Enfer ou purgatoire pour la cité des anges?
Dans l'histoire de la NBA, les Los Angeles Lakers ce sont Elgin Baylor, Jerry West, Wilt Chamberlain, Kareem Abdul-Jabbar, James Worthy, Magic Johnson, Shaquille O'Neal. Cette année ce sont entre autres Nick Young, Jordan Hill, Jordan Farmar et quatre all-star plus ou moins sur les rotules à défaut d'être sur pied. Alors forcément, cela n'incite pas à l'optimisme surtout quand vos co-locataires discrets voire même transparents depuis des années prennent en plus l'initiative de décorer la salle commune à leur goût en cachant vos bijoux de famille qui faisaient il n'y pas si longtemps l'admiration de tous.
Il faut dire que l'an dernier a été sportivement particulièrement difficile: commencée en tant que favori pour le titre avec un cinq all-star, la saison s'est ensuite transformée en soap opéra lorsque Mike "Princeton offense" a du céder sa place à Mike "Run and gun", Kobe et Dwight ont joué à "Jean qui grogne et Jean qui rit" pendant que Pau et Steve ont pansé leurs blessures à l'infirmerie. Au final, après avoir talonné les candidats aux playoffs tout l'année pour finir par se qualifier, le tendon de Kobe a lâché et les Lakers ont perdu pied en playoffs face aux Spurs.
Les Buss conduisent-ils l'équipe sur la bonne voie?
Si la saison dernière a été décevante concernant les résultats, elle a également été dramatique en coulisses. Le propriétaire historique de l'équipe, celui qui a contribué à la mise en place du showtime, Jerry Buss, est décédé en février 2013, laissant ses enfants et en particulier son fils Jim et sa fille Jeanie aux commandes de la franchise. Mais si la transmission des pouvoirs a été évidente, la transition n'en a pas moins été difficile. Jim n'est pas son père et n'a pas les mêmes idées que Jeanie, épouse de Phil Jackson. Si tout au long de la saison des désaccords sont apparus notamment autour du rôle éventuel de ce dernier dans la franchise, ils ont atteint leur sommet durant l'intersaison: Dwight Howard s'en est allé sans réels regrets et chacun a imputé ce fiasco aux autres.
Reste à savoir maintenant comment les Buss vont essayer de faire valider à leur équipe le ticket pour les playoffs cette saison et ensuite réussir à négocier le virage très important qui les attend pour débuter un nouveau cycle: renégocier les contrats de Bryant et Gasol et attirer un nouveau joueur de talent pour prendre le relais. A Mitch Kupchak de mener à bien ces challenges en espérant que la mort de Jerry Buss ne corresponde pas au chant du cygne pour les Lakers.
Mike d'Antoni: "les systèmes c'est comme une boîte de Pringles, on sait que le suivant sera toujours le même que le précédent" (citation apocryphe)
"Run Laker Run", tel pourrait être le leitmotiv de l'équipe cette saison vus l'effectif et les préceptes tactiques du coach Mike d'Antoni. Connu pour avoir défendu le "run and gun" lorsqu'il coachait les Phoenix Suns, Mike d'Antoni a déclaré ne pas vouloir trop faire courir son équipe cette année. Néanmoins, il faut se rendre à l'évidence, l'effectif des lakers tel qu'il se présente n'est pas fait pour jouer placé mais doit au contraire profiter de la jeunesse de certains de ses membres pour prendre les défenses de vitesse tandis que ses joueurs les plus expérimentés mais plus âgés et donc plus lents auront la lourde tâche de contourner des défenses déjà placées. C'est le mélange harmonieux de ces profils de joueurs et de ces séquences de jeu qui peut éventuellement permettre aux Lakers d'être en relative réussite cette année.
Un diable bleu chez les anges
Les Lakers accordent rarement, sauf exception comme en 1996 par exemple, beaucoup d'importance à la draft. Ils n'avaient d'ailleurs encore aucun choix de premier tour cette année. Ils ont néanmoins drafté un joueur au second tour, venu de la célèbre université de Duke, Ryan Kelly. Ailier de grande taille, Kelly a fait son cursus complet à l'université (quatre ans) alternant les places de titulaires et de remplaçants. C'est un ailier qui peut jouer près et loin du cercle, qui a déjà une certaine maturité dans son jeu mais qui, s'il va vraisemblablement faire partie du roster des Lakers cette saison ne devrait pas le révolutionner. Tout au plus peut-on espérer pour lui un rôle plus important dans l'équipe que celui de Robert sacre la saison dernière et de bien se remettre de l'opération aux pieds qu'il a subi en fin de saison dernière.
