Avec 8 points, 3 rebonds et 2 passes de moyenne, Isaac Okoro ne produit certes pas des statistiques qui vous feront tourner la tête.
Mais au-delà de ses chiffres individuels, et de ceux de son équipe au fond du classement à l’Est avec 17 victoires pour 29 défaites, la saison rookie du jeune arrière des Cavs est pour le moment une vraie réussite, à ses yeux. Car l’ancien d’Auburn joue : c’est aussi simple que ça !
L’homme des missions défensives
À tout juste 20 ans, Isaac Okoro a pour objectif principal cette saison d’emmagasiner les minutes et l’expérience.
« L’idée, c’est en gros de le donner aux lions », affirme JB Bickerstaff sur Cleveland.com. « On l’a mis au défi de défendre sur les meilleurs joueurs de la planète et tu n’apprends ça qu’en en ayant l’opportunité. C’est très bien de commencer si jeune et de ne pas attendre davantage. Si tu attends trop, les attentes changent. Ses attentes pour sa carrière à partir de maintenant, c’est qu’il va défendre sur le meilleur joueur extérieur adverse. Il doit être prêt pour ce défi. »
Choisi en n°5 lors de la dernière Draft, Issac Okoro n’était pas forcément censé entrer dans le cinq majeur aussi rapidement, mais pour son coach, sa place y est méritée aux côtés de Collin Sexton et Darius Garland, les deux arrières du futur pour Cleveland.
« Isaac a gagné sa place en complément de Darius et Collin. Ses qualités défensives lui ont fait gagner sa place parce qu’il complète bien ces gars-là. Il nous a énormément rassurés et on sait qu’on peut compter sur lui. Il fait toutes les petites choses qui rendent le jeu facile. »
Avec ces trois jeune loups aux dents longues, tous trois âgés entre 20 et 22 ans, les Cavs espèrent bien avoir trouvé leur ligne extérieure du futur. Comme Collin Sexton, Isaac Okoro est originaire de Géorgie. Pour le « Young Bull », l’ajout de ce rookie, même s’il vient du rival Auburn, est forcément une bonne nouvelle.
« Il est dur. Il sait ce que l’on attend de lui. Il accepte volontiers de défendre sur le meilleur attaquant adverse. Il sait que c’est son truc. Depuis que je le connais [à l’école primaire], peu importe ce que le coach va lui demander, il va le faire. C’est le type d’individu qu’il est. Il va au combat chaque soir et il se donne sans compter. Il est d’Atlanta, il va jouer peu importe ce qui se passe autour. »
Les deux hommes se connaissent donc depuis un moment et ils se sont retrouvés avec joie et bonne humeur au sein des Cavs. Dans sa troisième année en NBA, Collin Sexton a logiquement pris Isaac Okoro sous son aile protectrice, les deux joueurs ayant pris l’habitude de faire des sessions vidéo supplémentaires lors des déplacements en avion.
Parfois aux dépens du sommeil du rookie… mais c’est pour son bien !
« Il est largement au-dessus du lot chez les rookies en termes de préparation vidéo. Je ne sais pas d’où ça lui vient mais il avait ça avant même d’arriver chez nous », s’enthousiasme Greg Buckner, ancien joueur NBA et assistant chez les Cavs. « Le rook’ n’a que 20 ans mais les questions qu’il nous pose sont déjà bien au-delà de son expérience. Il a beaucoup de choses à gérer déjà, mais c’est pour ça qu’il était 5e choix. Je crois qu’il en a conscience. Il veut être un grand joueur et il veut relever ce défi. »
Un futur « défenseur d’élite »
Déjà très bon dans son analyse des différentes situations qu’on lui montre à la vidéo, Isaac Okoro est également un élève studieux, renvoyant parfois des clips auxquels il attache des questions aussi précises que pertinentes.
