Milwaukee Bucks : conférence de presse d'urgence
Jusqu'alors, la franchise NBA de Milwaukee n'avait organisé ce type de conférence de presse que pour annoncer les renouvellements de contrat de son GM, conférences au cours desquelles celui-ci en profitait pour faire le point sur la situation de la franchise. Ses choix, ses attentes, ses critiques, ses regrets, tout cela était évoqué à cette occasion.
Seulement, cette fois, la conférence a été organisée d'urgence, à l'arrache-pied, dans des conditions loin d'être optimales. La faute à des fuites d'informations mettant à mal la crédibilité de la franchise.
Nous sommes donc le 15 Octobre 2005, à Milwaukee.
Jean-Yves : "Alors, c'est vrai ce qu'on dit ? Vous avez réellement échangé Ray Allen ?!
Je vais être franc et direct : oui, mais jamais de la vie je ne me serais permis de prendre cette décision sans le consulter. Ray a donné son accord pour cet échange que nous avons orchestré ensemble, comme nous avions prévu de le faire cette saison.
J'ai vu certaines banderoles dans la rue, ainsi que images très déconcertantes à la télévision impliquant des battes de baseball, des flammes, et des portraits de mon visage. Donc, si vous le permettez, je vais prendre quelques minutes pour vous expliquer le cheminement de cette décision avant de vous rendre la parole.
Quand j'arrive à la tête de la franchise à l'été 97 et que je découvre l'équipe, il est bien une personne que l'on n'aura pas eu besoin de me présenter. Je vous le donne en mille, il s'agissait de Ray Allen. Drafté, pour mon plus grand bonheur, moi, fan de Milwaukee depuis ma plus tendre enfance, par mon prédécesseur quelques semaines plus tôt, Allen arrive avec l'étiquette du talent intergénérationnel à qui il faudra se contenter de donner un bon roster pour lui offrir une chance de ramener le Larry O'Brien Trophy à Milwaukee. Un MVP en puissance, ni plus ni moins.
Bref, deux ans plus tard, je décide qu'il est fin prêt à prendre seul les reines de la franchise et acte le transfert de Glenn Robinson pour lui offrir les pleins pouvoirs. Cette année-là, nous nous hissons en Finales de Conférence pour ce qui est jusqu'ici le plus bel accomplissement de ma carrière, le point d'orgue d'une campagne à 59 victoires avec Ray, Sam (Cassell), Chris (Mullin), Kevin (Garnett), Dikembe (Mutombo), et Tom (Gugliotta). Malheureusement, on connait tous cette histoire : la série est à égalité 2-2 contre la superteam des Lakers, champions sortants (97) et qui seront encore sacrés deux fois les deux années suivantes (99 et 00) avec au total 6 Finales de Conférence d'affilée, mais la blessure de Gugliotta est un réel coup dur pour nous, lui qui venait d'être élu homme du match au Game 4, et les Lakers remportent la série par 4-3, nous envoyant en vacances.
Après ça, j'aurais eu beau toute tenter en montant des rosters capables d'aller chercher ce foutu titre, nous n'aurons jamais réussi. Ou du moins pas encore, pas sans passer par une reconstruction totale.
Deux ans après cette Finale de Conférence perdue face aux Lakers, on ne disputera même pas les Playoffs. Il faudra attendre l'été suivant, et l'arrivée du double DPOY (devenu quintuple depuis) Marcus Camby pour replacer Milwaukee comme concurrent pour le titre et apporter un réel soutien à Ray, mais ses deux saisons à Milwaukee se conclurent par deux nouveaux échecs prématurés en Playoffs. Voilà pourquoi, l'an dernier, j'ai décidé d'agir en appuyant sur le bouton reset, comme vous le savez.
Avec Ray, nous avons tout vécu, exceptée l'ivresse tu titre. Constructions, remodelages, déceptions, et désormais reconstruction. Cette reconstruction, nous l'avons envisagée ensemble. Lui, moi, et le propriétaire de l'équipe. Cela n'a jamais été un secret que Ray faisait autant partie de l'organigramme que de la famille. L'an passé, je lui avais fait la promesse de tout mettre en oeuvre pour ce qui semblait être notre dernier challenge : faire de lui un MVP qui nous emmènerait, malgré tout, en Playoffs. Défi à moitié réussi : les Playoffs n'ont pas été atteints, mais Ray est devenu MVP. Pour le plus grand plaisir du joueur évidemment, mais surtout celui de ses fans à travers le monde.