Un roster à explosion, une direction nerveuse mais fragile et des réserves de Gasol suffisantes pour arriver jusqu'en playoffs?
Si la faille de San Andreas a à priori laissé les habitants de Los Angeles tranquilles cette année, le "fail" de Dwight Howard a lui bel et bien déclenché un séisme dans le roster des Lakers.
Celui que l'on a libéré de ses obligations
Metta World Peace a été amnistié. Non pas qu'il se soit encore battu et ait été condamné par la justice mais simplement avec le départ de D12, son salaire devenait trop imposant dans le salary cap pour permettre de recruter des joueurs. Mitch Kupchak lui a donc signifié son départ alors même qu'il est probablement le seul joueur l'an dernier à avoir donné ce qu'il pouvait sur le terrain sans hausser le ton ou pleurnicher. Depuis, il a atterri aux New York Knicks, une équipe dans laquelle il devrait s'intégrer sans difficulté et postuler si ce n'est à un poste de titulaire en tout cas à une participation active y compris en playoffs.
Celui qui n'a absolument pas voulu rester à la fin de son contrat
Dwight Howard est parti. Si si, vous n'en avez peut-être pas entendu parler mais il a signé à Houston, là où les pivots apprennent à onduler du bassin. C'est le noeud de l'intersaison des Lakers, ce qui oriente complètement la saison à venir. Ce départ laisse beaucoup de regrets, beaucoup de rancoeur, mais il faut bien l'admettre, l'expérience n'a pas été concluante. La faute à Howard? Bryant? D'Antoni? Pas de chance? On ne le saura probablement jamais même si l'épanouissement ou non d'Howard à Houston nous donnera une idée de ce qu'il aurait réellement pu apporter (ou non) dans de bonnes conditions à Los Angeles.
Celui qui a fait moins de bruits mais est parti quand même à la fin de son contrat
Earl Clark a remplacé Pau Gasol pendant ses absences prolongées pour blessures l'an dernier. Poste 3-4 sous estimé jusqu'à l'an dernier, il a choisi de quitter Los Angeles pour signer à Cleveland, une équipe prometteuse et plus jeune, qui correspond sans doute mieux à son profil. Il devra néanmoins y montrer de grandes qualités pour avoir du temps de jeu car le roster est bien chargé à ses deux postes de prédilection.
Celui qui doit revenir absolument
Kobe Bryant est blessé. Mais il va revenir c'est sûr. Il doit absolument revenir. Tout est organisé autour de lui dans l'équipe, il symbolise à lui seul les Los Angeles Lakers dans le monde entier. La grande question est quand et dans quelle condition physique et mentale va t-il revenir? A 35 ans, il est certes auréolé d'un prestige immense mais la pression qui risque de peser sur ses épaules à son retour, si elle constituera sans doute un moteur sans précédent pour donner son maximum n'assure pas pour autant que ce maximum sera équivalent à ses performances passées. Paradoxalement, alors qu'il est dans le club depuis plus de quinze ans, Kobe Bryant est donc la principale interrogation de la saison des Lakers.
Celui qui doit faire une grosse saison
Pau Gasol termine son contrat cette saison. Et la saison dernière entre blessures, problème de positionnement, tensions au sein de l'équipe et méforme a été tout sauf simple à gérer pour lui. Cette saison est donc celle de sa dernière chance aux Lakers et tous les ingrédients sont réunis pour qu'elle soit bonne d'un point de vue individuel, ou presque: Howard avec qui il était difficile pour lui de partager le terrain est parti et il sera probablement repositionné en pivot, Bryant n'est pas là lui laissant une partie du leadership de l'équipe, la ligne arrière n'est pas flamboyante donnant ainsi aux intérieurs la possibilité de s'exprimer un peu plus. Les seules limites à ce plan idéal, la santé d'une part qui est parfois chancelante et Mike d'Antoni d'autre part dont les schémas tactiques ne font pas en général la part belle aux joueurs les moins rapides. Néanmoins, si Gasol joue bien, les Lakers peuvent reprendre espoir d'une qualification en playoffs.
