Maintenant que les Jeux Olympiques sont terminés, il est temps de tirer un bilan de l’équipe de France masculine. Éliminée en quart de finale face à son historique bête noire, elle n’a jamais montré un niveau rassurant lors de cette compétition. Préparé à la retraite de trois de ses cadres, Tony Parker, Mike Gelabale et Flo Piétrus, ce groupe a livré un tournoi sans éclat, ni enthousiasme. Pour TP, la prise de pouvoir de Nando De Colo n’a pas été simple à gérer, tout comme les négociations de contrat de certains NBAers qui avaient, selon lui, peut-être « la tête ailleurs ».
MENEURS |
Tony Parker : 13.2 pts à 51.2%, 30.8% à 3-pts, 1.2 rbd, 3.8 pds, 1 int en 23 min
L’aventure en équipe de France est finie pour Tony Parker, officieusement le meilleur joueur de notre histoire. Ce dernier tournoi olympique ne s’est pas déroulé conformément à ses attentes, et les nôtres mais à 34 ans, le meneur des Spurs n’a pas grand chose à se reprocher sur cette compétition. Face à l’Australie et l’Espagne, nos deux plus grosses défaites, c’est lui qui a maintenu les derniers espoirs de la sélection. Bon face à nos adversaires les plus faibles, il n’a en revanche pas pu s’offrir une dernière confrontation face à Team USA. Certains lui reprocheront son tir à trois-points décisif face à la Serbie, l’histoire ne peut être réécrite et rien ne dit que la sélection aurait fait mieux dans un autre quart de finale. Pour lui, ce n’est pas la sortie rêvée mais sur cette compétition, il a fait de son mieux. N’oublions pas d’ailleurs que l’équipe de France ne serait peut-être pas allée au J.O. sans sa finale de feu contre le Canada.
Thomas Heurtel : 9.7 pts à 59.1%, 38.5% à 3-pts, 3.2 rbds, 4.5 pds en 19 min
Pour le Biterrois, ce premier tournoi olympique est globalement satisfaisant : hormis ses balles perdues face à l’Australie, ses difficultés contre les Serbes et la débâcle générale face à l’Espagne, le meneur a su répondre présent, notamment dans le match sans enjeu face à Team USA. Une chose est sûre : Thomas Heurtel fait partie de ces joueurs qui doivent bénéficier de responsabilités (et d’une place dans le cinq de départ) pour imprimer sa patte. On peut regretter ses difficultés à s’adapter mais il n’est pas seul dans ce cas. Il a prouvé tout au long de la saison en Euroleague, puis au TQO, qu’il pouvait être un meneur d’envergure et à terme, s’il a les clefs de l’équipe de France à la mène, il pourra davantage faire profiter de sa très belle vision de jeu et son bras fiable. Malgré son jeu à risques, il devra en revanche modérer ses pertes de balle, parfois trop nonchalantes à ce niveau.
Antoine Diot : 4.3 pts à 38.9%, 40% à 3-pts, 1 rbd, 1 pd en 11 min
Si précieux lors des campagnes 2013 et 2014 et même en 2009 à l’Eurobasket, Antoine Diot n’a pas répondu présent cette année. Très déçu de son forfait à la dernière minute pour l’Euro 2015, on l’attendait revanchard mais le meneur de Valence n’a pas eu de rendement positif dans l’organisation du jeu, ni en défense. Aussi talentueux soit-il (n’oublions pas qu’il était l’un des meilleurs juniors de sa génération et un grand espoir avant ses problèmes de dos), Antoine Diot devra montrer autre chose par la suite pour prétendre à la place de deuxième meneur car la concurrence est là.