« On demande beaucoup à ce gamin de 20 ans. Nous, les coachs, la franchise et les fans, on doit en avoir conscience », reprend Coach Bickerstaff. « Le plan est qu’il progresse plus rapidement en emmagasinant cette expérience tôt dans sa carrière. On pense vraiment qu’Isaac peut devenir un défenseur d’élite pour longtemps dans cette ligue. Mais il faut passer par ces expériences. On en verra les effets sur le long terme mais pour le moment, ça ne le perturbe pas vraiment. »
Opposé à des cadors, des All-Stars en puissance comme Jaylen Brown, Zach LaVine ou encore DeMar DeRozan et Jimmy Butler soir après soir, Isaac Okoro apprend la NBA à la dure. Il se fait régulièrement balader sur des dribbles croisés, il doit se cogner (littéralement et figurativement) une tonne d’écrans à chaque match, et il concède forcément beaucoup de fautes sur des feintes ou des attaques directes vers le cercle. Mais le rookie ne se défait pas de sa bonne humeur.
Il a évidemment des coups de moins bien par moment, mais il développe peu à peu sa mentalité de défenseur féroce, que rien ni personne ne peut venir perturber.
« On voit sa résilience et c’est ce qui fera qu’il aura du succès sur le long terme », confirme JB Bickerstaff. « Il a la mémoire courte et pour être un bon défenseur dans cette ligue, c’est comme de jouer quarterback, tu te fais intercepter mais tu ne peux pas baisser la tête et laisser ça influencer les possessions suivantes. Il n’y a eu aucun problème car Isaac a cette force mentale et cette dureté dans son approche. Il a une manière assez incroyable de passer rapidement à autre chose. C’est très rare chez les jeunes joueurs. »
Récemment, en l’occurrence, il s’est coltiné Jamal Murray quand ce dernier a scoré 50 points à 84% de réussite aux tirs. Sur ce coup-là, Isaac Okoro est à moitié pardonné car il a été mis en défense sur l’archer canadien qu’une fois qu’il était déjà à 20 points marqués…
Face à LeBron James, le rookie n’a pas pu faire grand-chose non plus, avec « King James » qui a terminé à 46 points, son record de saison. « Ces gars-là ne sont pas comme ceux que tu as déjà croisés. La définition d’arrêter ces scoreurs est un match à 20 points, au lieu des 35 qu’ils sont capables de rentrer », atténue Coach Bickerstaff. « On essaie de l’aider à tempérer ses attentes. Il va progresser parce qu’il est complètement investi et il a la volonté d’y travailler. »
L’apprentissage « mental » de la Grande Ligue
Évidemment pas habitué à se faire maltraiter de la sorte, Isaac Okoro apprend à ne pas baisser la tête, à ne pas trop se poser de questions et à ne pas se morfondre. Après ce type de performances éprouvantes, aussi bien physiquement que mentalement, le rookie des Cavs a un entourage qui lui permet de garder son équilibre, et les idées bien en place.
« Je suis vraiment fier d’Isaac », ajoute Darius Garland. « Il a très bien géré tout ça. Il n’obtient probablement pas les résultats auxquels il s’attendait mais il tient plutôt bien défensivement face à tous ces gars. On l’a jeté au feu. On l’a balancé dans la forêt avec une meute de loups qui lui courent après. J’admire vraiment son éthique de travail. C’est un battant, j’adore ça chez lui. »
Pas du genre à se plaindre, Isaac Okoro prend au contraire ces « missions impossibles » en défense comme autant de défis personnels, pour progresser et grandir d’autant plus vite.
