La NBA a modifié quelques-unes de ses règles pour lui. Les Wizards ont changé le plan de leur salle afin de l’éloigner. Michael Jordan l’a visé avec un ballon, Isiah Thomas avec une chaussure. Les Warriors lui ont renversé un seau de Gatorade sur la tête et l’ancien coach de Utah, Frank Layden, lui a craché dessus…
Cet homme qui rendait fou toute la NBA, c’est Robin Ficker. Ce nom ne vous dit peut-être rien mais ce fan des Bullets, qui deviendront les Wizards, terrorisait pourtant la ligue dans les années 1990.
Il a fait péter les plombs à Jordan, Thomas, Barkley…
Assis derrière le banc des adversaires des Bullets, entre 1985 et 1997, il passait ses matches à crier après les joueurs de l’équipe opposée. Brillant avocat de son état, il se démarquait néanmoins en ne proférant jamais d’insulte. Son secret, c’était de se renseigner sur les joueurs et de les distraire avec ce qui pouvait les agacer. Trouver leur “chambre 101” en quelque sorte et leur parler jusqu’à ce qu’ils n’en peuvent plus…
“Normalement, je pouvais faire abstraction de tout le monde parce que j’étais vraiment très concentré”, explique Isiah Thomas lors de leurs retrouvailles récentes. “Mais il avait une voix et un talent particuliers. Il devait beaucoup se renseigner parce qu’il attrapait toujours mon attention au moment où j’allais tirer mon lancer franc. Ça touchait quelque chose en moi”.
Et l’ancien “Bad Boy” n’est pas le seul. Frank Layden a essayé de venir le frapper lorsque Robin Ficker lui a lu un article d’USA Today, dans lequel on décrivait l’ancien coach du Jazz comme le coach le moins bien habillé de NBA. Lewis Loyd s’est fait expulser lorsqu’il lui a rappelé qu’il ne payait pas les pensions pour ses enfants. Shaquille O’Neal a piqué une colère lorsqu’il lui a chanté certains de ses morceaux de rap, changeant « I’ve got skills » (« J’ai du talent ») par « You’ve got bills » (« Tu as de l’argent »). Phil Jackson a lui aussi perdu son calme quand Robin Ficker a commencé à lire des extraits de son autobiographie, “Maverick”.
“Phil Jackson m’a dit qu’il allait appeler les arbitres pour m’empêcher de lire”, expliquait-il. “Je ne comprends pas ce qui l’a énervé. S’il ne voulait pas entendre les passages de son livre, il n’avait qu’à pas l’écrire”.
Ce génie du trolling rendait même fou Michael Jordan. Lorsque ce dernier rendait visite aux Bullets, Robin Ficker lui lisait ainsi des passages peu flatteurs du livre “The Jordan Rules” lorsqu’il rejoignait le banc. Il l’appelait également “Hair Jordan” à cause de son crâne chauve, ce à quoi “His Airness” répondait en se caressant la tête lorsqu’il marquait. Lors de la finale 1993, Charles Barkley a même offert à Robin Ficker des places derrière le banc de Chicago pour énerver les Bulls.
Invité aux finales 1993 par Charles Barkley pour déconcentrer Michael Jordan !
Il est alors arrivé avec un jeu de cartes, taille XXL, des jetons et des billets. Pendant le match, pour se moquer des problèmes de jeu de Michael Jordan, l’avocat lui a ainsi tiré cinq cartes en lui demandant s’il voulait être resservi. Alors qu’il se repliait en défense, « His Ainress » lui a tranquillement répondu avec la main, lui demandant trois nouvelles cartes…
Le fan ne terminera néanmoins pas la rencontre au bord du terrain et se fera expulser par la sécurité de la salle, au grand désespoir de Charles Barkley, qui a toujours respecté celui qui l’énerva pourtant souvent. Lorsqu’il était aux lancers, Robin Ficker lui lisait par exemple le descriptif de l’hamburger dont il faisait la promotion chez McDonald’s : “Deux steaks de boeuf, une sauce spéciale, de la salade, du fromage, des cornichons, des oignons et du pain au sésame !”
Et alors que Charles Barkley déclarait vouloir devenir gouverneur de l’Alabama après sa retraite, l’avocat lui posait des questions sur l’économie, la sécurité sociale et l’accord de libre-échange nord-américain. Agacé, Charles Barkley avait un jour pris la pancarte du fan en inscrivant dessus, au feutre : “Mon nom est Robin et je suis attardé”. Une autre fois, alors que Robin Ficker lui criait une énième question sur l’économie, Sir Charles lui dit : “J’ai par contre un avis sur la peine de mort. Il devrait l’utiliser sur vous !” L’intérieur lui donna néanmoins deux ballons utilisés en match pour le féliciter de son inventivité.
Les Wizards modifient leurs plans de la salle pour lui…
Mais ce ne fut pas le cas de tout le monde. La ligue modifia ses règles pour expulser les fans à la demande des joueurs et des coaches suite aux réactions provoquées par Robin Ficker. Et lorsque les Bullets devinrent les Wizards et changèrent de salle en 1997, la direction de la franchise changea les plans pour placer des personnes handicapées derrière le banc de l’équipe adverse, relocalisant Robin Ficker derrière le panier.
Immédiatement, celui-ci résilia son abonnement et décida de ne plus jamais venir voir les Wizards. Certains furent évidemment soulagés, d’autres déçus. À l’image de Chris Webber, qu’il avait pourtant rendu également dingue lorsque l’intérieur venait à Washington en début de carrière avec les Warriors en appelant un temps mort à chaque fois qu’il touchait le ballon. Rappel évident de l’épisode à Michigan.
“Il fait partie des Bullets”, expliquait Chris Webber en 1997. “Il ne nous hue pas, comme d’autres fans ici. Avec tous les autres fans qui viennent ici pour nous huer, je préfère avoir Ficker”.
Mais tout le monde n’était pas de cet avis.
“Il va un peu me manquer”, concédait de son côté Reggie Miller. “Mais il y a probablement beaucoup de gars qui seront très contents de ne plus le voir. C’est dur de lui répondre parce qu’il crie en permanence”.
Désormais âgé de 70 ans, Robin Ficker n’a plus assisté à un match NBA depuis 1997. Il se consacre à sa carrière politique, lui qui fait aujourd’hui du porte-à-porte dans le Maryland pour obtenir un poste au Sénat américain. Et il n’en oublie pas de rendre fou les adversaires des lutteurs de l’université de Maryland.