EXTÉRIEURS |
Nando De Colo : 14.7 pts à 59.6%, 38.5% à 3-pts, 2.5 rbds, 2.5 pds, 1.3 int en 24 min
S’il fut l’un des rares Français au niveau en quart face à l’Espagne, son coup reçu en première mi-temps l’a clairement sorti du match le plus important de l’équipe de France. Meilleur scoreur de ce groupe France, Nando De Colo a fait le travail sans pour autant montrer l’aura de sa dernière campagne à l’Eurobasket et d’Euroleague. D’une part, il est clair que le partage de responsabilités au sein d’un cinq dont au moins trois joueurs ont besoin de la gonfle pour s’exprimer ne l’aide pas et d’autre part, il a besoin d’un vrai collectif pour montrer son meilleur visage. Or, s’il a fait de son mieux pour trouver des positions dans le jeu sans ballon, s’il a amené des fulgurances en percussion, Nando De Colo n’avait pas, cette année, les conditions nécessaires à un meilleur rendement. Étrangement, il semblait d’ailleurs dans de meilleures dispositions au TQO, au sein d’un groupe peut-être plus équilibré. Maintenant qu’il a 29 ans, l’équipe de France doit désormais s’appuyer sur lui et lui offrir le meilleur environnement possible pour qu’il maintienne la sélection au haut niveau.
Nicolas Batum : 7 pts à 45.5%, 41.2% à 3-pts, 2.8 rbds, 2 pds, 1 int en 23 min
À la sortie d’une belle campagne NBA, récompensée par le plus gros contrat de l’histoire pour un Français, on attendait forcément Nicolas Batum à son meilleur niveau. Déjà transparent lors de sa reprise au TQO, il fut complètement fantomatique lors de ces Jeux Olympiques. Offensivement, Nicolas Batum ne s’exprime plus en FIBA que par son seul shoot à trois-points : victime d’un dribble lacunaire et des espaces plus étroits, l’ailier des Hornets ne va plus au cercle, sinon à de trop rares instants lignes de fond. Plus grave encore, sa défense était aux abonnés absents lors de ce tournoi. Déjà erratique lors de l’Euro 2015, il s’est montré inutile lors de ces J.O. Visiblement frustré par son rôle (dixit Tony Parker), peut-être pas au mieux physiquement, il n’a en revanche pas d’excuse sur son manque d’investissement général sur le terrain.
Mike Gelabale : 6.5 pts à 51.9%, 42.9% à 3-pts, 2.2 rbds en 15 min
Malgré une carrière en club énigmatique, Mike Gelabale a toujours été l’un des tauliers de cette équipe de France. Bon lors du TQO, l’ailier du Mans fut l’un des rares à surnager face à l’Australie mais la suite de son tournoi a été plus compliquée pour lui. Au regard de sa production et celle de Nicolas Batum, Vincent Collet aurait peut-être gagné à inverser leurs rôles et replacer Mike Gelabale dans le cinq. Malgré tout, ce dernier reste très fiable au shoot sans avoir besoin de porter le ballon. Et même s’il n’est plus le défenseur d’antan, l’équipe aurait sans doute été plus équilibrée. Comme Tony Parker, Mike Gelabale quitte l’équipe de France avec un superbe palmarès et il restera à jamais comme l’un des joueurs européens les plus élégants de sa génération sur la scène internationale.
Charles Kahudi : 2 pts à 41.7%, 3.5 rbds en 10.3 min
Joker défensif préféré des Bleus depuis trois campagnes, Charles Kahudi n’a pas eu l’influence espérée dans ce domaine. Étrangement, son âme de guerrier a semblé s’éteindre dans ce groupe où aucune flamme ne s’est jamais vraiment allumée. Limité offensivement à ce niveau, le joueur de l’ASVEL fut négligeable sur ce tournoi.
INTÉRIEURS |
Boris Diaw : 8.3 pts à 47.5%, 30% à 3-pts, 4.2 rbds, 4.7 pds en 26 min
Plus gros temps de jeu de l’équipe de France, Boris Diaw a aussi été l’un des joueurs les plus actifs sur le terrain. Même si, une nouvelle fois, les matchs ne comptaient pas, ses performances face à la Serbie et Team USA ont confirmé que notre capitaine pouvait rivaliser avec les meilleurs, motivé. Si le reste du groupe n’a pas suivi son sillage, Boris Diaw n’a cette fois jamais hésité à s’investir au scoring et cette année, la sélection en avait bien besoin. Si ses coéquipiers de toujours s’en vont, lui a décidé de rester : une très bonne nouvelle pour la vie du groupe France.
