À l’occasion de l’exposition « NBA CROSSOVER » qui se déroule à partir d’aujourd’hui jusqu’au dimanche 16 septembre au 71 rue de La-Fontaine-au-Roi, nous avons pu nous entretenir avec Richard « Rip » Hamilton, de passage à Paris. C’est en marge de la soirée d’inauguration, dans un SUV dont les lumières se sont rapidement éteintes, que le champion NBA 2004 nous a reçu. Avec le sourire et plein de sympathie.
On a récemment beaucoup parlé du Hall of Fame pour des raisons évidentes. Vous êtes éligible pour l’intégrer l’an prochain. Quel est votre sentiment à ce sujet ? Pensez-vous que c’est votre place ?
Vous savez ce que je dis aux gens : je n’ai jamais joué pour des objectifs individuels, mon boulot était juste d’essayer de gagner des titres, ce que j’ai réussi à faire à l’université puis en NBA. Et j’ai toujours pensé que si vous gagniez en équipe, de bonnes choses vous arriveraient ensuite à titre individuel. Ce serait un honneur d’être au Hall of Famer, je suis fier de Ray Allen, Jason Kidd, Steve Nash et Grant Hill cette année, je pense que c’est un grand accomplissement pour eux, je pense qu’un jour, je l’espère, j’y serai. Cette année, nous étions déjà dans le scrutin, Chauncey, Ben et moi ! Être avec ses coéquipiers, je pense que c’est la meilleure chose que l’on puisse demander.
Vous avez commencé votre carrière avec Mitch Richmond puis Michael Jordan. Comment était-ce de débuter sa carrière avec l’un des meilleurs arrières de l’histoire puis le meilleur arrière et peut-être le meilleur joueur de l’histoire ?
C’était une chance, surtout quand vous êtes un jeune joueur qui intègre la ligue et essaye de trouver sa voie. Vous avez Mitch dans votre première année puis Michael Jordan qui est président et décide de revenir sur le terrain pour votre troisième année. Je pense que cela a en quelque sorte propulsé ma carrière, juste par le fait que ses gars ont réussi : vous avez Michael Jordan, le plus grand joueur de tous les temps, devant vous et vous pouvez disséquer ce qu’il fait pour devenir l’un des meilleurs arrières de la ligue. Je pense que c’était très bénéfique pour ma carrière.
« La première fois que j’ai vu Michael Jordan, j’étais trop impressionné »
Quelle est l’histoire la plus dingue que vous pouvez nous dire à son sujet ?
Je pense que c’est la première fois que je lui ai serré la main ! Vous savez, c’était le président de l’équipe et quand il est passé dans le vestiaire lors de ma première fois, je me souviens qu’il s’approche et il me lance : « Eh ! Rip Hamilton ! », il commence à parler et la seule chose dont je me souviens, c’est que ça me semblait juste des grommellements ! Il me parlait vraiment mais je ne comprenais pas ce qu’il me disait ! J’étais trop impressionné, c’était comme si j’avais vu un fantôme ! « Mec, c’est Michael Jordan ! »
J’ai entendu qu’au début, il ne voulait pas que vous portiez de Jordan…
Ce n’est pas qu’il ne voulait pas me signer mais tous les jours, il venait au vestiaire avec plein de Air Jordan différentes, les plus récentes, les plus classes et un jour, je lui dis : « Tu devrais m’intégrer à ta Jordan team ! » Et il était là, du genre, « mes chaussures sont pour les All-Stars et les gars qui veulent des titres » ! J’étais dans ma deuxième année, je n’avais rien à répondre à ça parce que je n’étais pas un All-Star, j’essayais simplement de me faire un nom mais j’ai compris ce qu’il voulait dire et j’ai compris qu’il me fallait gagner un titre et devenir un All-Star. Et je n’oublierai jamais mon titre avec Detroit, c’est la première personne à m’avoir appelé et il m’a dit : « Rip, je suis avec toi, tout ce dont t’as besoin, tu l’auras. Tu as fait exactement ce que je t’ai demandé de faire et maintenant, tu es un athlète Jordan Brand ».
« Avec Detroit, nous avons joué le basket comme il faut le jouer »
Parlons de Detroit justement. Vous avez fait partie de ce qui est peut-être l’une des meilleures équipes de l’histoire en termes de collectif et d’esprit d’équipe. Êtes-vous fier de l’image que vous avez montré avec ces Pistons ?
Je suis très fier de cette équipe. Nous avons joué le basket comme il faut le jouer. Si vous êtes un fan de basket, que vous aimez ce sport et ses fondamentaux, vous savez que c’est comme ça qu’on a joué, sous les ordres d’un grand coach, Larry Brown. Et je l’ai fait avec un groupe de gars qui… On aurait tous pu facilement tourner à 25 points par match, on aurait tous pu le faire ! Mais nous savions qu’on ne pouvait pas gagner un titre comme ça. On savait qu’il faudrait faire des sacrifices pour battre les meilleures équipes et gagner un titre, et c’est ce qu’on a fait.