Katharina : "L'histoire est belle Sylvester, mais cela ne nous parle toujours pas de ce qui nous intéresse !"
J'y viens, j'y viens. Je n'ai pas pour habitude de laisser mes sentiments parler, mais, cette fois, j'ai jugé que c'était nécessaire. Ce n'est pas tous les jours qu'on échange un joueur qui a passé ses dix premières années de carrière dans sa franchise, qui plus est un MVP !
Où en étais-je donc ?
Youssouf : "Vous parliez de son trophée de MVP comme de l'aboutissement de la saison dernière."
Ah, oui, merci.
Drafté par la franchise, devenu MVP sous nos couleurs. Même sans titre, on peut dire que la boucle était bouclée à cet instant car les espoirs de titre n'étaient plus.
Après la saison, et avant de commencer ses voyages entre promotions et vacances, Ray est venu dîner à la maison et nous avons longuement discuté tous les deux. Jessie, le propriétaire, nous a ensuite rejoint dans la nuit, et, entre franches rigolades, souvenirs, et bières belges, nous avons fini par en venir au fait. La reconstruction entamée devait passer la dernière étape, et Ray devait lui passer à la suivante. Quand on est MVP, on rêve de titre, plus encore que n'importe qui.
Cette nuit-là, nous nous sommes mis d'accords, comme Kareem (Abdul-Jabbar) l'avait fait en son temps : avant la nouvelle année, il serait transféré dans une équipe capable de viser le titre, mais rien ne devrait être discuté publiquement tant que l'échange ne serait pas officialisé. Ainsi, Ray nous a donné une shortlist d'équipes pour lesquelles il pourrait jouer et écrire une nouvelle page de sa carrière, et ne me restait plus qu'à me mettre au boulot pour l'envoyer où il le voulait tout en négociant la meilleure contre-partie possible.
Hector : "Du coup, il part où RayRay ?"
Les instances NBA n'ont pas encore validé le transfert, et cela ne se fera pas avant le 15 Décembre pour des raisons légales, mais, face aux fuites d'informations que nous avons connues ces dernières heures, je n'ai d'autre choix aujourd'hui que de le faire, quitte à risquer mon poste. L'année prochaine, Ray Allen sera un Maverick.
Kristaps : "Et contre quoi ?!"
Avant de vous parler de la contre-partie, on va quand même parler de Ray. Cela me semble être un minimum pour celui qui a écrit l'une des plus belles pages de l'histoire de la franchise.
Dallas n'a pas encore de titre, mais possède en son sein un excellent core, mené notamment par un duo d'intérieurs détonants en les personnes de Shawn Marion et Pau Gasol. Tous les atouts sont là pour en faire un contender, et l'ajout de Ray dans cette équipe les propulsera probablement dans le top 3 des favoris des bookmakers. En plus, on connait tous leur propriétaire, Antony Kincaid, certes fantasque mais vainqueur dans l'âme. A Milwaukee, les ambitions sont toutes autres pour la saison prochaine, donc nous pouvons de tout cœur, et sans remords, espérer que notre Ray Allen chéri puisse, enfin, décrocher un titre, même dans le Texas.
Luka : "Merci pour lui Sylvester, c'est un beau geste que vous faites là. Peut-on cependant vous demander la contre-partie obtenue pour notre MVP ?"
Bien sûr. Cela a fait parler, et cela va déplaire, mais Jessie et moi même avons estimé que c'était opportun d'acter ce deal. En échange de Ray Allen, nous devrions récupérer les premiers tours de draft 2007 et 2008 de Dallas et de Chicago. Vous allez me dire : "mais que vient faire Chicago dans cette histoire ?" En clair, Dallas reçoit Ray Allen donc, en échange de tours de draft, mais se sépare en même temps d'Anthony Parker, qui, lui, prend la direction de Chicago en échange de tours de draft également, mais également de Ricky Davis qui, avouons-le, n'a fait partie de l'équation que pour faire matcher les salaires.
