Avant de remonter la pente grâce à George Karl puis Mike Malone, les Nuggets ont connu un gros passage à vide en termes de résultats, à partir du milieu des années 1990 : huit années de suite sans playoffs dont cette saison 1997-1998, historique de médiocrité.
Bilan
11 victoires – 71 défaites (pourcentage de victoires : 13,4%)
Effectif
Eric Williams, Cory Alexander, LaPhonso Ellis, Dean Garrett, Bobby Jackson, Johnny Newman, Anthony Goldwire, Tony Battie, Danny Fortson…
Trop gourmand Antonio McDyess
« J’imagine qu’ils n’avaient pas d’autre choix que de me transférer. Ils m’ont appelé à 8 heures du matin ce jour-là en me disant que je pourrais être échangé. Puis je me suis réveillé à 13 h ou 14 h, ils m’ont dit que j’allais aux Suns. » En ce début octobre 1997, quelques semaines avant la reprise, Antonio McDyess vient d’apprendre qu’il quitte Denver pour Phoenix.
Les Nuggets viennent de faire une croix sur leur plus jeune potentiel (22 ans), auteur de deux belles premières saisons, pour des raisons financières. La franchise du Colorado a pourtant mis sur la table une prolongation de contrat de six ans pour 70 millions de dollars. Antonio McDyess le gourmand, sans doute inspiré par le contrat record de son camarade de Draft Kevin Garnett, en voulait 30 millions de plus… En ne cédant pas, la franchise s’offre ainsi un matelas de 15 à 20 millions de dollars sous le cap.
En retour, Denver récupère une flopée de tours de Draft et assume son virage vers une reconstruction tournée vers l’inexpérience. Dans les mois qui ont précédé, la franchise a déjà perdu beaucoup de ses cadres, des joueurs affirmés dans la ligue (Mark Jackson, Dale Ellis, Ricky Pierce, Ervin Johnson…). Sans oublier leur pivot All-Star, Dikembe Mutombo, parti un an plus tôt vers Atlanta.
Assistant coach aux Hawks justement, le jeune Bill Hanzlik (39 ans) fait le chemin inverse pour occuper son premier poste de « head coach ». Cet ancien « role player » des Nuggets aura la lourde, pour ne pas dire impossible, tâche de sortir Denver de sa décennie 1990 de morosité. Hormis son « upset » mémorable lors des playoffs 1994, la franchise peine à passer la barre des 30 victoires. Avant d’entamer cet exercice 1997-1998, les Nuggets viennent de ne remporter que 21 rencontres…
Des Nuggets beaucoup trop tendres
« Les Nuggets, de sérieux candidats au titre de pire équipe de l’histoire », titre le Deseret News début janvier 1998. Sur son parquet, Denver vient de prendre une valise de 33 points face au Jazz. Une humiliation d’autant plus dure à avaler que le même soir, la franchise célébrait son 30e anniversaire et avait invité pour l’occasion d’anciennes gloires locales : David Thompson, Dan Issel et Alex English, tous Hall of Famers.
« Les circonstances, malheureuses, font que nous nous trouvons exactement là où nous sommes, c’est-à-dire au milieu d’une année de reconstruction, où le pire est en train de se produire », lâche un LaPhonso Ellis que l’on devine dépité. Ce dernier, usé par de récentes opérations aux genoux, est l’un des derniers rescapés de l’exploit des playoffs de 1994, encore présent dans les mémoires.
Et l’intérieur, qui rêvait encore d’atteindre les sommets de l’Ouest quelques mois plus tôt, de poursuivre : « Il y a trois ans, lorsqu’on a fait ce truc incroyable, nous pensions être à peu près sur la bonne voie pour rendre non seulement les joueurs actuels, mais aussi tous ceux qui ont déjà porté le maillot, très fiers de ce que les Nuggets étaient et allaient être. »
Raté. Cette défaite face au Jazz intervient en effet au cœur d’une série alors historique de 23 défaites de suite. Si bien qu’après 40 matches joués, Denver ne compte… que deux pauvres victoires. Jerry Sloan, qui s’apprête à reprendre la route des finales NBA, tente malgré tout de leur adresser un lot de consolation : « Denver a de bons jeunes joueurs, leur jour viendra. »
Le « Jazzman » fait référence à cette quantité de rookies envoyés au charbon et responsabilisés dès leur première saison : du non-drafté Bobby Jackson au 5e choix de la Draft précédente Tony Battie, en passant par Danny Fortson. Dans l’effectif, pas moins de 12 joueurs ont deux ans d’expérience ou moins… Ceux-là peinent à inscrire 90 points chaque soir et s’inclinent en moyenne sur un terrible différentiel de 12 points en leur défaveur. À ce rythme-là, ils n’atteindront même pas le cap symbolique des 10 victoires.