« C’est frustrant quand tu sais que tu as bien défendu mais qu’ils arrivent quand même à rentrer des tirs difficiles. Je définis le succès par la victoire », relate-t-il. « Je pense que j’ai bien progressé. J’ai beaucoup appris sur la position de mes mains, et puis sur les écrans NBA, qu’il faut être capable d’éviter. Tu joues face aux meilleurs du monde donc il faut rester concentré à chaque match. Mon moment préféré [jusqu’à présent] est simplement de défendre sur les meilleurs joueurs. Avoir ce duel et défendre sur ces joueurs, c’est tout ce dont j’ai toujours rêvé. »
Mis à l’épreuve défensivement au quotidien pour ainsi dire, Isaac Okoro est conscient que c’est pour le moment sa carte de visite. Mais le rookie voit plus loin. Les Cavs également. Ils veulent en faire un joueur complet, un joueur dominateur des deux côtés du terrain, qui peut se montrer décisif aussi bien sur une interception ou un contre que sur un tir au buzzer ou des lancers en fin de match.
« Il est très important, une pièce fondamentale », reprend Greg Buckner. « Il peut jouer des deux côtés du terrain. Il a un caractère incroyable. Il va toujours faire les choses comme il faut. Avec lui, tu n’as pas besoin de te tracasser pour savoir s’il va faire des bêtises hors des terrains et entacher sa réputation, celle de sa famille ou celle de la franchise. »
En chantier offensivement
Offensivement, Isaac Okoro a encore énormément de marge. Cette saison, il ne fait qu’effleurer son potentiel. Pour son mentor dans le staff de Cleveland, il doit d’abord avoir une prise de conscience et se rendre compte qu’il peut faire plus. Il ne doit pas simplement être spectateur, mais acteur à temps plein, quand il entre sur les planches.
« Il doit être plus agressif. Il apprend encore à jouer le jeu NBA et il essaye encore d’être le plus altruiste sur le terrain. Mais parfois, il ne regarde même pas le cercle. On sait qu’il doit devenir un meilleur shooteur pour devenir un bon joueur des deux côtés du terrain. On a déjà bien bossé sur son tir. À l’avenir, je pense qu’il peut devenir un joueur exceptionnel, un des meilleurs des deux côtés du terrain. »
À ce propos, Greg Buckner ne voit pas d’inconvénient majeur à la gestuelle du rookie passé par Auburn. Certes pas réputé pour la qualité de son tir extérieur (pas encore du moins), Isaac Okoro a des fondamentaux sains. Son geste n’est pas problématique et c’est là un très bon début.
« Personne n’a un geste de tir parfait. Tu dois simplement perfectionner ton tir. Il veut toujours progresser. Il vient à la salle après que tout le monde soit parti. Il va devenir un shooteur à 40% à 3-points. Les fondations sont bien en place, il a tous les éléments, tous les outils. Il a simplement besoin d’ajustements mineurs, et puis il faut de la confiance en attaque. Je pense qu’il doute encore un peu parfois. On espère qu’il pourra devenir un joueur proche du All-Star Game et que notre équipe sera dans la course chaque année avec lui. »
Encore timoré offensivement, à l’image de son record en carrière à un petit 15 points, Isaac Okoro ne semble pas s’en émouvoir outre-mesure. À vrai dire, ses stats en général sont le cadet de ses soucis. Il veut d’abord répondre aux attentes de son staff, même si ces dernières peuvent parfois lui nuire offensivement.
À ce titre, JB Bickerstaff admet aisément sa part (importante) de responsabilité : « On doit lui libérer l’esprit pour qu’il soit à l’aise pour faire les deux. Quand on le regardait jouer à l’université, il était très bon pour battre son défenseur sur les départs en dribble et pour arriver jusque dans la raquette pour créer du jeu. C’est un peu de ma faute avec tout ce qu’on lui demande en défense. »
La défense dans le sang
Inconstant, comme tout rookie qui se respecte, Isaac Okoro essaie pour le coup de contrebalancer son instabilité offensive par un effort défensif de tous les instants. C’est en tout cas dans son ADN…
« Je pense que la défense est sous-estimée dans la ligue. De nos jours, la plupart des gens vont voir les feuilles de stats et ils veulent voir les chiffres offensifs. Mais si tu regardes vraiment le match et que tu t’y plonges vraiment, tu peux voir combien la défense peut être importante. »
Un peu moins productif en attaque avec chaque mois qui passe, de 9 points, 2 rebonds, 2 passes en janvier, à 7 points, 3 rebonds, 2 passes sur ce mois de mars qui se termine (en passant par un mois de février à 8 points, 3 rebonds, 1 passe), il traverse les tribulations classiques d’un débutant lancé dans le grand bain avec ses petits flotteurs aux bras.