Celui qui re-signé pour conserver sa place sur le banc
Robert Sacre est un joueur de banc. Au sens propre du terme puisqu'il ne le quitte que rarement. Pivot remplaçant drafté l'an dernier il n'a eu que peu l'occasion de s'exprimer et malgré la signature d'un nouveau contrat cette année n'aura certainement pas plus de liberté d'action cette saison.
Ceux qui sont toujours sous contrat
Steve Nash est toujours là. Malgré des passages fréquents à l'infirmerie, le double MVP va de nouveau tenter de mener le jeu des Lakers cette saison. Si bien sûr ses qualités ne sont pas remises en cause, c'est son endurance, sa vitesse d'éxecution et plus globalement sa santé qui détermineront à la fois la qualité de sa saison individuelle et également probablement en partie la qualité de la saison des Lakers. Mais quoiqu'il arrive, sa connivence avec le Coach fait de lui le parfait relais tactique de l'équipe sur le terrain, même en relative méforme.
Jodie Meeks est lui aussi toujours sous contrat. Dans l'ombre de Kobe Bryant l'an dernier il avait réussi une saison honorable malgré un pourcentage au tir suspect. En ce début de saison, il va se retrouver en concurrence sur le poste 2 et devra donc prouver à son coach qu'il mérite la place vacante de Kobe Bryant plutôt que le nouvel arrivant Nick Young.
Jordan Hill est un intérieur combattif, de ceux qui abattent un travail important sans en tirer forcément les honneurs à titre individuel. Les départs d'Earl Clark et Dwight Howard devraient lui permettre de jouer un rôle plus important dans la rotation cette année, pourquoi pas titulaire parfois ou sixième homme. Efficace au rebond, il a annoncé avoir travaillé son shoot ce qui pourrait en faire une option offensive supplémentaire pour Mike d'Antoni.
Steve Blake est le second Steve, le remplaçant de Nash à la mène. Expérimenté mais absolument pas spectaculaire, c'est un joueur de devoir, capable de marquer de loin. Un bon remplaçant, en espérant pour les Lakers qu'il ne soit pas obligé de devenir titulaire suite à un forfait de Steve Nash comme cela a été le cas à plusieurs reprises l'an dernier.
Ceux qui arrivent (ou reviennent) dans l'équipe
Chris Kaman est un ancien all-star, en 2010, il n'y a pas si longtemps donc. Et pourtant, il sort d'une saison difficile avec Dallas et personne ne s'est réellement battu pour s'offrir ses services. Cependant, c'est peut-être l'un des facteurs importants du recrutement des Lakers, un joueur capable d'assurer une présence conséquente à l'intérieur, de marquer des points, de faire hésiter l'attaquant par la masse qu'il représente à défaut d'être un bon défenseur, bref un joueur qui peut avoir un réel impact sur l'équipe d'autant plus qu'il a de fortes chances d'être aligné face aux remplaçants de l'équipe adverse la plupart du temps.
Jordan Farmar est un ancien Lakers, parti à l'intersaison 2012 car il ne faisait plus partie des plans stellaires de la Franchise. Peu rancunier, Jordan a néanmoins décidé de revenir pour un contrat nettement moindre que celui dont il disposait dans son club européen juste parce que jouer aux Lakers faisait partie de ses rêves d'enfant. Avouant avoir appris beaucoup de choses en Europe, revenant avec un état d'esprit exemplaire, c'est peut-être lui qui réglera le problème à la mène en cas de défaillance passagère de Steve Nash plutôt que Blake, en tout cas il en a les qualités techniques et physiques ainsi que l'envie. Son profil correspond de plus plutôt bien à ce que le coach des Lakers attend d'un meneur de jeu: du rythme, du rythme et surtout du rythme.
