Tous les ans, Forbes sort un classement de la valorisation de chacune des 30 franchises qui composent la NBA. A partir d’un analyse complète de leurs finances, elle leur donne une valeur, reflétant à la fois le présent (fréquentation des salles, droit télé, produits dérivés, …) et l’avenir (les anticipations de revenus).
Cette année, ce sont les Knicks qui arrivent en tête, avec une valorisation de 655 millions de dollars, devant les Lakers (643 millions).
Les Knicks première valorisation
Selon Forbes, la valeur de la franchise de New York a gagné 12% par rapport à l’année dernière. Cette performance lui permet de passer devant les Lakers, qui de leur côté ont gagné 6%. Elle s’explique par l’augmentation des revenus issus de la vente de billets ainsi que de nouveaux partenariats commerciaux.
L’arrivée d’Amare Stoudemire n’y est évidemment pas pour rien. Le « résultat d’exploitation » (Operating Income) passe d’ailleurs de 21 à 64 millions de dollars, et ce malgré la signature d’un contrat pour le joueur à plus de 16 millions cette saison et 18 la saison prochaine.
Les Lakers et les Knicks représentent de loin les deux plus grosses valorisations, soit 12% du total des valorisations (environ 11 milliards de dollars).
Une grande disparité
131 millions séparent les Lakers, deuxième, et les Bulls, troisième, valorisés à 511 millions. Derrière suivent les Celtics (452), les Rockets (443), les Mavericks (438) et le Heat (425).
Cette dernière franchise est la plus grosse progression d’une année sur l’autre (+17%). Aucun doute : c’est l’arrivée des Three Amigos qui fait exploser sa présence médiatique, sa fréquentation et ses perspectives de titre suprême, générateur de revenus substantiels.
A l’autre bout du classement, on retrouve sans surprise les Bucks en bon dernier (258 millions), ne précédant que de peu les Timberwolves (264), les Grizzlies (266) et les Pacers (269).
La franchise en tête du classement, les Knicks, vaut donc, selon Forbes, 2,5 fois la dernière, les Bucks…
Des estimations réalistes
Ces valeurs nous semblent tout à fait réalistes. Pour comparer, il faut regarder les changement de propriétaires ayant réellement eu lieu récemment. Trois franchises ont changé de main ou fait l’objet d’une transaction dans les 12 derniers mois : les Bobcats, les Warriors et les Hornets.
La franchise de Charlotte a été acquise à 100% par Michael Jordan, précédemment actionnaire minoritaire. Le montant de la transaction n’a pas été révélé.
Les Warriors ont changé de main cet été, en faveur du duo composé de Joe Lacob et Peter Guber, et au nez et à la barbe de Larry Ellison, le patron d’Oracle. La transaction avait été enregistrée à 450 millions de dollars, soit le record de vente d’une franchise NBA.
Forbes valorise de son côté la franchise à 363 millions. Rappelons qu’il n’existe pas un bon prix dans l’absolu, mais seulement plusieurs propositions de prix, liées à l’analyse de la performance actuelle de la franchise, à son potentiel de développement, mais aussi de la concurrence entre différents acquéreurs. Larry Ellison avait de son côté fait une proposition à 400 millions.
Les Hornets ont été acquis à un peu plus de 350 millions par la NBA. Forbes de son côté la valorise à 280 millions.
Le marché, principal facteur de valeur
A la lecture de ces chiffres, on voit apparaître deux facteurs principaux de valorisation : la taille du marché et la présence de grandes stars.
La taille du marché dépend de la population. Les trois plus grandes villes des États-Unis (dans l’ordre New York, Los Angeles et Chicago) constituent le trio de tête. Par ailleurs, la culture basket, caractérisée par une grande base de fans, permet à une ville comme Boston d’être 4ème alors qu’elle ne figure qu’en 20ème position des villes les plus peuplées du pays. D’un autre côté, les plus petits marchés sont extrêmement bien représentés dans le bas du tableau.
