Si j’aime tellement le sport en général, et le basket en particulier, c’est parce que tout s’y mêle et et s’y rejoint. Ce matin, en lisant une interview de Gregg Popovich dans le San Antonio Express News, j’ai ainsi repensé à un livre qui m’a profondément marqué.
De la liberté, d’Epictète.
Grossièrement, ce philosophe grec du IIe siècle explique que la liberté n’est pas un état inné, qu’elle est le fruit d’un effort sur soi-même qui demande de la patience et du travail. Quel lien entre l’entraîneur des Spurs et un penseur poussiéreux ? Cette simple idée, à travers les siècles, qu’il faut créer sa liberté.
Apprendre à être libre…
Tout commence avant le match entre Cleveland et San Antonio. Mike Brown, ancien assistant de Gregg Popovich, explique qu’il ne veut pas que ses joueurs développent une attaque “rigide” mais qu’ils “jouent simplement au basket”. Il assure que les Spurs sont les meilleurs dans ce domaine, ce qui amène son ancien mentor à se confier de façon extrêmement intéressante sur sa philosophie de jeu.
“Il faut pénétrer non seulement pour soi, mais aussi pour son coéquipier”, explique le coach. “Il faut pénétrer parce que ça crée quelque chose. Peut-être pour moi, peut-être pour un coéquipier. Peut-être après la passe qui suivra ma passe. Lorsqu’ils réalisent ça, les joueurs trouvent un rythme et ils commencent à jouer au basket au lieu de jouer un système où les décisions seront prises à l’avance”.
Cette nuit, les Spurs ont encore donné une leçon à leurs adversaires. 43 paniers réussis dans le match pour Tony Parker et compagnie… et 39 passes décisives ! Pour Gregg Popovich, c’est le fruit d’un travail quotidien, d’un boulot incessant pour rappeler à ses joueurs cette philosophie, pour leur inculquer cette volonté de partager le ballon et de s’appliquer en permanence pour, paradoxalement, être plus libres dans leur jeu.
“Parfois, lors des temps morts, je leur dis que je n’ai rien à leur dire. Qu’est-ce que je peux faire ? On vient de perdre le ballon six fois. Personne ne le fait bouger. Qu’est-ce qu’ils veulent que je fasse ? Qu’ils se débrouillent. Et je m’en vais. C’est vrai, je ne peux rien faire pour eux dans ces cas-là. Je peux leur raconter des conneries, leur faire croire que je coache mais ça ne dépend finalement que d’eux”.
…et à ne pas faire n’importe quoi
À San Antonio, on s’approche toujours plus de cette liberté chérie. Avec ce groupe façonné depuis des années, Gregg Popovich parvient petit à petit, par le travail, à ce que ses hommes “jouent simplement au basket”. C’est aussi l’idéal de Mike Brown à Cleveland mais ce n’est pas gagné. Il suffit de se rappeler des déclarations d’Andrew Bynum pour comprendre que cette philosophie n’est pas toujours comprise.
Alors que le coach des Cavaliers essayait de développer une approche libre de l’attaque, le pivot se plaignait lui du nombre de possibilités, expliquant qu’il était perdu dans cette trop grande liberté.
Car le but, ce n’est pas d’offrir une pleine liberté aux joueurs pour qu’il fasse n’importe quoi. Le but, c’est qu’il comprenne qu’ils peuvent être libres, à condition qu’ils tendent vers le meilleur. Pour Gregg Popovich, c’est le « good-to-great » : une volonté de toujours chercher le tir ultime.
« Il y a beaucoup de bons tirs mais si on peut les transformer en très bons tirs, on explose les pourcentages. Les tirs contestés sont très mauvais. Le pourcentage de réussite baisse alors de près de 20%, presque sans exception. Ce sont des choses qu’un coach essaie de développer. Ça prend du temps pour le faire accepter et le faire comprendre à tout le monde ».
Mais lorsque c’est le cas, cette philosophie peut donner des choses comme ça.