toute une liste de voitures qui sont superbes, mais qui se ressemblent toutes. Et ils te disent aussi qu’ils peuvent te faire venir ce modèle-là que personne d’autres n’a aux Etats-Unis car il sort au printemps prochain. Evidemment, j’ai choisi ce modèle [rires]. En rouge, évidemment, comment avoir une Ferrari qui ne soit pas rouge ? Il y avait les vitres teintées, cabriolet, à la Magnum ! J’en avais aussi une blanche qui n’était pas cabriolet, et j’en entends encore parler aujourd’hui… Des erreurs ! »
Pris dans l’engrenage, Kemp se faisait également un « petit plaisir », avec Payton, en s’achetant une nouvelle Cadillac chaque année. Un style de vie évidemment intenable sur le long terme, et que Kemp a abandonné au profit d’un train-train beaucoup plus conventionnel.
Désormais rangé, Kemp vit toujours à Seattle avec sa femme Marvena. Il continue de diversifier son portefeuille d’activités avec un nouveau magasin de cannabis (thérapeutique) qui va bientôt ouvrir à Seattle, tout en s’occupant de ses enfants, dont Shawn Jr. qui figurait récemment sur le roster des Reno Bighorns en G-League, et le plus jeune Jamon qui va jouer à l’université de Southeastern Louisiana quand la saison reprendra…
Moqué pour son intelligence quand il était plus jeune, puis pour ses excès avec les femmes, l’alcool et la cocaïne en fin de carrière à Portland et Orlando, Shawn Kemp n’en a pas moins assumé ses responsabilités. De sa voix d’outre-tombe qui se transforme souvent en tonitruants éclats de rires, on entend encore le « Reignman » pointer son nez à l’horizon dans le ciel de Seattle.
« Ces jours-ci, je viens de finir d’entraîner mon fils. Je vais ouvrir une nouvelle boutique de cannabis sur la première avenue, pas très loin de la Key Arena. J’ai toujours quelque chose sur le feu. Ma femme [Marvena] et moi, on vit ici depuis des années et on est très impliqués dans la communauté. Elle est coach dans un Community College à Shoreline et on veut rendre aux gamins en général. Je suis arrivé en 1989 et on m’a impliqué dans la communauté à travers de nombreuses actions. Et c’est ce qu’on veut continuer à faire, c’est ça le plus important. »
Aujourd’hui encore, l’ombre du « Reignman » plane encore sur Seattle. Et ça ne semble pas prêt de s’arrêter…