Sam Hinkie, le mystérieux architecte des Sixers

Plus discret que lui en NBA, ça n’existe pas.

Pourtant General Manager des Sixers, Sam Hinkie se fait très rare pour les journalistes et le grand public en général. La presse locale s’en plaint fréquemment, elle qui n’a par exemple pas eu la moindre nouvelle pendant 7 semaines après sa nomination à Philly. Mais Sam le mystérieux cultive le secret mieux que quiconque dans la Grande Ligue. 

Une enfance paisible dans un village d’Oklahoma, mais…

Né aux Pays-Bas à la fin des années 1970 alors que son père travaille sur un site de gisement pétrolier dans la Mer du Nord, le jeune Sam va connaître la Caroline du Sud avant d’atterrir à Marlow, dans le sud-ouest de l’Oklahoma. Là, dans un de ces villages de carte postale au milieu des champs (et d’autres filons pétrolifères), Hinkie coule une adolescence tranquille.

Il s’adonne à sa passion pour le sport, devenant à la fois arrière défensif en football et meneur de jeu au basket. Excellent étudiant par ailleurs (quitte à ce que son lycée organise spécialement pour lui un cours d’espagnol de 3e niveau), Hinkie croque dans cette jeunesse insouciante à pleines dents.

« J’ai eu beaucoup de chance de grandir dans un tel cadre » reconnait Sam dans The Oklahoman. « Je disais déjà ça quand j’avais 15 ans, je me sentais chanceux d’être là-bas. C’était un endroit où l’on pouvait s’essayer à ce qu’on voulait vraiment faire sans avoir peur de commettre des erreurs. Je ne vois pas d’autres endroits où j’aurais été mieux loti. »

Mais en creux, la mort de son frère, William, qui s’est suicidé avec une arme de calibre 12 quelques mois après leur emménagement à Marlow pèse sur la petite famille Hinkie. Sam en retire non seulement une envie rageuse de monter les échelons de la société mais aussi une façon de faire qui perdure jusqu’à maintenant.

« J’ai fait très attention, peut-être trop, à ne pas attirer les lumières sur moi. Ce n’est pas le genre de choses sur lesquelles je me concentre. Je n’ai rien à cacher mais je préfère mettre les autres en lumière » ajoute Hinkie pour USA Today.

Plus jeune vice-président d’une franchise NBA à 29 ans !

Après avoir obtenu son diplôme [équivalent de la licence en France, ndlr] à l’Université d’Oklahoma, Sam s’envole pour la Californie et Stanford pour poursuivre ses études… non sans avoir rabroué Harvard qui lui faisait pourtant les yeux doux. Il faut dire qu’Hinkie a fait partie du Top 60 des meilleurs élèves du pays établi par USA Today en 2000. Il obtient son MBA sans problème et son premier stage lui met directement le pied à l’étrier puisqu’Hinkie travaille avec les 49ers de San Francisco. Il enchaîne ensuite avec les Texans de Houston toujours en NFL.

Et c’est alors qu’il est à Houston qu’il parvient à convaincre Leslie Alexander, le propriétaire des Rockets, qu’il pourrait probablement arriver à améliorer les performances de son équipe NBA en se reposant uniquement sur des données statistiques objectives. Une fois libre de signer où bon lui semble, Hinkie accepte de devenir l’assistant de Daryl Morey, le GM des Rockets.

C’est là que débute la petite « révolution de palais » de la NBA, quand les GM se rendent soudainement compte de l’importance des statistiques avancées. A la pointe du mouvement, Sam Hinkie devient rapidement incontournable derrière Morey. Et à 29 ans, il devient le plus jeune vice-président de NBA en succédant à son ami et confident.

« J’entreprends toujours quelque chose avec un objectif précis en tête. »

Le discours est ciselé et la parole est mesurée. Sam Hinkie ne parle pas pour ne rien dire. Au contraire, pour lui, le silence est un atout. Recruté ensuite par les Sixers, il a donc laissé les médias gamberger pendant plus de 7 semaines avant d’indiquer ses premières orientations à la veille de la draft 2013. C’était aussi en 2013, trois semaines après toutes les autres équipes que Sam Hinkie a décidé d’annoncer la signature de Brett Brown, repéré sur le banc des Spurs.

Le silence est d’or… alors, il se tait !

La rétention d’informations est tout aussi importante (sinon plus) que la diffusion des informations. Sam Hinkie le sait bien, lui qui n’hésite pas à emprunter les chemins de traverse quand ses collègues prennent l’autoroute de l’info en continu avec les réseaux sociaux de plus en plus présents.

« Sam était de manière évidente le plus brillant d’entre nous. » confirme Duane Lovett, un de ses amis d’enfance. « Il était excellent dans tous les cours de mathématiques. Il y a beaucoup de gens intelligents mais ce qui le différencie, c’est qu’il pense de manière originale. C’est tout lui ça. Il ne fait pas les choses comme les autres les feraient. »

De fait, alors que l’effectif actuel des Sixers ne présente que deux joueurs avec plus de 5 ans d’expérience en NBA (Jason Richardson et Thaddeus Young), Sam Hinkie n’a pas hésité à tenter le tout pour le tout en recrutant Joel Embiid en troisième choix de la dernière draft. Malgré (ou grâce à, c’est selon) l’expérience Nerlens Noel de l’année précédente, Philly a de nouveau voulu tenter un pari sur l’avenir.

En recrutant sur la base unique du talent individuel, les Sixers espèrent bien pouvoir additionner leurs petites pépites les unes aux autres. Avec Michael Carter-Williams qui a été le meilleur débutant de la ligue l’an passé, et deux jeunes intérieurs prometteurs comme Nerlens Noel et Joel Embiid, Philly veut croire en une nouvelle ère. Mais tout cela prendra du temps.

C’est là où la discrétion du bonhomme prend tout son sens. Mais ne vous fiez pas à ces silences radio pour croire qu’il ne travaille pas.

« Sam est un bosseur acharné. » conclut Daryl Morey, son mentor et ami. « Il ne s’arrêtera pas tant qu’il n’aura pas construit une dynastie à Philly. Il va la construire pièce par pièce, Lego par Lego… Et il n’y a pas la moindre chance qu’il n’y arrive pas. »