Au cœur du cauchemar, une rumeur pour le moins improbable fait surface : Denver voudrait remettre la main… sur Antonio McDyess ! « C’est le plus gros bobard que j’ai entendu cette saison, je ne pense pas qu’il y ait la moindre chance que je retourne à Denver », lâche alors l’intérieur sans se douter de la suite des événements. Au cours de la saison, sans surprise, les Nuggets ne tentent absolument rien sur le marché des transferts.
À la même période, une autre équipe phare de la ville, les Broncos, connaît le destin opposé en remportant son deuxième « Super Bowl » de suite. « Leur succès a permis de détourner une partie de l’attention » sur les Nuggets, remarque alors Bryant Stith, l’un des rares vétérans de l’équipe, gêné tout au long de la saison par les blessures à l’instar d’Eric Williams, dont le genou a été foudroyé dès le quatrième match de la saison.
Stith en est certain, dans dix ans, les gens se demanderont : « Comment les Nuggets ont-ils pu perdre 23 matches de suite ? Les gens se ficheront de savoir que deux titulaires étaient blessés, que cette équipe a été dépouillée pour faire de la place sous le « salary cap ». Les gens ne se souviendront pas du coach, ni d’aucune de nos excuses. Tout ce dont ils se souviendront, c’est que ces 12 gars jouaient pour la pire équipe de l’histoire. »
Le discours est déjà sévère mais pragmatique pour ce joueur qui dit tenir à sa réputation. Bryant Stith a de plus en plus de mal à accepter d’être la risée de la ligue : « Quand j’allume ESPN ou la radio, nous sommes l’objet de leurs blagues, ils n’ont rien de positif à dire sur cette organisation. C’est décourageant d’en faire partie. » Parmi les vannes qui circulent à Denver, celle-ci : « Qu’ont en commun les Broncos, les Rockies (baseball), l’Avalanche (hockey) et les Nuggets ? » Aucune ne sait jouer au basket…
Début février, alors que Denver vient de célébrer sa 4e victoire de l’année, les Bulls débarquent en ville pour remettre les pendules à l’heure : victoire écrasante 111-72 de Chicago avec un Michael Jordan qui se contente de 15 unités. « Jouer Denver, c’est comme jouer face à une équipe de lycée, c’est la pire équipe de l’histoire », ne se retient pas Dennis Rodman.
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« Notre propriétaire veut éviter le record », lâche pourtant un certain Mike D’Antoni, en référence aux 9 victoires des Sixers de 1973. Ce dernier, étonnamment, dispose de la casquette d’assistant coach ainsi que GM par intérim. Allan Bristow remercié, c’est finalement Dan Issel qui va finir par récupérer le poste de dirigeant.
Malgré une nouvelle série de 16 défaites de rang, Denver parvient tout de même à sauver l’honneur en remportant 6 de ses 19 derniers matches et ainsi atteindre les 11 succès.
Un coach remercié définitivement
Deux jours après la fin de la saison, un premier fusible saute : Bill Hanzlik est viré malgré ses deux années de contrat encore restantes. Dan Issel dit de lui qu’il est un « homme bon [qui] a été mis dans une situation sans issue. Était-ce juste ? Sans doute que non. » Après cette année noire, Hanzlik n’occupera plus jamais un banc NBA… et il détient encore aujourd’hui le pire bilan de l’histoire pour une première année comme coach.
La suite ? Contre toute attente, Denver parvient à récupérer lors de l’intersaison suivante la girouette McDyess. Mais rate complétement le coche à la Draft avec son 3e choix. Ils choisissent Raef LaFrentz après avoir hésité avec… Paul Pierce, son coéquipier à Kansas. Dan Issel justifie ce choix après s’être appuyé sur « l’expertise » du coach universitaire de Colorado, persuadé que le premier ferait une meilleure carrière professionnelle que le second.
Le même soir, les Nuggets se débarrassent de leur espoir Tony Battie, envoyé aux Lakers, pour récupérer Nick Van Exel. Son association avec Antonio McDyess permettra à la franchise de sortir un peu la tête de l’eau. Mais il faudra patienter jusqu’en 2003 et la Draft de Carmelo Anthony pour voir l’équipe vraiment redécoller.
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