Statistiques et basket-ball : passes décisives, pertes de balles et rebonds

Le basket made in USA, c’est un sport où le spectacle prime et où on mélange allègrement les considérations sportives et le business.

Mais le sport made in USA, c’est aussi les statistiques. Dans tous les sports majeurs outre-atlantique, l’analyse des données des matchs est faite de manière très poussée.

Avant-dernier volet de notre série, nous traitons aujourd’hui des stats avancées permettant de décortiquer un match sous toutes les coutures, et spécifiquement celle ne concernant pas les points.

La notion d’action, dérivée de la possession

La première série de statistiques avancées que nous allons voir dans cette partie est tout simplement consacrée à l’usage que fait un joueur de la balle. Shoote-t-il ? Fait-il une passe décisive ? Perd-t-il la balle ?

La réponse à ces questions se trouve (partiellement) dans l’analyse avancée de la box-score.

Pour obtenir l’équivalent de la possession appliquée à un joueur (et non à l’ensemble de l’équipe), on introduit la notion « d’action », qui est une variante de la possession. Comme on est maintenant centré sur la performance du joueur, on modifie légèrement la formule :

Actions = Tirs tentés + 0,44 * Lancers tentés + Passes décisives + Pertes de balles.

Jusqu’ici, quand on considérait les possessions d’une équipe dans son ensemble, on prenait en compte les tirs et les lancers, les pertes de balles et on retirait les rebonds offensifs, ces derniers étant considérés comme ne donnant pas lieu à une nouvelle possession.

Ici, on considère que la possession du joueur est terminée lorsqu’individuellement il n’a plus la balle : la passe décisive doit donc être prise en compte. Par ailleurs, pour un joueur on considère une nouvelle action après chaque rebond offensif.

A noter qu’une action ne prend en compte que les balles « décisives », c’est-à-dire qui mènent soit à un shoot, soit à une passe ou à une perte de balle. Un joueur ne se voit pas créditer d’une action à chaque fois qu’il joue à la passe à dix.

Pour finir sur cette notion, pour une même équipe, il y a naturellement plus d’actions que de possession durant un match, puisqu’un rebond offensif donne lieu à une nouvelle action.

Le ratio de passes décisives

Considérant maintenant qu’on dispose du nombre d’actions d’un joueur, on peut maintenant étudier ce qu’il en fait.

On peut par exemple le ratio de passes décisives, calculé comme le pourcentage d’actions consacrées aux passes décisives, et donné par

Passes décisives / Actions

Plus il est élevé, plus le joueur joue pour les autres. A titre de comparaison, le joueur au plus fort ratio est Rajon Rondo avec 48.8% cette saison. Ceci signifie qu’à chaque fois Rondo gère la balle « décisive », il réalise une passe décisive quasiment une fois sur deux. Le deuxième est Jason Kidd, avec 46,6%. Encore un joueur qu’on n’est pas surpris de retrouver à ce niveau. Chris Paul est quatrième, avec 40,3%.

Parmi les ailiers, sans surprise on retrouve LeBron James très haut, en deuxième position avec 22,6%. Mais le premier est… Terrence Williams, qui durant les 10 matchs qu’il a joués a eu le temps de bien distribuer la balle et de proposer un ratio de 23.2%.

Pour finir avec les passes décisives, le meilleur distributeur parmi les pivots est … Ronny Turiaf (34,3%), qui semble faire un bon usage de la balle dans les systèmes de Mike D’Antoni. Il faut aussi dire qu’il touche relativement peu la balle. C’est même l’un des pivots de la ligue à toucher le moins la balle ! C’est l’objet de la partie suivante.

L’ « utilisation »

Pour savoir à quelle fréquence un joueur touche la balle, on utilise une statistique appelée « utilisation » (ou usage en anglais). A nouveau, quand on parle d’utilisation, il s’agit de regarder quand le joueur reçoit une balle « décisive », pas simplement quand il fait une passe à 10.

Pour ce faire, on regarde le nombre d’actions rapportées à 40 minutes. Mais pour pouvoir comparer les joueurs de différentes équipes, on rapporte cette valeur au rythme de la ligue : les joueurs des équipes rapides, qui ont donc beaucoup de possessions par match, voient leur « utilisation » corrigée à la baisse, et les joueurs des équipes lentes corrigées à la hausse.