Pensez-vous que vous auriez pu gagner encore davantage ? Surtout si vous aviez drafté Carmelo Anthony à la place de Darko Milicic ?
On aurait pu gagner plus mais nous sommes chanceux d’en avoir déjà eu un. Nous avons perdu contre San Antonio, nous avons fait six finales de conférence consécutives et je regarde toujours le fait que certains des meilleurs joueurs de ce sport n’en ont jamais gagné un ! Carmelo n’a jamais gagné un titre, Charles Barkley, John Stockton, Steve Nash, et ce sont des Hall of Famers ! Donc j’apprécie simplement d’en avoir gagné au moins un.
Je me souviens que vous parliez d’un retour au jeu il y a deux ans. Pourquoi n’avez-vous pas poursuivi ? N’aviez-vous eu aucun retour positif ?
Non, ce n’est pas ça. J’ai vraiment essayé de revenir mais il s’agissait vraiment de la manière dont mon corps répondait. J’ai joué une longue carrière avec beaucoup de matchs de playoffs. Et les gens ne comprennent pas qu’un match de playoffs équivaut à trois matchs de saison régulière, juste à cause du niveau d’intensité, du niveau de concentration portée sur les détails et du volume de minutes jouées. J’ai donc pensé à revenir mais je n’ai pas réussi à ramener mon corps à un niveau où je pouvais me sentir moi-même. J’aurais pu revenir et être un role player mais ce n’était pas mon état d’esprit quand je suis entré dans la ligue et je ne pouvais pas me résoudre à penser comme ça.
« J’adore la situation actuelle du basket »
Est-ce que le jeu vous manque toujours ?
Oui ! La chose qui me manque le plus, c’est le vestiaire ! La camaraderie, la proximité des joueurs, sortir, vous voyez ce que je veux dire. Les entraînements ne me manquent pas, la glace sur les genoux ne me manque pas, tout ça, non. Mais ça me manque vraiment de ne plus être aux côtés des gars.
Pensez-vous à la Big 3 ?
Vous savez quoi, j’y ai pensé ! On verra. Mon gars Chauncey m’en parlait hier [mercredi, les deux étaient à Londres], il y a joué les deux dernières saisons… On verra, on ne sait jamais.
Que pensez-vous du jeu d’aujourd’hui ? Il y a beaucoup de tirs à trois-points, peu de jeu à mi-distance qui était votre type de jeu… Que pensez-vous de cette évolution ?
Aujourd’hui, on a certains des meilleurs shooteurs de l’histoire devant nous. J’adore la situation actuelle de notre basket, c’est plaisant. J’étais un scoreur donc j’aime voir beaucoup de points. En revanche, je ne pense pas que tout le monde sache shooter à trois-points. C’est une ligue qui se copie beaucoup donc quiconque gagne le titre, tout le monde essaye ensuite de jouer de cette façon. En 2004, quand nous avons gagné, tout le monde a essayé de jouer comme nous. À San Antonio par exemple, de la défense, de la dureté, de l’alternance extérieure-intérieure… Aujourd’hui, c’est juste une ère différente mais je pense vraiment que les gamins qui veulent durer et être efficaces, que ce soit en NBA mais aussi au lycée ou à l’université, doivent maîtriser le jeu à mi-distance.
« Manu et Boris ont eu une carrière immense »
Je me souviens que vous souhaitiez intégrer le staff ou le front-office des Pistons. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Je pense qu’un jour, je pourrai occuper une position de dirigeant. Ça serait sympa. Vous savez, à chaque fois que vous rentrez dans une salle NBA, vous êtes excité. Je reste un gosse. J’aime ce sport et si tout va bien, peut-être quand mes enfants seront plus vieux, ça pourrait être une possibilité.
Quand vous n’êtes pas en tournée avec la NBA, comment vous occupez-vous ?
Je m’occupe de mes enfants justement. Je reste consultant avec les chaînes du groupe Turner donc je garde un petit pied, je reste actif avec le basket. J’aime ça.
Pour conclure, nous avons deux grands joueurs qui ont récemment décidé de partir à la retraite : Manu Ginobili et notre Boris Diaw national. Vous qui connaissez déjà l’après-basket, avez-vous un mot pour eux ?
Mon gars, je suis juste… Manu était l’un des plus grands compétiteurs de notre époque si l’on parle de basket. J’ai vécu tellement de batailles contre lui… Je suis heureux pour lui, pour sa famille. Il a eu une carrière de Hall of Famer. C’était l’un des adversaires les plus coriaces contre lequel j’ai joué. Boris Diaw, waouh ! Quand il est arrivé dans la ligue, c’était un meneur puis il a ensuite évolué en tant qu’ailier-fort, c’était un winner, un grand coéquipier, un super mec, surtout ! Ces deux gars ont eu une carrière immense.
Crédit photo : Catherine Steenkeste / NBAE