Samuelle : "Waouh, c'est.. nul !"
Quelle est votre nom jeune fille je vous prie ?
Samuelle : "Samuelle."
Samuelle... Vous avez surement raison, je ne vais pas prétendre que vous avez totalement tort. Peut-être que ces picks ne donneront rien d'exploitable, peut-être que Chicago et Dallas garderont leur roster intact et que celui-ci performera aussi bien dans trois ans qu'aujourd'hui, mais, qui sait ? Moi, je préfère me dire que les choses changent vite en NBA, et que faire quatre paris me semble opportun dans notre situation que de n'en faire qu'un. Imaginons que pour X ou Y raison l'un des joueurs phares de ces franchises ne se blesse, même si nous ne le souhaitons pas le moins du monde, ou qu'il demande son transfert ? On ne sait jamais. Par ailleurs, sachant notre entreprise de reconstruction, il n'était pas envisageable pour nous de recevoir du talent plutôt que des tours de draft, même potentiellement très bas.
Latifa : "Alors, le projet, c'est quoi du coup ? Vous n'avez même pas votre pick cette année !"
C'est tout à fait juste, et cela nous permet à tous de nous rappeler la valeur de notre premier tour de draft actuel, pré-senti top 10, alors même qu'il ne valait rien quand nous l'avions lâché. De même que ceux de 2001, qui a terminé 9ème, et de 2005, qui a terminé 6ème.
Bref, pour répondre à votre question, sachez que le plan est parfaitement clair. Cette saison, nous allons tout faire pour viser une place en Playoffs. C'est la raison pour laquelle nous avons signé les retours de Glenn (Robinson) et Joel (Przybilla), mais aussi fait venir Greg (Ostertag) à la Free Agency. L'an prochain, notre travail sera complètement axé sur la progression de nos jeunes, Jameer (Nelson) et Josh (Smith) en tête bien sûr, mais aussi Marvin (Williams) et Keith (Bogans). Si vétérans il y a, ce sera pour apporter leur expérience aux jeunes plus que pour être compétitifs. De la même sorte, et puisque nous disposerons de notre premier tour de draft, nous avons bon espoir de figurer le plus haut possible à la draft et ainsi reprendre nos ambitions de Playoffs là où nous les avions laissées. Enfin, pour parfaire notre roster, nous disposerons du pick des Nets de 2006, des choix de draft 2007 de Chicago et Dallas donc, mais aussi celui des Cavaliers, puis ceux de 2008 de Chicago toujours, Dallas, toujours, mais aussi Los Angeles et... le nôtre, au cas où. En plus de cela, il nous faudra être actif sur le marché des transferts ou de la Free Agency le moment venu bien sûr.
Si vous avez bien compté, vous êtes arrivé à 9. 9 tours de draft sur les trois prochaines années pour reconstruire. 9 tours de draft de 6 franchises différentes. Certains se révéleront être très bas, certains peut-être très hauts. Quoiqu'il en soit, nous avons pris le parti de faire des paris. Espérons que cela payera d'une manière ou d'une autre.
Alphonso : "OK, mais, sinon, vous aviez d'autres propositions ?"
Je n'ai absolument pas pour habitude de donner des informations qui pourraient offrir mes compères GMs en pâture, mais, puisqu'elles ont déjà fuitées, autant que j'en parle.
Vous avez entendu parler des Rockets et des Warriors d'après ce que j'ai cru comprendre et même lire de mes propres yeux.
L'offre des Rockets était axée sur deux tours de draft. Le leur de 2007, et celui des Hornets de 2006. Si les Hornets sont extrêmement prometteurs, ils sont également forts jeunes. Je le reconnais, ce pick devrait finir lottery mais avec autant de chance d'être top 5 que moi de pouvoir offrir un verre à Margot Robbie, avouons-le. Sachant cela, plus le fait que notre projet table plutôt sur 2007/2008 que 2006/2007, nous avons décidé de placer cette offre au second plan. Si encore nous avions su obtenir le premier tour de draft de 2008 de Houston plutôt que 2007, l'histoire aurait été différente, mais les négociations n'ont pu aboutit.