Au début, il y a forcément quelques vagues qui font peur. Et si le petit baigneur a bu la tasse quelques fois, il continue pourtant à avancer, en brasse coulée s’il le faut. Ses 30 minutes de moyenne cette saison sont finalement la seule stat véritablement significative pour Isaac Okoro. Il s’agit, encore et toujours, d’emmagasiner de l’expérience, bonne et mauvaise…
« Il commence à bien s’acclimater à la vitesse, au tempo et à l’aspect physique du jeu », confirme Darius Garland. « Sa confiance est en plein essor. Il prend ses tirs quand il est ouvert, il est agressif, il parle en défense, il chambre même un peu à l’entraînement. C’est vraiment sympa de voir son évolution au fur et à mesure de la saison. »
De plus en plus à l’aise au sein de son équipe, et par extension en NBA, Isaac Okoro ne fait que commencer dans sa progression basket. Ultra physique sur les postes arrières, polyvalent à souhait (comme son match à 8 points, 7 rebonds, 5 passes – et 6 balles perdues – dans la victoire face à Toronto en atteste), il est la nouvelle pépite protégée par les Cavs.
Son association avec Collin Sexton et Darius Garland doit être à l’origine du renouveau de la franchise de l’Ohio qui essaye de tourner la page LeBron James.
« Sa réussite sera une grande part de notre succès à l’avenir », conclut JB Bickerstaff. « Sa capacité à réaliser son potentiel. Quand on construit notre équipe autour de choix de Draft, il faut que les gars qu’on choisisse arrive à exprimer leur potentiel. Isaac est une pièce importante de notre avenir. »
Isaac Okoro | Pourcentage | Rebonds | |||||||||||||
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Saison | Equipe | MJ | Min | Tirs | 3pts | LF | Off | Def | Tot | Pd | Fte | Int | Bp | Ct | Pts |
2020-21 | CLE | 67 | 32 | 42.0 | 29.0 | 72.6 | 1.0 | 2.1 | 3.1 | 1.9 | 2.8 | 0.9 | 1.3 | 0.4 | 9.6 |
2021-22 | CLE | 67 | 30 | 48.0 | 35.0 | 76.8 | 1.1 | 1.9 | 3.0 | 1.8 | 2.4 | 0.8 | 0.9 | 0.3 | 8.8 |
2022-23 | CLE | 76 | 22 | 49.4 | 36.3 | 75.7 | 0.7 | 1.8 | 2.5 | 1.1 | 2.1 | 0.7 | 0.6 | 0.4 | 6.4 |
2023-24 | CLE | 69 | 27 | 49.0 | 39.1 | 67.9 | 1.0 | 2.0 | 3.0 | 1.9 | 2.0 | 0.8 | 0.8 | 0.5 | 9.4 |
2024-25 | CLE | 55 | 19 | 46.4 | 37.1 | 71.7 | 0.9 | 1.5 | 2.4 | 1.2 | 1.9 | 0.6 | 0.4 | 0.3 | 6.1 |
Comment lire les stats ? MJ = matches joués ; Min = Minutes ; Tirs = Tirs réussis / Tirs tentés ; 3pts = 3-points / 3-points tentés ; LF = lancers-francs réussis / lancers-francs tentés ; Off = rebond offensif ; Def= rebond défensif ; Tot = Total des rebonds ; Pd = passes décisives ; Fte : Fautes personnelles ; Int = Interceptions ; Bp = Balles perdues ; Ct : Contres ; Pts = Points.