Dirk Nowitzki. Kobe Bryant. Brandon Jennings. Andrei Kirilenko. La liste des joueurs ayant annoncé vouloir jouer à l’étranger en cas de lock-out ne cesse de s’allonger. Et elle comprend des noms prestigieux.
Cependant, à y regarder de près, les choses pourraient être un peu plus compliquées que certains ne le pensent. Et les joueurs pouvant effectivement jouer en cas de lock-out sont bien moins nombreux qu’on ne croit.
La NBA, en tant que championnat « national » (ou plutôt sous-continental) est affiliée à la FIBA. Ceci signifie qu’elle doit respecter un certain nombre de règles relatives aux transferts inter-championnats, aux contrats, et aux conditions d’exercice de ces contrats.
En conséquence, les joueurs sous contrat au sein de la NBA devront respecter un certain nombre de contraintes, qui sont, on va le voir, bloquantes.
Les agents libres 2011
Pour les joueurs qui seront agents libres en 2011 au contraire, tout est simple : ils sont libres d’aller jouer en Europe, en Chine ou dans tout autre championnat. Tant qu’ils n’ont pas signé de contrat avec une franchise NBA, ce qui ne pourra arriver tant que la négociation ne sera pas terminée, la FIBA n’a pas son mot à dire.
Les contrats signés dans les championnats grecques, allemands ou encore chinois comprendraient probablement une clause permettant le joueur de rejoindre la NBA dès la fin du lock-out, éventuellement en cours de saison. Cependant, une telle clause diminuerait fortement l’attractivité d’une telle signature pour le club.
Pour ces joueurs, c’est donc tout bénéfice : ils conserveraient un revenu (bien que largement inférieur, selon toute probabilité, à ce qu’ils gagnent en NBA) et surtout ils continueraient à jouer et à se maintenir en forme.
Parmi les joueurs tombant dans cette catégorie, on peut penser à Andrei Kirilenko, qui a déjà annoncé vouloir jouer en Russie. Plus généralement, ce sont tous les agents libres non restreints qui sont concernés. Carmelo Anthony, s’il n’a pas prolongé d’ici là, est concerné.
Les rookies draftés en 2011 pourraient aussi s’exiler. En effet, la draft permet aux franchises d’acquérir les droits exclusives sur un joueur, mais le contrat est effectivement signé plus tard. Et, comme il ne pourrait être paraphé qu’à la fin du conflit, les rookies se retrouveraient libres dans l’intervalle.
De leur côté, les agents libres « restreint » sont toujours sous contrat, même s’ils sont susceptibles de changer de club. Ils sont donc concernés pas les contraintes détaillées ci-dessous.
Les joueurs sous contrat
Les règles FIBA précisent les conditions de transfert d’un championnat à un autre pour un joueur encore sous contrat.
Il lui faut alors obligatoirement obtenir une lettre d’autorisation de la fédération internationale. Cette lettre n’est donnée que dans un certain nombre de cas précis, et selon toute probabilité un conflit social ne rentre pas dans la liste.
Selon les avocats spécialistes du sport, il est donc extrêmement improbable qu’un joueur sous contrat obtienne le précieux sésame.
Sans cette lettre, un club étranger n’a pas la possibilité de signer un contrat et d’intégrer un joueur NBA dans son effectif.
La seule possibilité serait alors de signer dans un championnat non affilié à la FIBA et donc non contrait pas le règlement FIBA. Mais verrait-on un joueur NBA jouer dans un championnat mineur ? Peu probable.
Les contrats sont-ils toujours valables ?
La faille qu’espère exploiter le syndicat des joueurs consiste à faire invalider les contrats pour la durée du lock-out. Il s’agit considérer comme une rupture de contrat le fait que les propriétaires bloquent le déroulement de la saison.
Ce point est loin de faire l’unanimité parmi les spécialistes. Tout conflit social ne provoque pas, loin de là, la fin du contrat entre l’employeur et l’employé.
Même dans le cas où cette faille serait réelle, le syndicat des joueurs a d’ores et déjà anticipé deux contraintes majeures.
Tout d’abord, si un joueur se blesse gravement, les franchises auraient la possibilité d’annuler toutes les années restantes sur le contrat. Si le lock-out dure toute la saison 2011-12, Bryant pourrait perdre ce qui lui est dû les deux saisons suivantes, soit 58,4 millions de dollar, en plus des 25,2 millions pendant le lock-out. Prendrait-il ce risque ?
Ensuite, il est clair que les championnats étrangers ne pourraient offrir des sommes comparables à celles données en NBA. Le nombre d’équipes européennes pouvant s’aligner pour signer les meilleures stars est limité à quelques clubs, probablement grecques ou espagnols. Et encore, on n’attendrait pas les 10 millions de dollars par saison. Même si seule une quinzaine de bons joueurs NBA se présentent, il n’est pas sûr qu’il y ait de la place pour tout le monde.
Une arme de négociation ?
Pour tous les observateurs avertis, ces restrictions sont connues depuis longtemps. Les déclarations des stars annonçant leur souhait de joueur à l’étranger peuvent être interprétées de deux manières.
Soit ils sont très mal informés, parce qu’ils n’ont pas pris le temps d’en parler avant de faire une déclaration dans la presse ou parce que leur entourage n’est pas spécialiste du sujet. On en doute, dans la mesure où les agents, forcément proches des joueurs sur ces sujets, sont obligatoirement au courant du droit du sport.
Soit ils le savent bien, et décident de communiquer dans ce sens pour faire pression sur les propriétaires.
On penche plutôt pour la deuxième solution. D’autant plus que pendant ce temps, David Stern déclare à ESPN que les joueurs seraient libres de faire ce qu’ils veulent. Il rappelle même que c’était le cas en 1998-99. Sauf que même à l’époque, les joueurs NBA n’avaient pu s’affranchir des règles FIBA et la NBA n’avait pu envoyer des joueurs au championnat du monde.
Bluff et contre bluff, quand tu nous tiens…