Dès le lendemain d’une ultime défaite à Portland, Joffrey Lauvergne rentrait en France. D’abord pour passer une semaine avec ses parents avant de prendre des vacances et de préparer le rassemblement avec les Bleus, prévu pour le 1er juin. Blessé au dos, l’intérieur Joffrey a manqué le dernier match des Nuggets après une saison globalement satisfaisante. Nous en avons dressé le bilan avec lui.
Joffrey, vous venez de terminer une saison complète. Avez-vous ressenti des différences avec votre demi-saison passée ? Ou ce n’est finalement que plus de matches à jouer…
Franchement je n’ai rien vu ou appris que je ne connaissais pas déjà après les quelques mois de la saison dernière. Globalement j’avais cerné et compris comment ça marchait. Par contre si je parle des Nuggets, là oui c’est différent. L’équipe jouait moins bien la saison passée et encore plus à partir du moment où l’objectif playoffs n’était plus accessible. J’ai vu le pire du pire l’an dernier. L’année dernière on s’entraînait très peu, cette année on s’entraîne beaucoup plus. C’est sérieux.
« Oui, ça joue pour sa gueule… Mais c’est culturel »
Quel est aujourd’hui le stéréotype sur la NBA auquel vous aimeriez le plus tordre le cou ?
En fait je ne lis pas trop la presse et je ne connais pas les clichés dont tu parles. Tu veux dire tout ce qu’on peut entendre dans le débat entre les pros basket européen et les pros NBA ? Nous l’an dernier on ne s’entraînait vraiment pas, et dire que ça s’entraîne pas en NBA, c’est peut-être vrai. Cela dépend des franchises. Idem pour la vision individualiste du basket ici. Oui ça joue pour sa gueule mais c’est culturel. Ici dès que tu es ouvert tu dois shooter, si tu ne le fais pas c’est une erreur. En Europe non seulement faut avoir une bonne possession mais en plus faut que ça soit à la fin de cette possession.
En prenant justement en compte ces variantes philosophiques entre NBA et FIBA, quel regard portez-vous sur votre saison ?
Je suis content. C’était bien. Si on m’avait dit que ça se passerait comme ça l’été dernier j’aurais été plutôt heureux. Après bien sûr que ça aurait pu encore mieux se passer. J’ai le sentiment qu’on m’a trop et pas assez donné à la fois, et on verra comment ça se passera la saison prochaine. Cette saison j’ai été dans le cinq majeur pour ensuite jouer 3 minutes avant de reprendre du temps de jeu puis d’être encore cloué sur le banc… C’était un peu bizarre mais globalement ce que j’ai fait est bien.
Le yo-yo de votre temps de jeu n’a visiblement pas affecté votre relation avec Mike Malone. Pourquoi ?
La critique que je faisais de moi était fausse. J’en étais venu à me demander si à chaque fois que j’allais avoir un coach qui ne me faisait pas jouer autant que ce que je pensais mériter, j’allais ne pas l’aimer et m’énerver. J’ai la preuve cette saison que non. C’est un bon coach et une bonne personne. Il est sérieux et travaille beaucoup.
« Il vaut mieux jouer à Philly ou à Fenerbahce ? »
Avez-vous senti le besoin de remettre votre jeu en question ?
Non. Presque à chaque fois que j’ai joué ça s’est bien passé. Je vais continuer de bosser comme j’ai toujours fait pour progresser. Il n’y pas non plus 30 000 questions à se poser.
Vous pouvez nous éclaircir sur votre situation contractuelle ?
L’année prochaine est une option qui doit être levée par le club. Elle ne sera garantie qu’au premier match de la saison. Mais ils vont me prolonger cet été, j’en suis persuadé. Est-ce que c’est une bonne chose pour moi ? On verra.
Après une saison et demie, votre désir est de poursuivre absolument votre carrière en NBA ou l’Europe reste une option ?
Il vaut mieux jouer à Philly ou à Fenerbahce ? Je sais que certains mecs me répondraient Philly mais ce n’est pas comme ça que je pense. Cela ne veut pas dire que je veux rentrer en Europe maintenant. Si la saison prochaine se passe aussi bien que cette année je pense que je resterai.
« L’équipe de France, ça me manque »
Contrairement aux championnats en Europe la NBA est une ligue fermée. Comment avez-vous vécu tous les matches disputés sans enjeu après la fin de l’objectif playoffs ?
Honnêtement ce n’est pas agréable. C’est même chiant. Moi j’aime les matches couperet à enjeu dans lequel tu ressens des émotions fortes, et là ça me manque. C’est long quand tu joues pour rien. Tu peux jouer pour ta pomme mais bon, mais la manière dont je joue quand ça fait 30 matches que tu sais que tu vas pas faire les playoffs, c’est pas le pied. Après cela fait partie de la NBA, elle a ses défauts et ses qualités.
Est-ce vraiment dur dans ce contexte de rester à fond ?
Non parce que tu travailles pour toi et pour progresser. L’été quand tu bosses tu n’es pas dans une période de compétition. Ma définition de la compétition ce n’est pas de prendre la balle, de rentrer un panier et d’être content. Si tu en mets 20 toute l’année et que tu ne gagnes pas un match, y’a un moment où ça lasse. Maintenant je me m’en fous pas d’en mettre 20 à chaque match (sourire).
Vous devez donc attendre l’Equipe de France avec encore plus d’impatience, non ?
Pour moi les Bleus ça a toujours été super important mais là oui, j’attends vraiment ça avec impatience. Les matches où tu as la boule au ventre et la peur de perdre ou de ne pas être bon, ça me manque. Les gros matches moi ça me galvanise. Ici tu joues tous les deux jours, tu gagnes ou tu perds sans que ça soit non plus super grave.
Propos recueillis à Portland