Ainsi, Ronny Turiaf « utilise » 9,6 actions par 40 minutes (52ème parmi les pivots de la ligue), tandis que Dwight Howard, leader parmi les pivots, en utilise 25,7 !

Tous joueurs confondus, c’est Kobe Bryant qui mène le classement, avec 34 actions par 40 minutes, devant Russell Westbrook et Derrick Rose. LeBron James (30,2) et Dwayne Wade (29,2) sont 4ème et 5ème. A titre de comparaison, il y a généralement entre 100 et 120 actions par équipe et par match.

Le ratio de pertes de balle

Le ratio de pertes de balle est exactement identique au ratio de passes décisives : il s’agit du pourcentage de balles perdues par action du joueur.

Qui sont les mauvais élèves de la ligue ? Beaucoup de rookies dans le Top 20 (Mozgov, Erden, Pekovic, Aminu, Bledsoe, Asik) ou de sophomores (Thabeet, Gee, Terrence Williams, DeAndre Jordan). Parmi les moins jeunes, Mbenga domine le classement, accompagné de Chris Duhon ou Samuel Dalembert.

Le ratio de rebonds

Pour finir cet article, interrogeons-nous sur la performance au rebond. Dans ce domaine, on se demande simplement quel nombre un joueur récupère parmi tous les rebonds qu’il pourrait prendre, exprimé sous forme de ratio.

Simple ! Il suffit de comparer le nombre de rebonds pris par un joueur (disponible dans la box-score), et le nombre total de rebonds. Dans un monde idéal, ce nombre serait obtenu directement en comptant le nombre total de rebonds lorsque le joueur est sur le terrain. Mais rappelez vous qu’on part de la box-score, et donc qu’on ne dispose pas de ce niveau de granularité.

La solution, pour rester simplement est donc de comparer le nombre de rebonds pris par le joueur, et calculer le nombre total de rebonds comme la somme des rebonds des deux équipes sur tous les matchs, ramené au nombre de minutes du joueur :

Ratio de rebonds = Rebonds / [ (Rebonds de l’équipe + Rebonds de l’équipe adverse) * Minutes du joueur / Minutes de l’équipe ]

On divise par le nombre de minutes de l’équipe et non systématiquement par 48 pour prendre en compte l’éventualité des prolongations.

Ce ratio peut par la suite être découpé en ratio de rebonds défensifs et offensifs.

Qui sont les rebondeurs les plus efficaces de la ligue ? Pour les rebonds totaux, le trio de tête est Reggie Evans (26,4%), Kevin Love (24,6%) et Marcus Camby (23,1%), devançant Dwight Howard (20,6%). Clairement exprimé, cela signifie que les deux premiers prennent, lorsqu’ils sont sur le terrain, environ 1/4 des rebonds disponibles, ce qui est impressionnant.

Concernant les rebonds défensifs, c’est Kevin Love qui domine (35,7%) devant Evans et Camby. Kevin Garnett se glisse devant Dwight Howard pour la 4ème place. Les rebonds offensifs sont dominés par Evans, devant Gadzuric qui rentabilise ses 10 minutes par match, Javale McGee, Amir Johnson et Kevin Love. Toronto a un front-line puissante au rebond ; collectivement, l’équipe pointe d’ailleurs à la 5ème place de la ligue. Dwight Howard, quant à lui, ne pointe qu’à la 51ème place dans ce domaine !

Conclusion

Le principe général des statistiques présentées dans cet article est la mesure de l’efficacité, dans tous les domaines autres que le scoring. Cela permet de donner une vue relativement précise des performances des joueurs, et, à nouveau, de comparer un joueur passant 35 minutes sur le parquet avec un autre passant 15 ou 20, soit en rapportant les valeurs brutes au nombre de minutes jouées, soit en les rapportant au nombre d’occasions (rebonds, actions, …)

Ce sont généralement des données simples et plutôt intuitives, mais le fan-statisticien y trouvera bien souvent une mine d’or d’information.