L'offre des Warriors, elle, était basée sur Mike Bibby. Si le joueur est formidable et quoiqu'en disent ses fans, les signes de régression sont là. Il semblerait que son peak ait été atteint et nos analystes prévoient une baisse de performances désormais. Ajoutez à cela le fait qu'il nous faille le re-transférer alors que ces signes sont connus de tous, et un tour de draft peu valuable, et vous comprendrez pourquoi, en tout cas selon notre logique, nous avez décliné cette proposition.
Valentine : "Mouais, pas d'accord mais bon bref."
Je le conçois ma chère, et sachez que mes propos ne visent aboslument pas à manquer de respect ni à mes confrères GMs, ni aux joueurs. Simplement, nous avons choisi une voie différente. Nous avons préféré faire le choix de quatre paris avec les premiers tours de draft 2007 et 2008 de Dallas et Chicago plutôt qu'un, le premier tour de draft de Houston ou celui de Golden State. Je remercie vivement mes confrères pour leurs offres, peut-être réussirons-nous à nous entendre la prochaine fois, je le souhaite.
Emmanuelle : "Et c'est donc pour ça que vous étiez à cran comme vu et entendu dans les tabloïds et émissions people dernièrement ?"
Sachez avant tout que je m'excuse pour mon comportement. Je pensais être seul dans mon jardin, et j'ai pour habitude de me balader nu à cette période de l'année pour recharger mes shakras. Ces photos et vidéos de moi hurlant au téléphone, nu comme en vers, portent atteinte à ma vie privée et je n'aurais jamais imaginer une seule seconde qu'un paparazzi puisse avoir réussi à escalader le flan de montagne de quatre mètres, traverser le fleuve infesté de crocos, grimper mon peuplier de douze mètres, et déjouer ma sécurité privée, pour réussir à se poster ici et prendre ces clichés et enregistrer ces images.
Quoiqu'il en soit, comme le dit mon ami Texan : "quand t'as un combat d'boeufs, y'a deux paires de baloches qui s'entrechoquent." Autrement dit, lorsqu'il y a discorde, toutes les parties impliquées ont leur torts. Je reconnais les miens et m'en excuse, je n'aurais simplement pas du réagir, encore moins sous le coup de l'émotion. Désormais, nous sommes passés à autre chose et n'attendons plus qu'une chose : le début de la saison !
Reginald : "D'ailleurs, félicitations !"
Excusez-moi ?
Reginald : "Eh bien, pour vos photos de nu.. La nature vous a gâté !"
Merci monsieur, c'est très agréable à vous et cela détend l'ambiance !
Micheline : "Bon du coup, désolé hein messieurs mais on a autre chose à faire que de parler de teubs, même si bon, c'est intéressant je dois l'avouer.. Du coup, vous préparez visiblement les drafts des trois prochaines années si j'ai bien compris ?"
Tout à fait Madame. Comme l'orage est passé et que je veux vous prouver toute ma sincérité, je vais vous offrir quelques noms de jeunes joueurs pour lesquels je demande d'ors et déjà des scouting reports réguliers. Pour 2006, où nous disposons du premier tour de draft des Nets, nous avons à l'oeil les jeunes Millsap, Tucker, et Ilyasova. Pour 2007, ce sont Durant et Horford qui impressionnent. Pour 2008, j'avoue avoir un coup de cœur pour le petit, façon de parler, Brook Lopez mais cette cuvée regorge de talents avec les Rose, Westbrook, et Love en tête d'affiche. Quoiqu'il en soit, nous avancerons pas à pas et tout dépendra de la valeur de nos différents picks le moment venu.
Edgar : "Mais vous comptez quand même jouer cette saison, non ? Quel sera notre cinq majeur ?"
Oh que oui nous comptons jouer, et nous comptons bien atteindre les Playoffs pardi ! Une fois le transfert de Ray Allen acté, le starting five devrait être composé de Jameer Nelson à la mène, Keith Bogans et Glenn Robinson sur les ailes, et Josh Smith et Joel Przybilla à l'intérieur. A leur relais, Brevin Knight, Ricky Davis, Jerry Stackhouse, Marvin Williams, et Greg Ostertag.
Le nouveau cinq majeur de Milwaukee (jerseys non-contractuels).