On voit aussi que l’arrivée d’un joueur vedette très bien payé peut se justifier d’un point de vue financier, tant il est possible que sa présence sportive et médiatique transforme le modèle économique de la franchise.
Cependant, c’est particulièrement vrai dans un gros marché. Dans ce contexte, l’effet de levier sera plus important : au lieu de passer de 50 000 à 70 000 maillots vendus, la franchise passera de 500 000 à 700 000 maillots. Par conséquent, le revenu et le profit augmenteront significativement plus et couvriront sans difficulté les dépenses en salaire.
Des chiffres en faveur des propriétaires…
Il est certain que les données fournies ne vont pas être rangées dans un placard par les propriétaires de la ligue. En effet, l’analyse des chiffres montre qu’une majorité de franchises perd de l’argent. 17 d’entres elles (sur 30) ont un résultat d’exploitation négatif.
La pire franchise est le Magic, qui perd 23 millions de dollars. Il faut dire que ses revenus sont limités, à 108 millions, soit autant que les Wizards, les 76ers, les Kings ou les Clippers (entre autres). Par ailleurs, le Magic a la 2ème plus grosse masse salariale. A ce niveau là, difficile de ne pas penser que c’est une volonté du propriétaire, prêt à jeter de l’argent par les fenêtres en échange d’un titre.
Mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Plusieurs franchises n’ont pas eu accès à des fonds illimités, et se retrouvent tout de même en déficit. On pense aux Timberwolves, aux Kings, aux Pacers, aux Bobcats ou aux Wizards.
Qu’il y ait plus de clubs en déficit que de clubs faisant des bénéfices est inédit dans le sport US.
Par ailleurs, parmi les vingts moins importantes valorisations, seules 6 sont bénéficiaires. On comprend donc qu’il y ait un malaise au niveau des propriétaires…
Sachant que le montant total des revenus redistribués aux joueurs équivaut, au niveau de la ligue (et donc pas au niveau de chaque club), à 57% des revenus, le premier point d’attention pour couper les coûts se situe donc naturellement au niveau de la masse salariale.
… mais appelant à une réforme profonde du système
Cependant, la comparaison entre ce qu’une franchise devrait pouvoir payer en masse salariale si on la limite à 57% de son revenu et les masses salariales réelles montrent que les clubs les plus riches surpayent facilement leurs meilleurs joueurs, tandis que les plus petites franchises sont obligées de vivre au dessus de leur moyen.
D’après nos calculs, même en allouant 50% du revenu de la NBA aux salaires des joueurs, 6 franchises resteraient encore en déficit.
Baisser cette limite de 57% permettra d’améliorer les choses, mais ne résoudra pas le problème de fond : la trop grande disparité entre les franchises. Et resurgissent donc trois solutions dont on parle beaucoup en ce moment : l’introduction d’un hard-cap, qui diminuerait l’avantage des grosses franchises, la suppression d’une ou plusieurs franchises, permettant de répartir les revenus entre moins de propriétaires, et le renforcement du partage de ses revenus, permettant de venir en aide à ceux le plus en difficulté.
Le hard-cap à l’avantage de mettre tous les propriétaires d’accord, car il répartit l’effort de manière équitable. En contrepartie, il constitue un casus belli pour les joueurs.
Le « downsizing » mettrait probablement tous les propriétaires d’accord… jusqu’à ce qu’on cherche la ou les franchises à supprimer. Il faudrait alors que les propriétaires concernés soient prêts à vendre.
Le partage des revenus, lui, divisera forcément : il faudrait alors demander aux propriétaires des franchises les plus favorisées de partager leur gain, pour le bien de tous. Pas très capitaliste…
Conclusion
On le voit à la lumière de ces chiffres, nul doute que le modèle économique de la NBA reste à trouver. Les propriétaires et les joueurs ont maintenant environ 9 mois pour aboutir à une solution commune : 6 mois de négociations cordiales jusqu’à juin, puis 3 ou 4 mois beaucoup plus tendus.
Mais l’analyse des solutions possibles montrent que ce n’est pas simple.