Rudy Gobert : 5.7 pts à 45.5%, 7.2 rbds, 1.8 ct en 20 min
C’est l’autre déception majeure de cette année avec Nicolas Batum : volontaire en défense, mais encore naïf et loin d’être au niveau qu’il a parfois revendiqué, Rudy Gobert s’est surtout effondré en attaque où ses lacunes n’ont jamais été aussi flagrantes. Dominé dans l’impact physique, en difficulté même près du cercle, il a aussi montré beaucoup de problèmes dans la réception des passes. Si les négociations de son contrat n’ont probablement pas gonflé sa confiance, ce tournoi ne l’aidera pas à toucher le jackpot. Pour devenir l’un des meilleurs joueurs à son poste, au moins dans le contexte FIBA, Rudy Gobert a encore beaucoup de travail à fournir.
Joffrey Lauvergne : 9.2 pts à 52.7%, 4.2 rbds en 18 min
Difficile de juger l’intérieur des Nuggets sur ce tournoi tant son positionnement au poste de pivot ne l’a pas aidé. Physiquement, Joffrey Lauvergne a énormément souffert et c’est sans doute au poste 4 qu’il se serait le mieux exprimé. Néanmoins, après une grosse période de doute, il a progressivement retrouvé la confiance et un peu d’adresse. Défensivement, face à des joueurs lourds et souvent techniques, il a cependant galéré. On a hâte de le retrouver dans ce groupe en tant qu’ailier-fort, associé à un pivot.
Kim Tillie : 2.6 pts à 40%, 1.4 rbd en 10 min
Peu responsabilisé, Kim Tillie a souvent erré sur le tournoi mais petit à petit, il a su mettre son temps de jeu à profit pour montrer de belles choses, notamment dans l’engagement défensif, un secteur où on ne l’attend pas spécialement. Son positionnement pose également problème à ce niveau mais il a les moyens pour intégrer durablement la sélection dans un rôle de troisième rotation intérieure.
Flo Piétrus : 0.8 pt à 40%, 0.7 rbd en 8 min
Troisième cadre de l’équipe de France à tirer sa révérence, Flo Piétrus a disputé la campagne de trop. Dépassé dans tous les secteurs de jeu, il n’a même pas pu amener sa hargne habituelle. À 35 ans, dans le contexte d’un tournoi que les vétérans ont gagné le droit de disputer de par leurs engagements passés, il est difficile de reprocher quoi que ce soit à l’un des meilleurs intérieurs de l’histoire de ce groupe.
LE COACH : VINCENT COLLET |
Pour l’entraîneur de l’équipe de France, cette dernière compétition est sans doute la grosse tache de sa carrière. Lors du TQO, nombre de balbutiements pouvaient s’expliquer par la période précoce de cette compétition mais le fait est que la sélection n’est jamais montée en régime. Le tournoi en Argentine fut des plus laborieux et lors de ces Jeux, les acquis des expériences passées ont semblé perdu : pas de fond de jeu, pas d’agressivité et une médiocrité défensive inédite.
Face à la perspective d’un tournoi « jubilé », Vincent Collet a t-il pu travailler dans de bonnes conditions, piquer son groupe au vif, dont ses cadres, pour les remettre en question ?
La volonté collective de conclure dans un apaisement consensuel n’aidera pas à obtenir les réponses mais l’abattement fataliste du tacticien en première mi-temps lors du quart laisse penser qu’il n’y a pas eu de discours de la dernière chance dans les vestiaires. Cette année, le coach n’avait peut-être pas plus à tirer de ce groupe.