Nick Young sait tirer. Il faut dire qu'il s'entraîne beaucoup, même en match. En lice pour se substituer à Kobe Bryant en ce début d'année puis devenir son remplaçant officiel, son profil correspond donc parfaitement, ainsi d'ailleurs qu'aux préceptes tactiques du coach puisque Nick Young comme d'Antoni apprécient beaucoup les shoots pris en contre attaque et en première intention face à des défenses qui n'ont pas encore eu le temps de se replier. Favori à priori pour être dans le cinq majeur face à Meeks, il faudra tout de même que Nick Young veille à sa sélection de tirs, car même si son jeu lui ressemble de loin et qu'il prend provisoirement sa place dans le roster, on ne lui pardonnera pas autant que l'on peut pardonner à Kobe Bryant en cas d'échec ponctuel.
Wesley Johnson a été choisi quatrième lors de la draft 2010 et a connu depuis des saisons difficiles qui ne lui ont pas permis de confirmer ce statut. Cette saison aux Lakers est donc pour lui l'occasion ou jamais de relancer sa carrière ou même plutôt de la lancer. Ailier, il a peu de concurrence du fait du départ de MWP et sera certainement dans le cinq majeur. A voir maintenant ce qu'il va pouvoir lui apporter.
Ceux qui vont se battre pour une place dans le roster
Il reste quatre place dans le roster pour les quatre joueurs suivants et le rookie Ryan Kelly. Il y aura donc forcément au moins un déçu en début de saison.
Xavier Henry a lui aussi été drafté haut en 2010, à la douzième place. Après des débuts décevants en NBA, il cherche tout comme Wesley Johnson à se relancer aux Lakers. Auteur d'une bonne pré-saison malgré des performances irrégulières il va sans doute intégrer le roster et être mis en concurrence avec Wesley Johnson justement.
Marcus Landry est surtout connu pour être le frère de Carl. Lui aussi pressenti sur le poste de petit ailier, il semble un cran en-dessous d'Henry mais la nécessité d'avoir un minimum de rotation à ce poste pourrait lui permettre d'intégrer l'équipe.
Shawnee Williams est lui un peu plus expérimenté puisque les Lakers seraient son sixième club NBA en sept ans. Il a joué dans le championnat chinois l'an dernier et peut jouer sur les deux postes à l'aile. Il est en concurrence avec Ryan Kelly et Ellias Harris mais possède l'avantage sur eux d'une carrière déjà plus remplie puisqu'il a même déjà participé à des playoffs.
Elias Harris est un jeune joueur américano-germanique qui n'a pas trouvé preneur à la draft 2013. Lui aussi polyvalent à l'aile quoique petit pour le poste 4, il a fait un cursus complet à l'université de Gonzaga. Sa présence dans le roster est soumise à priori à l'absence de Williams, plus expérimenté que lui, ou de Kelly, choisi par les Lakers à la draft. Elle est donc plus qu'incertaine.
Lakers à prendre?
En plus de soixante ans, les Lakers n'ont raté les playoffs que cinq fois. Cette saison sera t-elle la sixième?
C'est évidemment tout l'enjeu de la saison régulière qui va commencer. Avec un roster constitué de joueurs volontaires, aux motivations diverses comme relancer une carrière, la faire perdurer, se mettre en valeur, porter le maillot des Lakers, l'état d'esprit de l'équipe ne devrait pas cette année poser question. D'autant plus qu'ESPN a tout fait volontairement ou pas pour motiver Kobe Bryant à revenir au plus vite en classant dans ses prévisions les Lakers 12è à l'Ouest et Bryant 25è joueur de la ligue. Les résultats par contre pourraient être problématiques si jamais tous ces joueurs assemblés, venus de formations disparates dans une équipe constituée en trois mois n'arrivaient pas à hausser suffisamment leur niveau de jeu. Et on sait que pour les équipes adverses, jouer les Lakers, même affaiblis, est toujours une source de motivation.
Enfin, les fans des Lakers, passablement déçus par une saison 2012-2013 beaucoup moins belle qu'attendue, après avoir beaucoup remis en cause Howard et d'Antoni, sont désormais en attente de résultats. Et les fans des Lakers sont comme leur franchise player Kobe Bryant, de nature impatiente. Cependant, comme sa blessure a appris la patience à Kobe, cette saison risque de l'apprendre aux supporters.
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